Collège : Après la manifestation.... la publication des textes sur le collège 

Un pas de plus dans l'épreuve de force. Manuel Valls avait promis une publication rapide des textes sur la réforme du collège. Malgré la mobilisation le 19 mai d'une bonne partie des enseignants contre ce projet, le premier ministre passe outre. Le Journal Officiel du 20 mai publie le décret et l'arrêté portant organisation du collège. Le gouvernement marque ainsi sa fermeté face à des syndicats qui portaient hier des menaces sur l'organisation du brevet. 

 

Une forte participation à la grève

 

Le Journal officiel du 20 mars publie le décret et l'arrêté sur le collège dans les termes mêmes du Conseil supérieur de l'éducation du 10 avril. La publication vient juste après une journée de mobilisation importante des syndicats hostiles à la réforme. Le Snalc menaçait l'organisation du brevet. Le voici , avec le Snes , FO, la CGT et Sud , au pied du mur.

 

23% tous collèges confondus pour l'Education nationale, "plus de 50%" selon le Snes. Le taux de participation à la grève du 19 mai, lancée par le Snes, le Snalc, Fo, Sud et la Cgt, a été élevé dans tous les cas, et peut-être même majoritaire si l'on en croit les syndicats.

 

A Paris, 3 500 (police) à 10 000 enseignants (selon l'intersyndicale) ont manifesté derrière une banderole marquée "disciplines malmenées, savoirs dénaturés, inégalités renforcées". On comptait principalement des professeurs du second degré avec un fort  pourcentage de professeurs de lettres. Des enseignants du premier degré du 93 ont aussi participé au cortège  sur des mots d'ordre spécifiques. Le cortège réunissait des syndicats ayant des positions différentes sur la réforme. Le Snes demandait la reprise des négociations sur le décret et l'arrêté. Le Snalc voulait le retrait du texte. A Paris, SOS Education a réussi à pénétrer le cortège. Cette association organise une communication sur l’École sur des bases extrêmement réactionnaires. D'autres cortèges ont eu lieu à Rennes, Nantes, Toulouse, Clermont-Ferrand (500 personnes), Bordeaux (un millier), Lyon (2000).

 

Ce que nous ont dit les profs

 

Aurélie Philippe, une jeune professeure de lettres classiques dans un collège de Villebon-sur-Yvette croisée dans le cortège parisien, craint "un collège à la carte". Pour elle, "il faut des contenus précis, un ordre chronologique. Quand on mélange tout (allusion aux EPI, enseignements pluridisciplinaires) je ne suis pas sûre que les enfants s'y retrouvent". Elle craint moins d'heures de français et la montée des inégalités entre collèges. "On n'étudiera pas la même chose dans chaque collège". Un peu plus loin, Charlotte Bré, professeure de lettres à Conflans Sainte-Honorine, demande plus d'heures pour le français et les maths."Avec les EPI et l'accompagnement personnalisé l'horaire des fondamentaux sera diminué", dit-elle. Selon elle, son collège perd à la rentrée 2015 les heures d'accompagnement qui servent à l'aide aux devoirs et à l'ouverture culturelle. Seuls les collèges Rep les garderaient.

 

Le Snalc annonce la grève durant le brevet

 

Dans le cortège, François Portzer, président du Snalc se réjouissait de la forte mobilisation. "C'est au moins la majorité des professeurs de collège", nous a-t-il dit. "On ira jusqu'au bout. On va déposer un préavis de grève pour les 25 et 26 juin, jours des épreuves du brevet". Frédérique Rolet, secrétaire générale du Snes, n'allait pas aussi loin. "Il y a une vraie émotion de la profession que la ministre doit écouter", nous dit-elle. "Le premier ministre doit se dire que le gouvernement prendrait un risque à persister dans un projet contesté. Des enseignants menacent d'une grève du zèle ou d'occupation des locaux pendant le brevet. Nous prendrons l'avis de la profession".

 

Dans une lettre ouverte à la ministre, les deux secrétaires généraux du Snes demandaient un débat "sur l’articulation des enseignements disciplinaires avec les formes de l’interdisciplinarité, sur ce que doit recouvrir l’expression « marges de manœuvre des établissements », sur les conditions d’étude des élèves et la notion « d’accompagnement », sur les conditions de travail et de formation des personnels, sur les moyens pour développer le travail collectif". En conclusion, le Snes demandait le retrait du projet.

