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Par Françoise Solliec

Ecouter les élèves, dialoguer avec les familles, assurer la cohésion de l’équipe éducative, la barque du professeur principal est décidément bien chargée. Et les récentes réflexions ministérielles sur la construction du projet personnel de l’élève ne vont pas dans le sens de l’allègement.

Un dialogue à construire, voire à forcer

Dans l’idéal, les conseils de classe de 3ème ponctuent une relation continue de l’équipe éducative avec l’élève et sa famille, orchestrée par le professeur principal auquel les textes conférent une charge impressionnante. Ainsi le site de l’académie de Nantes résume (!) le rôle du professeur principal qui :

« écoute l’élève, sa famille, ses différents partenaires

Consulte les enseignants, les délégués élèves, la documentaliste, le CPE, l’Assistante sociale, l’Infirmière, le Conseiller d’Orientation Psychologue

synthétise la situation de la classe et de chaque élève

aide l’élève à l’élaboration de son projet personnel

informe l’élève et ses parents

coordonne et anime l’équipe pédagogique

établit le lien avec l’équipe de direction ».

http://www.pedagogie.ac-nantes.fr/62312765/0/fiche___pagelibre/?RF=FC_NTpeda4

« C’est sans doute plus facile dans un petit établissement comme le mien » déclare Vincent Dhuicque, qui fut professeur principal (SVT d’une classe de 3ème dans un collège du Cantal pendant plusieurs années. « En accord avec l’équipe de direction, les élèves y sont très bien suivis, dès le début de l’année. Pour moi, en tant que professeur principal, j’assurais à chaque élève un entretien individuel au 1er trimestre. C’est l’occasion d’ouvrir un dialogue un peu autre avec l’élève pour qu’il puisse parler en toute liberté de ses réactions et de ses difficultés. Moins de la moitié des élèves ont des idées précises sur ce qu’ils veulent faire. C’est assez souvent le cas des « bons » élèves, ceux qui ont plus de 12 de moyenne et ne présentent pas de lacunes et français et en maths, qui, de toutes façons, savent qu’ils vont aller en seconde générale. C’est plus difficile avec ceux qui refusent de se projeter dans l’avenir parce qu’ils ont un très mauvais dossier (en moyenne 3 ou 4 élèves dans une classe de 20). Il faut passer du temps avec eux, leur proposer plusieurs pistes avant qu’ils n’en acceptent une, souvent du bout des lèvres. Il y a aussi quelques élèves qui surestiment leur niveau et ont des prétentions irréalistes (devenir avocat ou médecin par exemple). Et certaines spécialités professionnelles sont si cotées qu’elles sont encore plus difficiles d’accès que la 2nde GT et demandent vraiment un excellent dossier ».

En fin de 1er trimestre, après le conseil de classe, les parents sont conviés à une réunion d’informations, qui est aussi l’accasion d’amorcer le dialogue. « Les parents viennent volontiers, sauf peut-être dans 2 ou 3 cas. On leur propose alors de les rencontrer à d’autres moments ».

Les conseils de classe sont évidemment un lieu d’échanges, voire de confrontations, dans lequel le professeur principal doit veiller à harmoniser les regards. « Les résultats des élèves sont déterminants, mais les façons de noter ne sont pas identiques d’un enseignant à l’autre et il faut en tenir compte. Il arrive que le comportement de l’élève ne soit pas le même d’une discipline à l’autre et cela aussi doit être discuté. On passe beaucoup de temps au 2nd trimestre à formuler une position sur les vœux provisoires des élèves et des familles, qui peuvent d’ailleurs être différents. La COP est présente et joue un rôle très important car elle rencontre systématiquement les élèves individuellement au moins 2 fois et assure des permanences dans l’établissement. Par contre, dans cet échange, les élèves et les parents délégués sont souvent très discrets ».

Lorsque les propositions du conseil de classe sont différentes des vœux émis par les élèves ou les familles, le dialogue se poursuit. Tous les élèves sont à nouveau vus en entretien individualisé et les parents sont invités à une nouvelle réunion. Cette procédure permet d’affiner les choix et très souvent les propositions du dernier conseil de classe sont bien acceptées par les familles. « En 4 ans, je n’ai connu qu’un seul cas d’appel, pour une maman qui voulait absolument voir sa fille affectée en 2de GT ».

Cette année, pourtant, la réforme annoncée du lycée et la reconquête du mois de juin risquent de compliquer les choses. « Pendant tout le premier trimestre, on a été incapable de répondre aux questions, dans l’attente des décisions. On a beaucoup perdu en crédibilité. Et la reconquête du mois de juin nous fait repousser le conseil de classe du 3ème trimestre après le 15 juin, alors que les dossiers d’orientation doivent être prêts pour le 10 juin, pour entamer la procédure d’affectation informatisée. Cela veut dire que le conseil de classe du 2nd trimestre sera encore plus important et que le consensus avec les familles devra être trouvé à son issue ».