L'éducation mobile, un moyen de dépasser la crise de l'école ? 

L'éducation mobile va-t-elle permettre d'alphabétiser le monde entier et rendre les sociétés humaines plus égalitaires et moins machistes ? C'est l'idée qui se dégage des nombreuses expériences présentées les 24 et 25 février à la Semaine de l'apprentissage mobile organisée par l'Unesco et UN Women à Paris. Le mobile apparait come un outil pour contourner les obstacles à l'instruction des jeunes et particulièrement à l'instruction des  filles. Le paradoxe c'est que cette capacité révolutionnaire est financée très souvent par des initiatives publiques. Mais suivons trois exemples...

 

Des nombreuses expériences présentées les 24 et 25 février à l'occasion de la Semaine de l'apprentissage mobile, trois projets mettent en évidence des tendances repérées  cette année.

 

Au Bangla Desh, le projet BRAC propose à des jeunes femmes d'apprendre l'anglais sur leur téléphone portable. La maitrise de l'anglais est indispensable pour les emplois publics et en général ceux des villes. Or l'accès à l'école reste inégalitaire dans un pays où les femmes sont souvent retenues par les travaux domestiques et connaissent des restrictions de circulation. Par contre le  pays dispose d'une bonne couverture de téléphone mobile. Dans cette situation le téléphone apparait comme un moyen d'apporter l'école à la maison à des femmes qui ont peu d'autonomie. C'est l'école quand on veut, quand on peut et chez soi et ce simple constat en soi est émancipateur.

 

Concrètement le projet propose 17 unités de 5 leçons utilisables sur un simple téléphone mobile pour un prix très bas puisque les leçons sont vendues à l'unité. La pédagogie est simple. Il s'agit de répéter des phrases types. Un système de reconnaissance vocale (IVR) permet d'évaluer et de recadrer. Après chaque leçon un quiz par SMS consolide les acquisitions. Le programme organise aussi des rencontres locales entre ses abonnées. Là il envoie du matériel plus ludique : jeux de rôle par exemple. En fin de formation les femmes reçoivent un diplôme du British Council. Car derrière ce programme on retrouve l'alliance mondiale GSM (le GSMA d'origine franco-allemande), un fournisseur local de téléphone , ROBI, l'ONG BRAC et le British Council.

 

Talking Stories est porté par Kathie Mc Cabe, une femme extrêmement engagée et convaincante, avec le soutien de l'éditeur Macmillan. En Afrique du Sud, elle a construit un parcours de 64 histoires de difficulté graduée pour apprendre à lire dans trois langues locales (dont l'anglais). Les histoires sont localisées. Elles sont accompagnées d'exercices simples avec reconnaissance vocale (IVR). Le projet est déjà installée dans 500 écoles sur des ordinateurs souvent très anciens. Talking Stories se porte maintenant sur tablettes et téléphones mobiles. Selon K Mc Cabe, le programme aurait un impact sur le niveau scolaire mesuré par rapport à un groupe témoin. Mais l'essentiel est ailleurs. Dans un pays où les clases sont surchargées, le programme est conçu pour pallier les insuffisances du système éducatif en utilisant des outils présents partout comme le téléphone personnel.

 

Le dernier exemple s'adresse prioritairement aux jeunes filles. Love Matters est installé en Inde, en Chine, en Egypte à travers des sites webs et des services de SMS. Love Matters parle d'un sujet tabou : la sexualité. Il répond à des questions simples. Par exemple en Inde sur la masturbation ou les violences sur les femmes. En hindi il n'y a pas de mot pour désigner la masturbation féminine. En Egypte, Love Matters a publié un simple dessin anatomique qui montrait un clitoris. Catarina Gomes, qui présente le projet à la semaine, explique que le téléphone portable est le seul moyen dont dispose les filles pour recevoir une information en toute discrétion ou poser une question personnelle. Ainsi Love Matters compte un million et demi de followers et 70% des consultations des sites se fait sur mobile. "L'internet mobile donne la possibilité de faire passer l'information au creux de la main", explique -t-elle.  Love Matters est en train de changer la société là aussi en contournant avec la technologie les obstacles. Or c'est un projet de la radio publique néerlandaise.

 

Ces trois projets montrent que le mobile peut être un moyen de faire bouger des sociétés. "Les outils sont dans les mains des personnes", explique K Mc Cabe. "On ne peut pas changer les systèmes éducatifs", dit-elle. "Mais on peut trouver d'autres chemins".  Mark Lamont, un australien, expert international très connu et fondateur de World Mosaic, a conçu le concept "d'apprentissage informel structuré". Ce nouveau mode d'apprentissage est en train de faire plus que remédier à la crise des systèmes éducatifs. Il est peut-être en train de les dépasser.

 

François Jarraud

 

Le projet BRAC

Projet sud africain

Love Matters Inde

 

Par fjarraud , le jeudi 26 février 2015.

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