 

Du côté des partisans de la réforme

 

Les partisans de la réforme marquaient leur satisfaction devant le taux de participation donné par le ministère. "Ce n'est pas la mobilisation annoncée", nous disait Paul Raoult, président de la Fcpe. "On peut comprendre que des enseignants n'ont pas voulu se faire instrumentaliser quand on voit le Front national et certains syndicats faire "même combat". Ça veut dire qu'une large majorité des enseignants ne sont pas opposés à la réforme. Maintenant il est temps non plus de discuter mais de voir comment la mettre en oeuvre".

 

L'Unsa Education évoquait "la faible mobilisation des opposants à la réforme... Il est grand temps que tout le monde se mobilise pour préparer la rentrée 2016". Le Sgen saluait aussi "une faible participation" à la grève  et demandait à la ministre "le soutien nécessaire à la préparation de la rentrée 2016", date de mise en place de la réforme.

 

 

Valls et Vallaud-Belkacem jouent la fermeté

 

Dans la même après-midi, M Valls annonçait la publication du décret "le plus rapidement possible". N Vallaud Belkacem affirmait elle aussi une grande fermeté sur cette réforme. "La réforme se fera car elle est indispensable pour la réussite de chaque enfant... La communauté éducative a adopté cette réforme à une forte majorité (allusion au vote du Conseil supérieur de l'éducation du 10 avril). Elle répond aux besoins... Il y aura de la formation (pour les enseignants). Aucun établissement ne sera laissé démuni". Déjà les presses du Journal officiel tournaient et imprimaient le décret sur la réforme du collège...

 

 

 

François Jarraud

 

Le décret

L'arrêté

Les projets de décret et arrêté publiés le 20 avril

 

 

Par fjarraud , le mercredi 20 mai 2015.

Commentaires

  • classeunique, le 13/10/2015 à 19:12
    Pas de réforme possible tant que la finalité du système éducatif n'aura pas été débattue et clairement définie : http://blogs.mediapart.fr/blog/bernard-collot/131015/pas-de-reforme-possible-tant-que-la-finalite-du-systeme-educatif-ne-sera-pas-debattue-et-clairem
  • Polovergnat, le 20/05/2015 à 11:25

    Un seul mot : BRAVO !
    et quelques explications...

    La fin de la foire ayant été décrétée, nous allons maintenant pouvoir compter les bouses, les bouses de droite, les bouses de gauche, les bouses à la Bayrou, les bouses syndicales, les bouses corporatistes, en même temps que les maquignons de l'élitisme scolaire institutionnel, appuyé sur une sélection sociale et héréditaire au guichet d'entrée vont, les uns après les autres, venir nous rechanter la messe éducative en latin et grec, voire même en allemand. Et crier haro sur le Belkacem.

    Certes je ne suis pas une Lumière, mais pour ceux qui pourraient suspecter chez moi une inconsistance en approche des Humanités, bien que né tout près de la bouse angevine, la vraie, mon soutien enthousiaste à la réforme m'est dicté par mes 6 ans de Latin, qui malgré les 500 km qui m'en séparaient, m'ont donné de rencontrer Vercingétorix, César et l'oppidum de Gergovia bien avant de devenir Auvergnat.

    Petit détail supplémentaire pour les jeunes générations, ce parcours initiatique à la culture n'était alors proposé qu'à environ 3% des collégiens du milieu rural dont je suis issu (je ne parle pas du latin de la messe dominicale, évidemment, proposé lui à 100%, collégiens ou pas de ce terreau particulièrement marqué), puisqu'environ 1% seulement accédait au collège, et parmi ceux-ci 3% aux langues dites mortes. Les spécialistes affineront ces chiffres.

    Dites-moi donc à qui cela est-il réservé et proposé aujourd'hui, 50 ans plus tard ? Et sortez-moi un camembert par catégories socio-professionnelles, SVP ? J'ai bien peur que Todd, amoureux des cartes et des camemberts, puisse les superposer à ceux de la représentation nationale...

    Bien qu'ayant fait partie de ceux qui avaient sans le faire exprès tiré un ticket gagnant, j'ai personnellement vécu cette ségrégation comme une injustice sociale pour les 97% restants et c'est dans l'injustice de cette approche ségrégative que je puise mon soutien inconditionnel à ce rééquilibrage et à la volonté d'élargissement de la base, en dépit des cris d'orfraie et de vieilles chouettes finissantes qui ululent même en plein jour.

