La chronique de Véronique Soulé : Le ministre lettré et la ministre appliquée 

Que vaut-il mieux : un ministre lettré ou une ministre appliquée ? La question a surgi dans l'actualité. Penchons-nous sur cette grave question, toute ressemblance avec des personnages existants est plus ou moins fortuite...

 

Le ministre lettré fascine

 

 Un ministre lettré fait de beaux discours. Sans effort apparent, il cite de grands auteurs fort à propos. Eduqué, le lettré le fait avec délicatesse, sans étalage. Il ne voudrait pas écraser l'assistance de sa superbe, juste faire usage de son savoir. Tout un art.

 

Le ministre lettré fascine souvent l'assistance. Et cela se comprend aisément. Il semble aussi souvent se fasciner lui-même, emporté qu'il est par la volupté de parler et par le plaisir de s'entendre.

 

Souvenons-nous: l'homme est vaniteux et le ministre lettré, à sa façon, en fournit la démonstration.

 

L'appliquée n'est pas sotte...

 

Face à ce ministre lettré, que peut la ministre appliquée ? Il serait vain de songer à rivaliser, pense la fine mouche. Et reconnaissons-le sans méchanceté aucune: son verbe à elle dispense un certain ennui et ne s'envole guère. 

 

Mais l'appliquée n'est pas sotte et pratique un art tout autre: celui de faire, de réaliser. Alors que le lettré développe de grandes visions d'avenir, l'appliquée est modeste, tout occupée à ce que les choses aillent mieux.

 

Mais ne nous y trompons pas. Elle aussi nourrit des ambitions. C'est là que nos deux  amis se retrouvent : l'appliquée  et le lettré rêvent de laisser une marque, aussi petite soit-elle, dans l'histoire.

 

Nous l'avons vu: l'appliquée ne fascine pas. Toutefois, par sa ténacité, son travail, sa volonté de servir celui qui l'a nommée, elle finit par percer. Et ceux qui, au début, la regardaient de haut rabattent leurs moqueries. 

 

Le lettré n'a pas la constance de l'appliquée. Confronté à l'obstacle, il se bat tel un preu chevalier, portant haut ses idées. Mais il n'est pas Don Quichotte. Il se lasse et part se réfugier dans ce qu'il chérit profondément: l'écriture et la hauteur de vues.

 

Tentons maintenant une morale de l'histoire.

 

Que peut le lettré sans l'appliquée ? Rien ne sert de partir avec de grandes idées si vous ne savez les appliquer.

 

Et l'appliquée ne ferait-elle pas piètre figure sans le lettré ? Elle aura beau faire, il lui manquera toujours un projet enchanteur.

 

Entre les deux, les coeurs balancent... Or il n'est point besoin, toujours, de choisir. Si l'appliquée suit ce que lettré a tracé, si le lettré ne prend pas ombrage de ce que l'appliquée prenne sa place, les deux font bon ménage.

 

Véronique Soulé

 

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Par fjarraud , le lundi 09 mai 2016.

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