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Une tablette conçue avec les profs : la tablette TED en Saône et Loire 

Le pari du projet e-éducation TED, Tablette pour une Education Digitale, peut sembler un peu fou en regard d'un marché numérique mondialisé : une tablette française, scolaire et développée en lien direct avec des équipes et des enseignants expérimentateurs, au coeur de la France, en Sâone et Loire ! Et pourtant le rassemblement, le jeudi 12 juin, des acteurs impliqués dans ce projet dans le lieu magnifique de Dompierre les Ormes, la Galerie Européenne de la Forêt et du Bois a été l'occasion de vérifier si ce projet était aussi fou que cela !

 

Cinq enseignants, parmi 70 de ceux qui chaque mois s'essaient à utiliser la tablette dans leur classe, ont témoigné de leur pratique, avec ses forces, ses limites, ses essais et ses erreurs. Ce partage d'expérience a eu lieu dans le cadre d'une journée bilan à l'issue d'une première année complète d'expérimentation qui a vu 2 établissements engagés dès mars 2013 être rejoint par d'autres en septembre puis en janvier, regroupant désormais 16 établissements impliqués dans cette démarche. Car il ne s'agit pas simplement de distribuer des tablettes pour voir ce que ça fait, mais bien d'essayer de concevoir, avecles enseignants, les élèves, un envrionnement pédagogique d'apprentissage qui s'appuie sur une tablette, des manuels, des logiciels et un système de pilotage (MDM - MPM, appelé Manager) qui permet aux enseignants de mener leur classe comme ils le souhaitent.

 

Car c'est l'une des originalités du projet que d'avoir ajouté à la tablette, outre des manuels scolaires embarqués (Nathan Bordas, le Robert) et des logiciels choisis (sous linux, Unowhy, Logosapience), un système de pilotage pédagogique, sous la forme d'un logiciel que chaque enseignant a à sa disposition pour élaborer ses séances et séquences d'enseignement, les transférer aux tablettes des élèves et en récupérer les "fruits", les productions, les travaux des élèves. Une autre caractéristique du projet est d'associer dans l'ensemble du processus, collectivité territoriale (CG Sâone et Loire), Rectorat (Dijon), Canopé (Macon, Dijon), et équipe de recherche (Laboratoire Techne, université de Poitiers).

 

La journée du 12 juin a été conçue en deux temps : un bilan du consortium qui pilote le projet, un bilan des enseignants qui utilisent cette tablette dans les classes.

 

Le bilan du consortium TED

 

La première partie de la journée a permis aux politiques (Rémi Chaintron président du Conseil Général de Saône et Loire), au Recteur d'Académie (M Rolland) ainsi qu'aux entreprises partie prenantes du projet (Unowhy, Sejer, Logosapience) de rappeler leur engagement fort dans le projet. Marco Lopinto, pour la société Unowhy, pilote du projet a mis en perspective la journée, permettant à chacun de se situer : le Conseil Général a rappelé avec vigueur, le choix et la volonté de parvenir à des résultats qui servent les jeunes des collèges concernés, dans l'espoir d'un éventuel élargissement dans les années à venir. Le recteur de l'académie a été extrêmement vif sur les engagements voulus par l'Etat en matière non seulement de numérique mais aussi de pédagogie (approche par compétences) et d'accès de tous au savoir (socle commun, école du socle).

 

Le laboratoire Techné a présenté les résultats intermédiaires de l'expérimentation. Il apparaît que les usages se stabilisent et qu'en moyenne 70 enseignants (sur 400, dans 16 établissements) utilisent régulièrement (entre 3 et 5 fois par mois) la tablette dans les séances d'enseignement. Ce qui est surtout intéressant dans les observations que mène le laboratoire concerne les modalités pédagogiques pertinentes d'usage d'une tablette en classe. Out il individuel, la tablette facilite grandement la différenciation pédagogique. Alors que dans une classe traditionnelle, la présence de la tablette est plutôt difficile à gérer, dès lors que le travail s'effectue seul, ou en petit groupe, alors elle devient un précieux auxiliaire de l'élève, pour son parcours d'apprentissage et pour l'enseignant qui peut alors avoir une relation plus personnalisée avec les élèves. Enfin l'analyse des pratiques des élèves qui emmènent la tablette cehz eux montre qu'il y a très peu de pratiques d'apprentissage scolaire à domicile (peu de prescription des enseignants), mais que par contre les principales utilisations concernent Internet(pourtant limité par une liste blanche) et les manuels scolaires intégrés dans la tablette.

 

La matinée à permis à la société Unowhy de présenter les prototypes de la tablette qui va succéder progressivement à celles testées au cours de cette première année.  Passant de Linux à Android, la société a aussi estimé qu'il fallait proposer un produit suffisamment haut de gamme pour répondre aux exigences pédagogiques. La mise en place d'un stylet précis permettra aussi de faciliter les activités nécessitant un tracé de lignes (schéma, croquis) ou un repérage de de points (Geogébra). Cette présentation a permis de faire prendre conscience à la centaine de personnes présentes la prise en compte de l'expérience, parfois difficile vécue, la nécessité d'améliorer le produitn mais aussi la volonté de prendre en compte les retours utilisateurs.

