L’Expresso du 12 janvier 2023
- Le fait du jour -
Il y a des constantes à l’Education nationale. Plus on supprime de postes d’enseignants, plus on prétend assurer le retour aux méthodes traditionnelles. Avec une série de circulaires, à paraitre au BO aujourd’hui, Pap Ndiaye enfile les vieilles charentaises pédagogiques de Robien, tricotées sur mesure par JM Blanquer. Suppression des cycles, obsession de la fluence,…
L’annonce d’un plan pour l’école maternelle a provoqué des craintes, comme à chaque fois qu’un ministère annonce des mesures à venir, mais il a aussi suscité aussi des espoirs car ce secteur d’enseignement mérite que les décideurs institutionnels s’y intéressent. Cette confiance – certes très prudente – dans les décisions à venir était confortée par…
« On compte sur nous ; à juste titre, car nous sommes motivés pour nos élèves, appliqués, méthodiques, travailleurs. Il ne manque plus que des conditions de travail et de rémunération décentes, et une reconnaissance concrète ». Professeure de maths en collège, Claire Lommé réagit aux nouvelles circulaires pédagogiques du ministère. Conseils académiques des savoirs fondamentaux…
Au SNUipp-FSU, syndicat des enseignants et enseignantes du premier degré, la coupe est pleine. Tant sur le fond que sur la forme, la porte-parole Guislaine David nous fait part de son mécontentement. « On a un dialogue social de façade. Nous avons rencontré le ministre avant les vacances de Noël. Il ne nous a rien dit…
- Les disciplines -
Travailler avec l’allemand sur un projet pluridisciplinaire autour de la transmission de l’expérience du camp de Buchenwald : c’est le projet Buchenwald que mène la professeure d’allemand Pauline Blanchet avec ses élèves du lycée Utrillo à Stains. Ce projet s’inscrit aussi dans l’histoire de Stains puisque des communistes ont été déportés à Buchenwald : les élèves vont…
- Le système -
Dans une tribune publiée au Monde, associations, syndicats, enseignants spécialistes de la maternelle « réclament, dans une tribune au « Monde », une école bienveillante, à rebours d’objectifs de performance qui gagnent, selon eux, du terrain » « L’école maternelle que nous voulons » Nous sommes enseignantes et enseignants de l’école maternelle, Atsem [agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles], parents d’élèves,…
Engagée seule dans une journée d’action sur les salaires, la voie pro et les conditions de travail dans l’éducation le 17 janvier, la FSU a publié un communiqué après les annonces d’Élisabeth Borne. La fédération syndicale prend le parti de transformer cette journée de grève spécifique à l’École en journée « d’actions diversifiées qui peuvent être en dehors du…
- La classe -
« Les choses » se découvrent au Louvre jusqu’au 23 janvier 2023. La représentation des choses, dont on trouve des témoignages dès la préhistoire, permet une formidable plongée dans l’histoire. L’exposition revisite le genre de la nature morte, dans la perspective de faire dialoguer les artistes du passé et ceux du présent. Pour les deniers jours…
Pour célébrer le dixième anniversaire de la remise du prix noble de la Paix à l’Union Européenne, les Régions de France ont souhaité marquer cet anniversaire en « appelant les jeunes français à mesurer, par eux-mêmes, ce qu’ils ont à défendre en choisissant le camp de la démocratie, du droit et de la paix, au…
- L'élève -
L’Institut du monde arabe propose des cours d’arabe standard, d’arabe dialectal algérien, marocain, tunisien, égyptien et syro-libanais, ainsi que des cours de théâtre et de chant en arabe. Les inscriptions pour le prochain semestre de février à fin juin 2023 se terminent le 15 janvier 2023. Ces cours semestriels comprennent 30 heures de cours, soit…
- Les disciplines -
Concours de Virelangues en langues étrangères dans l’académie d’Orléans. Candidature avant le 27/01/23 pour la semaine des langues qui débute le 4 avril 2023 Des élèves du cycle 3, cycle 4, de la classe de seconde et du cycle terminal participent à un concours de virelangues dans une langue qui n’est pas leur langue maternelle.…
L'édito
Amélie, merci !
Alors que les enseignants entament un mouvement social de longue durée, il faut rendre sa part de mérite à Amélie Oudéa-Castéra. Pour avoir incarné aussi visiblement les non-dits du projet éducatif d’Emmanuel Macron, elle mérite un remerciement. Et elle nous donne l’occasion de revenir sur ce projet et ce combat. Depuis 2017, Emmanuel Macron a fait de l’éducation « le combat de notre siècle ». Et, depuis 2017, les enseignants bloquent le projet. Un long septennat de luttes qui nécessite maintenant une réponse de la société.
