Par Virginie Mège

Les enseignants sont conscients que l'apprentissage ne se limite pas à leur salle de cours. Les enfants -et souvent plus encore les parents- sont demandeurs d'« accompagnement scolaire ». Ce phénomène ne cesse de se développer et a d'ailleurs déjà fait l'objet d'un Dossier du Café (n°87). Mais lorsque c'est une Bibliothèque Municipale d'une grande ville comme Lyon qui propose un nouveau service de soutien scolaire en ligne, gratuit et avec Paraschool, l'événement ne peut qu'éveiller notre curiosité. Que signifie précisément cette démarche ? Comment s'organise-t-elle et dans quel esprit ?

Zoom sur un nouveau projet lyonnais

Pour en savoir plus, nous avons testé ce nouveau service puis contacté la Bibliothèque de Lyon. Lors d'un entretien du 29 avril, Sandrine Chomel-Isaac (Responsable Marketing), Anne-Marie Rouge (Responsable du Département Espaces numériques) et Marie-Anne Dagoneau (Animatrice espace numérique) ont aimablement accepté de nous recevoir et de répondre à nos questions.

Une démarche prudente et réfléchie

Tout d'abord, et nos interlocutrices ont bien insisté sur ce point, il faut préciser que « le projet démarre et n'a que deux mois d'existence. On n'en est qu'au stade expérimental. Il s'agit pour l'instant d'une phase de test». Les flyers imprimés ainsi que les mails adressés aux lecteurs précisent donc que c'est un « service en test jusqu'à novembre 2008 ». « C'est pourquoi nous n'avons pas contacté les établissements scolaires ni les professeurs » explique Sandrine Chomel-Isaac. « Je souhaite faire un premier bilan fin juin avant la coupure des vacances, avec les élèves et les parents, et même associer des professeurs en organisant des groupes de discussion. Tous les avis nous intéressent pour faire un retour à Paraschool et voir ce qu'on fera après la phase-test. D'autant que les gens nous font confiance. C'est une question de crédibilité ».

La Responsable Marketing précise aussi que « la Bibliothèque s'interroge sur sa légitimité sur ce territoire-là, de soutien scolaire. C'est une question qu'on se pose et qu'on se pose en permanence ». Et Anne-Marie Rouge précise : « Toutefois les bibliothécaires ont toujours occupé un rôle éducatif. Le lien a toujours été très fort entre bibliothèque et école. Regardez la présence des CDI dans les collèges ».

Les enseignants de français ne viendront pas la contredire. Nous invitons en effet nos élèves à lire, à fréquenter les bibliothèques et à mieux s'approprier non seulement l'objet-livre mais aussi toute une culture littéraire et générale. « L'idée est aussi de fidéliser le lien avec le public, de le densifier et d'éveiller le goût de la culture, de la curiosité » souligne la Responsable Marketing. « Nous cherchons toujours à étendre notre palette d'offres ». On pense alors à l'exposition en cours sur l'illustrateur Tomi Ungerer, à l'Artothèque, au Guichet du Savoir, aux Points d'actu et à Cap'culture santé... qui ont déjà effectivement enrichi cette palette.

Internet à disposition de tous

L'élève s'inscrit en ligne via la Bibliothèque et a accès aux cours de Paraschool (en choisissant son niveau de classe, la matière qu'il souhaite travailler, ces options étant modulables et non limitées). Pour ceux qui n'ont pas d'accès Internet à domicile, il existe les espaces numériques. A Lyon, sur l'ensemble des 15 bibliothèques municipales réparties sur les 9 arrondissements de la ville et organisées en réseau, plus de 80 postes sont ainsi disponibles au public pour l'autoformation (notamment pour les adultes) et ce service de soutien scolaire (pour tous).

En ce qui concerne Paraschool, le choix de cette société privée résulte d'une opportunité. « La Bibliothèque de Lyon travaille en partenariat avec la Ville de Lyon et Microsoft. La formation des animateurs est prise en charge et une appropriation de Paraschool nous a été proposée pendant un an. » Selon M-A Dagoneau, « Paraschool travaille déjà avec de nombreux organismes mais c'est la première fois qu'ils travaillent avec une Bibliothèque de France ».

