Print Friendly, PDF & Email

Philippe Mazereau : les conséquences de la loi de 2005 à l’Ecole
Le processus de Lisbonne et les échanges entre les états a engagé une harmonisation au niveau européen des politiques éducatives de prise en charge des élèves « à besoins éducatifs particuliers ». Et en France ?

La définition officielle du handicap recouvre des situations variées, de la dyslexie aux grandes dépendances. C’est une catégorie administrative qui permet d’accéder à des compensations, même si la MDPH (maison départementale des personnes handicapées, sous la responsabilité du Conseil Général) est encore perçue comme lointaine par les parents. Par contre, elle modifie le rapport en positif des parents d’handicapés avec les enseignants. Dans les dernières années, l’adhésion des enseignants au principe de la scolarisation est réelle, malgré les difficultés quotidiennes. Elle est vue comme une bonne chose, avec une dimension anti discriminatoire. C’est un retournement d’opinion.
Une situation en déséquilibre instable.Lorsqu’on interroge le vécu des enseignants sur la mise en place de la loi, ils témoignent d’un resserrement des collaborations internes à l’Education Nationale : ils citent souvent le psychologue scolaire et parfois les RASED. Le directeur de l’école prend souvent un rôle pivot. Les CLIS (Classes d’Intégration Scolaire) sont de plus en plus intégrées à l’école, même si elles restent généralement le « camp de base » de ces élèves. L’enseignant référent est surchargé, souvent dans une position difficile avec tous ses interlocuteurs (enseignants, familles, MDPH, IEN, RASED…, « entre le marteau et l’enclume »

Parmi les partenariats, le médico social et les SESSAD sont plébiscités par les enseignants. En revanche, du côté des CMPP ou des IME, les choses sont plus difficiles comme auparavant sans changement. Le « mur invisible » est encore présent.
Mais Ph. Mazereau constate encore la persistance d’une logique d’intégration (loi de 1975) plutôt que celle d’incusion. « Comme si un élève, pour être intégré, devait faire la preuve qu’il est capable de suivre une classe ordinaire, ce qui est un paradoxe complet » précise l’intervenant.
Les adaptations pédagogiques dans les classes restent difficiles à construire. « C’est presque un inpensé du métier », même si la mise en place récente de l’aide personnalisée provoque un questionnement sur les pratiques en classe.
67 % des enseignants généralistes déclarent ne procéder qu’à très peu d’adaptation en classe, comme s’ils étaient attachés à ne pas stigmatiser ces élèves. On fait souvent davantage de socialisation que de travail centré sur l’acquisition des savoirs. Pour Ph. Mazereau, la question des aides spécialisées sein de la classe semble à développer.
Il faut dire que l’analyse de l’offre de formation livre un constat cruel :
– en formation initiatle, on constate une grande hétérogénéité des modules proposés, de 0 à 30 h.
– – la formation continue se résume souvent à une adaptation au poste pour faire face à l’urgence pénurie de personnels spécialisé, plus rarement à des mise en réseau (coordination partenariat, groupe ressources, stages intermétiers..). Les formations sur site sont ponctuelles.
Le CAPA-SH (élémentaire) et le 2CA-SH (secondaire)
La réforme de la formation des maîtres spécialisés, réduisant les voluments horaires et incrites dans l’alternance, s’appuient sur des ressources plus ou moins riches. Si le va-et-vient entre la classe et le centre de formation est un principe fécond, la mise en œuvre très souvent problématique. On valorise les dispositifs d’analyse de pratique, de mutualisation. Les modalités de certification (CAPA-SH ou 2CA-SH dans le secodn degré) est interrogée : l’examen ou l’inspection – surtout dans le second degré – semblent formels.

Sortir par le haut ?
Alors que l’accueil des personnes handicapées dans le monde du travail ne s’améliore pas, l’Ecole est clairement à contre-courant. Mais un des points noirs reste la situation précaire des AVS, sans avenir ni possibilité de professionnalisation.
C’est sans doute du côté de la classe et l’identité enseignante qu’il faut, pour le conférencier, insister et travailler : « La notion de groupe est peu prise en compte en France. On fait encore trop souvent classe pour un élève hypothétique ». Pour « sortir par le haut », le chantier semble considérable : revoir les pratiques d’évaluation, travailler en maternelle dès l’émergence des difficultés, créer des postes d’enseignants spécialisés dans le soutien aux situations de scolarisation d’élèves handicapés, travailler à plusieurs dans la classe, former en inter-professionnel,
« L’enseignant n’est pas seulement un praticien réflexif c’est un acteur politique et social » conclut l’ex-enseignant devenu chercheur. Ceux qui ont écouté Baudelot et Establet ne sont pas dépaysés…