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Accélération de la reprise, évaluations, travail des fondamentaux : la circulaire organisant la réouverture des écoles et établissements scolaires ramène sans transition les enseignants et les élèves dans l’Ecole de JM Blanquer. Des maths, du français, des fiches bilans à échanger avec les familles. Normes et normalité reviennent très vite avec des aménagements minimums.

 » L’objectif est d’abord de garantir des conditions de santé et de sécurité grâce à un protocole sanitaire très strict, qui conditionne l’ouverture de chaque école et de chaque établissement ». La circulaire de réouverture des écoles mentionne le cadre sanitaire. Mais il n’en sera plus question par la suite, comme si ce cadre n’allait pas lourdement peser sur la vie des enseignants et des élèves tout au long des semaines à partir du 11 mai.

Une rentrée irréaliste

Car ce que met en avant la circulaire c’ets la rapidité d’un retour à la normale. D’abord par le calendrier. A partir du 4 mai, jour de publication de la circulaire, directeurs et chefs d’établissement préparent la rentrée, comme si les premiers n’avaient pas d’autres tâches à remplir. « Cette phase permettra notamment de former les personnels », ose dire le texte , comme si les uns et les autres avaient le temps et les compétences pour le faire. Si on suit le texte le « plan de reprise départemental » soit être arrêté par le Dasen et le conseil d’école informé dès cette semaine. Il n’est rien dit du conseil d’administration. En même temps il fait courir après les familles, notamment celles qui n’ont pas donné signe de vie depuis longtemps.

Coté enseignants, la pré reprise des professeurs des écoles est fixée au 11 mai et peut durer jusqu’au 12 mai. La « pré rentrée » des professeurs de collège doit avoir lieu « au cours de la semaine du 11 au 15 mai ». Autrement dit les cours au collège sont sensés reprendre dès le 18 mai.

Ce calendrier accéléré entre en collision avec les demandes des syndicats. Mais aussi avec celles de nombreux maires qui ont besoin de temps pour monter en puissance leurs propres agents. Il ignore superbement les décisions des collectivités locales alors qu’elles vont bien s’imposer sur le terrain.

« Les professeurs souffrant d’une vulnérabilité ne sont pas convoqués pour ces prérentrées ». Ils sont aussi exemptés de cours en présentiel en mai et juin (une liste est annexée à la circulaire) ainsi que ceux qui vivent avec une personne ayant cette vulnérabilité.

Les professeurs enseignant en présentiel n’assurent plus d’enseignement à distance. Celui-ci est confié aux professeurs qui restent à domicile. Une organisation qui ignore la réalité de ce qu’est une classe.

Une organisation alternée

La circulaire prévoit la rentrée des classes « en privilégiant les classes charnières de GS, CP et CM2 » pour l’école et les 6èmes et 5èmes au collège. Fin mai sera envisagée la réouverture complète des collèges et des lycées. Le choix des parents sur l’enseignement à distance ou à l’école n’est valable que jusqu’au 1er juin. C’est la date à laquelle le régime d’indemnité du chômage pour les parents gardant leur enfant change. Sans attestation que leur école ne peut pas accueillir leur enfant, à cette date, les parents ne seront plus indemnisés comme avant. C’est une pression très forte pour rescolariser tous les enfants en juin.

 » Les cours se déroulent en groupe comprenant au maximum 15 élèves », sauf en maternelle où le maximum est fixé à 10 élèves. La circulaire prévoit un accueil « selon des modalités (un jour sur deux, deux jours consécutifs sur quatre ou une semaine sur deux) déterminées par les IEN et les chefs d’établissement en concertation avec les équipes pédagogiques ». S’y ajoutent les enfants de personnels prioritaires , handicapés et décrocheurs qui doivent tous trouver place dans les classes quelque soit leur niveau.

Bilan, évaluations, fondamentaux…

« Les méthodes pédagogiques sont adaptées au contexte particulier du déconfinement » affirme la circulaire.  » Le retour des élèves en classe est un moment privilégié pour les écouter ». Mais très vite il est question du « bilan de la situation de chaque élève…L’enjeu n’est pas de finir les programmes mais de s’assurer que les élèves maîtrisent les connaissances nécessaires pour poursuivre leur scolarité dans de bonnes conditions ».

On entre dans les priorités ministérielles avec des « priorités » axées sur les fondamentaux à tous les niveaux. En GS les enfants travaillent sur le vocabulaire et la conscience phonologique. En CP ils ont droit à 4 heures de français et de maths par jour, le reste pèse pas lourd. Au collège « les enseignements d efrançais et de mathématiques doivent être priorisés ». C’est l’école à la Blanquer.

L’Ecole d’après c’est l’Ecole d’avant…

Tout cela est décliné en détail par Eduscol qui propose des exercices types par niveau à faire pour le bilan de rentrée. Dès la GS il faut « faire des choix et cibler l’essentiel », comme si la situation n’était pas déjà hyper délicate pour les enfants. La description du 1er jour en maternelle recommande l’empathie mais c’est pour mieux diriger vers le guide de référence sur le vocabulaire. Comment un enfant de maternelle cloué sur son siège et interdit de contact social pourrait bien vivre l’école ? Cette question est totalement évacuée puisque la situation est imposée en France alors que nos voisins ne font pas rentrer les maternelles.

Eduscol propose aussi des fiches bilans à faire signer par les parents avec des « objectifs d’apprentissage ». Pour chaque niveau on a des « attendus » à atteindre extrêmement détaillés.

La circulaire invite à privilégier les décrocheurs. Elle proclame l’empathie. Mais c’est l’école de la compétition et du tri qui est immédiatement remise en place. Le ministre a beau dire qu’il invente « un nouveau système » comme il l’a dit dans Le Figaro le 2 mai. L’Ecole d’après c’est bien celle d’avant.

François Jarraud

La circulaire

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