    Plutôt que de réserver 6 ans de latin ou grec à 5% des élèves, je préfère de loin que l'on permette à 70 ou 80% d'entre eux d'approcher pendant 2 ou 3 ans ces racines linguistiques qui vont leur permettre de voir la vie avec une autre paire de lunettes. Et ne vous inquiétez pas pour ceux qui prendront le virus et auront envie d'approfondir : ils trouveront bien les moyens de le faire. Les enfants qu'on éveille sont capables, le temps venu, de faire des choix, et notre devoir d'adultes, parents, enseignants et politiques, est de les éclairer en leur donnant les moyens d'ouvrir leurs choix : si vous en avez, regardez les vôtres, si vous en doutez.

    Le latin n'est qu'un exemple qui pour moi illustre bien tout le sens de l'ensemble de cette réforme, mais il y a école et Ecole et il faut savoir laquelle on veut. 
    Il est du rôle et du devoir de la ministre de l'Education de dépasser la somme des intérêts individuels pour nous entraîner dans un projet porté par l'intérêt général des générations futures.

    Ceci ne veut pas pour autant dire que tous les corporatismes et les conservatismes à vue courte ne vont pas la faire échouer, mais je continuerai toujours à préférer ceux qui comme elle, défendent avec panache les fondamentaux de l'accès à la culture et au savoir. Et décident en conséquence.

    Gouverner, c'est choisir. 
    A la différence de certains autres partis de gauche,la ministre, comme son prédécesseur Vincent Peillon et à la différence de Benoît Hamon le fugitif, sait le faire et ose prendre des risques sur l'avenir. Ce choix courageux me va donc très bien. 
    Je trouve même qu'il a de la gueule et espère que les enseignants vont s'en emparer pour lui apporter le succès qu'il mérite.

    Alors, à vous les studios, à vous Cognacq-Jay...

    Note de bas de page : ancien parent d'élèves FCPE, père de 5 enfants... de 41, 38, 35, 30 et 30 ans.

     
    • Delafontorse, le 21/05/2015 à 00:24
      En matière de bouse, qui plus est creuse, la vôtre s'étale avec générosité. Renseignez-vous sur le latin qui sera rescapé après le passage attilesque de la réforme de madame Belkacem : du vernis qui ne dépassera pas ce que vous trouvez déjà dans Astérix ou Alix, et certes pas de l'apprentissage de la langue latine. Les langues à déclinaison, ça exige l'apprentissage de la grammaire et la pratique mentale de la catégorisation, sans parler de celle de la traduction, c'est donc trop dur pour les fils du peuple; ainsi l'ont décidé en accord avec l'OCDE, le cabinet Mc Kinsey, PISA et TAFTA, madame Belkacem et monsieur Vallshollande (pourtant adeptes de la langue de bois). Donc, aucun risque pour l'avenir : les fils du peuple ne seront pas en mesure de faire l'analyse linguistique des propos d'Attila. 
  • maria1958, le 20/05/2015 à 08:19
    C'est un détail, mais qui fait tiquer quand même: nul n'est besoin de rapporter au conditionnel les propos de la prof de Conflans Sainte Honorine: "Selon elle, son collège perd à la rentrée 2015 les heures d'accompagnement qui servent à 'aide aux devoirs et à l'ouverture culturelle. Seuls les collèges Rep les garderaient."

    Parce que cette suppression est avérée, il y a même un communiqué remontant à janvier qui en parle
    http://www.fcpe.asso.fr/index.php/actualites/item/1341-la-fcpe-s-oppose-a-la-suppression-de-l-accompagnement-educatif

    Donc on nous promet moult accompagnement des élèves pour 2016, mais dans l'immédiat ce qui existe est dézingué pour récupérer des crédits ( l'efficacité de cet accompagnement éducatif se discute, OK, mais quand même ça fait désordre ?).

    Que voulez-vous, c'est ce genre de réalités prosaïques qui jettent comme un doute sur les assurances de la Ministre selon laquelle "Aucun établissement ne sera laissé démuni" dans sa réforme du collège.

    La dernière fois que quelqu'un nous a juré, la main sur le coeur, qu'"aucun réseau n'y perdra", c'était  Vincent Peillon, en janvier 2014, à propos de la refonte de l'Education Prioritaire....

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