L’Ecole et Ibiza
A quoi pense Emmanuel Macron ? D’année en année, son choix semble moins sur. Jean-Michel Blanquer avait su déguiser la politique éducative d’Emmanuel Macron sous le masque de la République et de la science. En 2018-2019, au moment de la loi Blanquer, sous la poussée des enseignants, son siège vacillait. Mais, avec l’aide de la droite sénatoriale, il avait réussi à se maintenir en usant de son image de défenseur de l’Ecole. Il fallut Ibiza pour qu’il tombe. Le ministre faisait passer ses vacances avant son travail, la jet-set avant la République.
Avec Amélie Oudéa-Castéra, Ibiza est arrivé dès le premier jour. Mieux que ses prédécesseurs elle affichait sans vergogne ses choix de caste et revendiquait ses privilèges. De déclaration maladroite en formule malheureuse, la ministre a fini par incarner la grande bourgeoisie séparatiste, plutôt VIIème que 6ème. Ce choix, malheureux pour E. Macron, met en évidence les décisions anti sociales de la politique éducative d’E. Macron.
Une seule politique depuis 2017, celle de Macron
Car, depuis 2017, c’est bien la même politique éducative qui essaie de s’installer. On peut même remonter à 2016, où le futur ministre d’Emmanuel Macron, membre de l’Institut Montaigne, la définit. Dans « L’école de demain« , JM Blanquer en fixe les bases. C’est l’autonomie d’établissements scolaires mis en concurrence, dirigés par des chefs managers. C’est la fin du collège unique remplacé par des établissements à autonomie pédagogique. C’est l’éducation réduite aux fondamentaux dans le premier degré et pliant sous leur poids dans le second. Ce sont des enseignants dont les pratiques pédagogiques sont dictées et dont le mérite est estimé annuellement grâce aux évaluations nationales. Cette privatisation de la gestion de l’éducation nationale est proclamée par les gouvernements d’E. Macron. En février 2018, E Philippe promeut l’individualisation des salaires et la libération des managers dans toute la fonction publique. Quelques mois plus tard, E. Macron fait de la transformation de l’Ecole « le combat de notre siècle ». En aout 2022, il revient sur les fondamentaux de 2016 : autonomie des établissements, contractualisation générale des établissements et des enseignants. Cela nous donne le Pacte, le CNR.
Les enseignants sont seuls à faire reculer Macron
Si E. Macron se répète depuis 2018, si ses gouvernements fixent le même cap depuis 2017, c’est que la politique éducative du président peine à s’installer. Certes la loi de transformation de la fonction publique est passée. La loi Blanquer aussi. Le Pacte est mis en place. Mais la grande libéralisation de l’Ecole promise depuis 2016 n’a toujours pas eu lieu.
Les enseignants ont fait reculer Blanquer et sa loi en 2019. Il a fallu la désorganisation issue du confinement pour que la loi Rilhac passe. La transformation radicale du lycée professionnel a été freinée par des années d’opposition réussie des enseignants des L.P. Ils ne s’en rendent pas forcément compte. Mais les macronistes le savent. Les enseignants ont réussi, et eux seuls, à bloquer Jupiter.
Au point de bascule
Aujourd’hui, alors qu’Amélie Oudéa-Castéra entame sa mission ministérielle, les syndicats enseignants sont presque unanimes à écrire que « nous sommes à un point de bascule pour l’Ecole publique« . Sud, Unsa, Fsu, Sgen Cfdt et Cgt appellent ensemble à « une réponse forte qui passe par une action dans la durée« . Ils rejettent la politique présidentielle, jugée « passéiste et conservatrice« . Ils dénoncent « une école du tri social » marquée par la disparition du collège unique et l’affectation des jeunes élèves à des filières séparées. Ce tri social est particulièrement visible au collège et au lycée professionnel.
Particularité française
Alors que, chez nos voisins, la révolution libérale de l’Education a pu se mettre en place, la France résiste. C’est grâce aux enseignants. Mais leur action est possible par l’écho qu’elle rencontre dans la société. Dans un numéro de la Revue de Sèvres consacré à la privatisation de l’Ecole, Xavier Pons relevait cette spécificité française. » Les Français sont pour le libre choix de l’Ecole… Mais une fois mis devant le choix ils se posent des questions », écrivait-il. Parce que la privatisation menace les communs, encourage la fragmentation de la société, colporte des valeurs qui s’opposent aux valeurs collectives. A ce titre, le « nouveau pacte » et la transformation du collège sont une « révolution culturelle » dans la mesure où il attaque les bases de l’école publique.
Puisque nous atteignons le point de bascule, les Français peuvent encore s’opposer à ce projet et défendre leur école. Les enseignants ont besoin d’eux.
François Jarraud