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Qu’est ce qui pousse un nouvel enseignant, un nouvel établissement à participer à la Grande Lessive ? En quelques années, la Grande Lessive s’est imposé comme le principal projet pédagogique français, suscitant un enthousiasme entrainant. Le 15 octobre, le collège Elsa Triolet de Paris 13ème a rejoint à son tour la Grande Lessive. La professeure d’arts plastiques, Florence Davin et la principale, Catherine Achouline, nous expliquent pourquoi.

« On est un collège qui n’est pas beau de l’extérieur mais de l’intérieur », nous dit C Achouline. Coincé au centre d’une cité populaire du 13ème arrondissement, à quelques mètres des établissements prestigieux du 5ème arrondissement, le collège Elsa Triolet a du mal à recruter. Il aligne tous les dispositifs spéciaux : classes d’accueil pour non francophones, Ulis, Segpa. Le collège tient grâce à une équipe pédagogique stable et investie. Un metteur en scène est en résidence dans l’établissement et prépare avec les professeurs de français un spectacle sur les rêves. Une autre façon d’écarter les tours qui font de l’ombre au collège.

Prendre contact avec l’établissement

Le 15 octobre les cours de récréation sont ornées de près de 400 dessins, suspendus à des cordes à linge. Il y a de tout. Des collages, des peintures et même de la broderie. Le thème d ecette Lessive, « la tête en bas » invite aux jeux de reflet, aux symétries, au surréalisme. Les dessins ont été réalisés et affichés par les élèves. Mais des enseignants, des surveillants, la direction peut-être aussi, ont aussi affichés leurs oeuvres. Dans le hall d’entrée, les élèves se baissent pour éviter les dizaines de dessin accrochés aux cordes à linge. On s’arrête pour commenter. On interroge la professeure pour savoir où est son propre dessin.

« La Grande Lessive c’est une manière de prendre contact avec l’établissement », nous dit Florence Davin. Remplaçante dans l’établissement, elle a pris le risque de lancer la Grande Lessive et elle s’en trouve bien. Elle est sortie de l’anonymat. Le projet a plu à la direction et aux collègues. L’intendance a compris l’intérêt de la commande de pinces à linge et le personnel d’entretien a participé à l’étendage.

« Je me suis lancée parce que j’avais déjà vu la Grande Lessive dans un autre établissement où je faisais un remplacement », nous dit Florence Davin. « J’aime la simplicité du dispositif. Il décomplexe les gens devant la pratique artistique. Et il crée du collectif. Tout le monde participe et partage son travail sous le regard des autres ». Le travail des élèves a été fait à la maison après une phase de réflexion en commun sur le thème de l’année. « Ce matin les travaux étaient bien là, rendus à l’heure », souligne F Davin. Dans la cour si le vent d’automne fait tomber un dessin, les élèves le ramassent. Il n’y a pas de dessin à terre.

Créer du lien

« Ca crée du lien », souligne Catherine Achouline, principale du collège. Elle a sauté sur la proposition de F Davin parce qu’elle avait vu , dans un autre poste, les effets positifs du projet. « La Grande Lessive crée du sentiment d’appartenance par la participation à un projet artistique commun. Mais ça encourage aussi le respect ». Depuis le matin, les élèves zigzaguent entre les dessins sans les dégrader.

Plus de 95 pays participent à cette Grande Lessive d’automne, nous dit Joelle Gonthier, à l’initiative de l’événement. « Ce sont parfois des pays qui veulent sortir de leur isolement », relève-t-elle, comme l’Iran, la Russie ou l’Irak. En métropole plus de 2000 projets sont enregistrés, la pointe émergée d’un iceberg pas quantifiable. « Parfois c’est une école de village. Parfois c’est une ville ». A Amiens, par exemple, la Grande Lessive est suspendue à un fil de 2km de long avec des milliers d’oeuvres.

« Comment expliquer que les arts plastiques mobilisent autant alors que c’est la 5ème roue du carrosse de l’Education nationale », demande Joelle Gonthier. Bonne question…

François Jarraud

La Grande Lessive