EquiTables : Changer le lycée passe aussi par la cantine 

Avec EquiTables, la région Ile-de-France veut remplir la première condition pour être élève : manger à sa faim. En unifiant et revisitant les tarifs, le programme EquiTables permet d'offrir un vrai repas aux enfants des milieux populaires pour qui la restauration scolaire était trop chère. Il vise aussi l'éducation alimentaire et le bien être au lycée. Et il commence là où l'urgence est la plus grande : en Seine-Saint-Denis et dans le Val d'Oise.

 

A quoi reconnait-on si un établissement scolaire a une population favorisée ou défavorisée ? Au taux de fréquentation de la restauration scolaire. Plus un lycée a des enfants de milieu socialement favorisé, plus le restaurant scolaire est plein. Avant de fixer sa politique tarifaire, le conseil régional francilien a demandé à l'Institut d'aménagement et d'urbanisme d'Ile-de-France (IAURIF) une étude précise de la fréquentation des restaurants scolaires, des revenus des parents et de la composition sociale dans les différents départements. Le bilan est sans appel : on a deux fois plus de chance de déjeuner à la cantine quand on est fils de cadre que quand on est enfant d'ouvrier ou d'inactif. On a deux fois plus de chance de déjeuner au lycée quand on est en CPGE que quand on est en BTS. Deuxième caractéristique : les tarifs varient beaucoup d'un établissement à l'autre et amplifient encore souvent cet écart. C'est pour lutter contre ces réalités que le conseil régional francilien a pris deux décision. La première c'est d'imposer un tarif unique pour la restauration scolaire dans ses 472 lycées. La seconde de fixer la tarification à travers une grille unique, calculée avec l'IAURIF pour effectuer une véritable redistribution sociale.

 

 

 

Appliquée à la rentrée dans deux départements, la Seine Saint-Denis et le Val d'Oise, deux départements où les inégalités sont les plus criantes, la nouvelle politique régionale était présentée le 11 septembre au lycée Léo Lagrange de Bondy (93). Dans cette banlieue très populaire, le L.P. Léo Lagrange accueille 400 élèves dans des classes de bac pro tertiaire ainsi qu'une classe de décrocheurs. Ce petit lycée a été refait en 2012. Les locaux sont accueillants. Les élèves disposent d'un foyer et d'une salle d'étude en accès libre dotée de postes informatiques. Le lycée travaille sa réputation : 70% des élèves l'ont demandé pour cette rentrée , soit deux fois plus qu'il y a 2 ans. Trois élèves sur quatre ne résident pas dans la commune et sont donc susceptibles de déjeuner au lycée.

 

"L'idée que les enfants des milieux populaires ne puissent pas accéder à la restauration scolaire m'était intolérable", explique Henriette Zoughebi, vice présidente du conseil régional en charge des lycée. "Avec le tarif unique nous allons opérer une reconquête. Avec elle, la région redistribue du revenu aux familles populaires". Avec l'IAURIF, le conseil régional a défini une grille de 10 tarifs en fonction du revenu familial. Le prix du repas varie de 1,50 € à 4 €. Ce dernier prix correspond à des revenus supérieurs à 7500 € par mois. "80% des familles vont dépenser moins", assure H Zoughebi. Reste le cas des jeunes qui ne peuvent pas payer 1,50 €, une situation pas rare en Seine-Saint-Denis. "Je vais demander à N Vallaud-Belkacem, d'abonder le Fonds Social Lycéen pour qu'on puisse proposer la gratuité à ces jeunes", prévient-elle. Pour Yannick Trigance, conseiller régional et conseiller national à l'éducation du Partti Socialiste, la mesure du conseil régional "est une vraie décision de lutte contre les inégalités".

 

"Pour la mettre en application dans tous les départements de la région, nous engagerons 38 millions d'euros", explique Jean-Paul Huchon, président du Conseil régional. Une trentaine de millions subventionneront le déficit créé par la nouvelle tarification. 6 millions seront affectés à l'amélioration de la qualité des repas. Ainsi à Léo Lagrange, la cuisine commande une partie importante des produits alimentaires en circuit court auprès de producteurs locaux. La région doit aussi financer l'extension des restaurants et l'installation de bornes de réservation pour lutter contre le gaspillage alimentaire.

 

A Léo Lagrange, le restaurant scolaire gagne du terrain avec la nouvelle tarification. Malgré la présence de plusieurs marques de restauration rapide à deux pas du lycée, depuis la rentrée, le nombre de demi pensionnaires est passé de 185 à 240. Ce premier bilan réjouit le chef cuisinier. Il constate aussi que les élèves consomment davantage de viande, signe aussi que les élèves inscrits ont changé. La reconquête de la cantine est liée aussi au travail d'implantation locale que fait le lycée. Cantine, projet scolaire et bien être au lycée marchent la main dans la main. A la rentrée 2015, deux nouveaux départements, le 77 et le 94, bénéficieront de la tarification unique.

 

François Jarraud

 

Le programme EquiTables

L'étude de l'IAURIF

 

 

 

Par fjarraud , le lundi 15 septembre 2014.

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