 

Les enseignants partagent leur expérience.

 

Outre la participation des enseignants à la conception de la tablette au travers de leurs essais, la journée a été l'occasion de faire un véritable partage des pratiques en classe. Même s'il est toujours frustrant de s'en tenir à 6 témoignages, il faut reconnaître, comme l'ont rapporté certains participants, que ces temps d'échange de pratique sont encore trop rares. Il faut aussi ajouter que l'absence d'une partie des responsables venus le matin, pris par leurs activités, a été un peu décevante, tant la qualité des présentations aurait pu leur permettre d'en tirer de nombreuses informations et enseignements pour la suite de leurs projets dans le domaine de l'éducation.

 

La variété et la richesse des pratiques présentées permet d'envisager de nombreux développements possibles. De l'usage en classe, individuel à l'usage collectif ou encore l'usage en voyage, la tablette s'avère un compagnon précieux pour enrichir le travail des apprentissages scolaires. En classe, à l'extérieur, à la maison, les possibilités sont grandes, encore faut-il les exploiter. Les activités présentées sont les suivantes :

 - Travail de lecture analytique en cours de français, passer de la perception à la compréhension, rendre compte par la trace écrite du travail réalisé, individuellement puis collectivement par vidéo projection des écrans des tablettes

 - Compléter une carte et une fiche de renseignement, réaliser une schématisation par rapport à un paysage, réaliser la notice de présentation muséale d'un objet ancien, sont trois activités qui, en histoire et géographie permettent de travailler la complexité

 - Développer la compréhension des médias et de l'information à l'aide d'exercices structurés autour d'un itinéraire de recherche documentaire, accéder à des ressources numériques en ligne pour améliorer l'approche du conte, travailler l'histoire des arts en utilisant les possibilités d'enregistrement oral, de recherche documentaire, de production de documents, voilà, quelques pistes de travail qui en documentation permette le développement des compétences spécifiques et transversales en lien avec les autres disciplines

 - En langue, la tablette est aussi bien un outil de reportage (prise de vue, commentaires, interview), qu'un outil d'entrainement (améliorer son accent, la précision de la phrase), ou encore un outil d'approfondissement des compétences de compréhension et d'expression orale.

 - En mathématique, c'est un jeu sérieux basé sur une énigme qui va guider les élèves. Conçu par l'enseignant, ce jeu permet, sur la base d'un code à décrypter, aux élèves d'effectuer un parcours qui va développer aussi bien les compétences de repérages dans le plan, que de mise en correspondance d'informations de natures différentes.

 

 Les enseignants qui ont présenté leur travail, Séverine Tailhandier en français, Elise Jack en anglais, Alexis Pelte et Delphine Bornard en documentation, Gaelle Charcosset en histoire géographie ainsi que Michael Ciosmak en mathématique, (Collège Jean Vilar, Chalon sur Saône, collège les Chênes rouges à Saint Germain du Plain, collège les Bruyères, la Clayette) ont su faire preuve de concision dans leur propos, mais aussi de lucidité sur les difficultés rencontrées. Il est vrai que trop souvent les critiques portent sur les problèmes posés par la technologie. Dans le cas de cette expérimentation, les enseignants qui ont persévéré ont pu montrer que dépasser ces problèmes n'est pas les ignorer, mais trouver des solutions pour permettre les apprentissages dans les meilleures conditions possibles.

 

 En conclusion de cette journée, c'est la suite du projet qui a concentré l'attention. Les chefs d'établissement présents, eux aussi lucides et volontaires, ont insisté sur la nécessaire amélioration technologique. Si des phases de découragement ont pu traverser certaines équipes, la plupart d'entre elles souhaitent pouvoir faire fructifier l'investissement dans les années à venir, tant il a été unanime d'en observer l'intérêt pour les élèves, en particulier pour différencier les pratiques. Les enseignements de cette expérimentation sont encore à développer aussi bien par le laboratoire Techné, que par les équipes elles-mêmes qui sont activement participantes non seulement à l'utilisation des tablettes, mais aussi aux différentes demandes des chercheurs (questionnaires, observations, focus group etc.). Une journée comme celle-là est essentielle pour faire un bilan et pour tirer les enseignements de ce qui s'est passé, avant d'aller plus loin. La démarche "itérative" de développement d'un tel produit n'est pas simple, il faut saluer les 16 établissements qui ont eu l'audace de s'y engager.

 

Bruno Devauchelle

 

En novembre 2013

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2013/11/26112013Article63[...]



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Par fjarraud , le samedi 28 juin 2014.

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