Cliquer, ça peut plaire !

L'idée d'un développement d'e-learning s'affirme. Nos interlocutrices croient en l'avenir du Web et aux avantages qu'offre un soutien en ligne. Leurs préoccupations sont celles des professeurs, en quête d'outils attrayants et efficaces. On rejoint ici le thème général donné à ce présent Mensuel du Café Pédagogique, à savoir le jeu. « Cliquer, ça peut plaire. Il y a un côté ludique qui peut être motivant » constate A-M Rouge. « La motivation fait beaucoup. Il y a une interaction affective avec l'ordinateur. Mais bien sûr, cela ne fait pas de miracle... »

On peut se questionner sur le moyen proposé car les consignes sont données par écrit. Or les professeurs de français savent bien qu'elles constituent une des difficultés majeures pour les élèves (voir à ce sujet l'article d'Adeline Sontot dans le Mensuel précédent du Café). Selon Sandrine Chomel-Isaac, « bizarrement les élèves arrivent à lire des consignes écrites quand elles sont sur écran ». Il est vrai qu'on peut facilement tâtonner, mieux que sur le papier. « Et la navigation ne pose pas de problème aux enfants. Ils sont à l'aise. Cliquer est pour eux inné. »

D'autre part, plus de 80 % des inscrits fréquentent déjà la bibliothèque. Ce taux s'explique par le choix d'une communication limitée mais on devine le profil de ces enfants studieux. Marie-Anne Dagoneau le confirme : « On voit souvent arriver à l'espace numérique des élèves sérieux, déjà bons en classe. Ils veulent vite s'inscrire pour être encore meilleurs ».

Créer des conditions d'apprentissage

Précisons ici que la Bibliothèque de Lyon proposait déjà un soutien scolaire traditionnel le mercredi, avec rencontre de volontaires d'une association (SPES) et d'élèves en difficulté. « Ce soutien n'est pas remis en cause pour l'instant. Mais il s'effectue seulement dans le Département Jeunesse et ne s'adresse qu'aux enfants. Alors que le soutien en ligne s'adresse au plus grand nombre et en plus n'en est qu'à sa phase test » explique la Responsable Marketing.

C'est un nouvel outil, pour tous. « Certains parents sont dépassés. Mais ils créent des conditions d'apprentissage pour leurs enfants et offrent le support en les inscrivant. C'est important ». Marie-Anne Dagoneau donne ainsi l'exemple d'une mère qui vient avec sa fille dans l'espace numérique. « Pendant que la mère se forme à l'informatique, la fille travaille ses cours de CE2. Et c'est à nous que la petite s'adresse en cas de problème... Il y a aussi cette autre maman qui a inscrit son fils au soutien. Mais c'est elle qui l'utilise pour se remettre à niveau tandis que son fils fait des jeux ! ». Sur l'ensemble, les inscrits se répartissent à peu près en un tiers d'écoliers, un tiers de collégiens et un tiers de post-collège.

En tant que professeur de français, nous avons testé ce soutien en ligne. Le produit offre des propositions intéressantes et peut être signalé à des élèves motivés par ce type de support. Il y aurait à redire sur les exercices proposés, tant sur la forme que sur le fond, mais notre souci était ici seulement de comprendre la démarche menée par la Bibliothèque de Lyon.

Le projet est lancé, nous sommes curieux de voir comment il va évoluer. Nous reprendrons bien entendu contact avec nos interlocutrices pour connaître les résultats du premier bilan...

En savoir plus...

Le site de la Bibliothèque municipale de Lyon

http://www.bm-lyon.fr/

Inscription au soutien en ligne

http://www.bm-lyon.fr/pratique/paraschool/paraschool.php

Accompagnement scolaire : Dossier n° 87 paru dans le Café Pédagogique en novembre 2007

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2007/87_accomp_index.aspx

Lire, comprendre et interpréter une consigne : Article d'Adeline Sontot paru dans le Café Pédagogique pour le mensuel d'avril 2008.

http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/lenseignant/lettres/francais/Pages/2008/92_Lirecomprendreuneconsigne.aspx