Est-ce la fin de l'éducation prioritaire ? 

Par François Jarraud




Samedi 21 mai, l'Observatoire des Zones Prioritaires (OZP) faisait le point sur l'évolution de l'éducation prioritaire. Avec la généralisation du dispositif ECLAIR que reste-il de la promesse du droit à l'éducation des plus défavorisés ?


20e année de l’OZP… Certes, ça se fête. Mais l’esprit de la journée n’était pas précisément à la fête, étant donnée l’actualité de l’Education Prioritaire, désormais interdite de terminologie officielle dans les circulaires et les discours publics. Durant la journée, le malaise des acteurs fut palpable. Et pourtant, l’OZP se démène, anime un site internet remarquable, multiplie les interventions et les expertises dans les territoires, avec ses partenaires et les pouvoirs publics.


Premier constat de cette Journée : le creusement des inégalités scolaires liée à la montée de la ségrégation sociale dans les établissements du fait de la suppression de la carte scolaire. "Pour résumer, les politiques publiques défaillantes et les contextes de concurrence finissent par renforcer l’échec et les inégalités, du fait des perturbations pédagogiques successives qui stigmatisent les « mauvais » établissements, et renforcent chez les personnels le sentiment de ne plus pouvoir agir, d’être seuls face à une tâche immense, avec des risques de fuite des enseignants comme des familles. Les apprentissages deviennent de plus en plus difficiles, et les inégalités en sortent renforcées » synthétise S. Broccholichi.


Pour Françoise Lorcerie, la ségrégation est devenue ethnique. " Il  faut oser dire que c’est la ségrégation ethnique qui s’accroit, davantage de la ségrégation sociale : quand les populations africaines deviennent relativement importantes, les quartiers deviennent évités par les populations blanches ». Ainsi, des statistiques de la DEPP, elle tire le chiffre « incroyablement élevé » d’un tiers de garçons issus de l’immigration africaine sortant de l’école, sans diplôme, pour 9% des filles de la même origine", écrit-elle.


On assiste à une vraie mutation avouée du réseau prioritaire. Pour Jean-Claude Emin, "on n’est pas loin de revenir à la période où on résonnait à partir des dons. L’usage irraisonné du mot « talents » dans les textes officiels, le centrage sur les évaluations-bilans en lieu et place des diagnostics, le passage de « l’école pour tous » à « une école pour chacun » sert de fond à une politique individualisante, visant à la fois à exfiltrer les « bons élèves » des zones difficiles et à enfermer les déviants et les pauvres".

Lisez le dossier du Café

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2011/2011_ozp01.aspx



Trop de dispositifs tue le dispositif


L'OZP démontre l'incohérence dans laquelle est amené l'enseignement prioritaire simplement en listant les différents dispositifs. Quels lycées appartiennent aux réseaux ECLAIR ? Est-ce les mêmes pour les RAR ? Cela se recoupe-t-il avec les "Sites d'excellence en lycée" ? Avec les DERS ? Avec les établissements du plan Espoir Banlieue ? Poser la question c'est avoir la réponse. Si on prend les trois dispositifs du plan Banlieues, "le taux de recouvrement est très faible" : seulement 13%. La plan Banlieues a peu pris en compte les anciesn ZEP  puisque les 2/3 des ZEP n'appartiennent à aucun autre dispositif. En dehors des zep, affirme l'OZP, "76% des établissements n'appartiennent qu'à un seul dispositif" : le taux de recouvrement est faible.


"L’ensemble donne plutôt l’impression d’une accumulation successive de listes au gré des aléas politiques (l’exemple de l’historique de DERS est significatif, celui d’Eclair également), des variations d’orientation des deux ministères concernés et des effets d’annonce", écrit l'OZP. "Deux faits sont cependant notables : l’imagination dont font preuve depuis quelques années les administrations ministérielles pour créer et empiler de nouvelles catégories.... A contrario la perplexité du public ou des enseignants et même des chefs d’établissement devant une telle accumulation de mesures, classifications, dispositifs, programmes, labels et listes prioritaires". L'enseignement prioritaire a été tellement éclaté qu'il devient invisible.

Etude sur les lycées

http://www.association-ozp.net/spip.php?article10223

Et les collèges

http://www.association-ozp.net/spip.php?article10218



CLAIRement non, disent les syndicats


Une intersyndicale appelle au refus du dispositif ECLAIR et le retour à l'éducation prioritaire.


"Le programme ECLAIR représente à la fois un recentrage de l’éducation prioritaire sur un nombre limité d’établissements à partir de critères discutables et un dévoiement majeur du principe fondateur de " donner plus à ceux qui ont le moins", écrivent les syndicats FSU (Snes, Snuipp, Snuep), le Se-Unsa, le Snalc, le Sncl, le Snetaa, la Cgt et Sud, c'est à dire la quasi totalité des organisations syndicales, sauf le Sgen. "Instrumentalisant le « droit à l’expérimentation » ouvert par l’article 34 de la loi Fillon, il vise à transformer ces établissements désignés autoritairement en laboratoires de déréglementations tous azimuts qui risquent d’être ensuite généralisées à l’ensemble du système éducatif". Les signataires citent par exemple le choix des enseignants par le chef d'établissement, la création de préfet des études.


"Les signataires demandent l’abandon du programme (E)CLAIR",continue la pétition. "Ils exigent une véritable relance de l’éducation prioritaire, avec des critères nationaux et transparents pour définir la liste des établissements et des écoles qui en relèvent, la volonté politique d’y améliorer à la fois les conditions d’étude des élèves et les conditions de travail des personnels".

L apétition

http://www.clairementnon.org/

Journée OZZP : Est-ce la fin de l'éducation prioritaire ?

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2011/05/24052011Accueil.aspx



Sur le site du Café

Par fjarraud , le samedi 28 mai 2011.

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