Orthographe : Le regard iconoclaste de Gabriel Cohn Bendit 

L’orthographe n’a rien à voir avec la langue française ou sa grammaire. On aurait pu transcrire la langue française autrement. Comme nos amis italiens on aurait pu écrire « farmacie et filosofe » Ce que faisait d’ailleurs Voltaire. Le nom étant invariable en français c’est-à-dire qu’il se prononce de la même façon au singulier qu’au pluriel on dit le ou les « chien » une ou des « table » un ou des « genou ». Alors pourquoi ces « s » ou « x » ? Ce qui en français est une exception à savoir un nom qui se prononce différemment au singulier et au pluriel comme cheval-chevaux est la règle pour tous les noms en allemand.

 

Et la règle d’accord du participe passé avec être ou avoir …Quand nous parlons le participe est invariable. Il est « venu » et ils sont « venu » se prononcent de la même façon pourquoi les différencier à l’écrit ? De même pour : il « a chanté » de belles chansons qui se prononce comme les belles chansons qu’il a « chanté » alors pourquoi mettre dans ce dernier cas « ées »…

La grammaire française est une des plus simple dans la langue parlée des académiciens incultes en ont fait une des plus aberrante. Pourquoi ?  Le grand linguiste Ferdinand Brunot le rappelle dans le texte ci-dessous  « Quand on se décida à adopter une orthographe, le lundi 8 mai 1673, sous l’influence de Bossuet, et malgré Corneille, on voulut que cette orthographe distinguât “les gens de lettres d’avec les ignorants et les simples femmes”

 

Encore à propos de l’orthographe

 

A tous les incultes et ignorants je demande de lire ces quelques lignes d’un des plus grand linguiste et grammairiens français Ferdinand Brunot que j’ai découvertes grâce à la linguiste Liliane Sprenger-Charolles.

 

D’où viennent les résistances qui freinent les réformes actuelles ? Le grand linguiste et grammairien Ferdinand Brunot écrit dans son Histoire de la langue française publiée dans le premier tiers du XXe siècle : « Le préjugé orthographique ne se justifie ni par la logique, ni par l’histoire. […] Il se fonde sur une tradition relativement récente, formée surtout d’ignorance ». Dans une lettre ouverte au ministre de l’Instruction publique en 1905, il précisait : « Quand on se décida à adopter une orthographe, le lundi 8 mai 1673, sous l’influence de Bossuet, et malgré Corneille, on voulut que cette orthographe distinguât “les gens de lettres d’avec les ignorants et les simples femmes”… On la fit donc si étymologique et si pédante qu’elle eût suffi, à elle seule, à discréditer le Dictionnaire (charactère, phase, prez, advocat, advis, toy, sçavoir…) ; ses contradic-tions (abbattre et aborder, eschancrer et énerver) la rendaient inapplicable ; on inaugurait magnifiquement le système d’exceptions aux exceptions qui dure toujours. […] Il y a aux réformes une objection. […] Si désormais l’orthographe est changée, la lecture des livres imprimés avant la réforme sera rendue un peu plus difficile ..[…] Pareille illusion se comprend chez ceux qui n’ont jamais ouvert que des éditions scolaires, ou qui oublient que le texte de la Collection des Grands Écrivains est publié dans une orthographe uniformisée, rajeunie, truquée, où on a juste laissé “oi” en souvenir du passé. Mais cette orthographe est celle de la maison Hachette et cie. Elle n’est ni celle de Corneille, ni celle de Molière, ni celle de Pascal, ni celle de Bossuet… Qu’on se reporte aux manuscrits, quand ils existent, ou aux éditions, soit originales, soit faites d’après les éditions originales ». Par exemple, dans les écrits du filosofe Voltaire, on trouve phisionomie, panchans (Candide, Éd. 1759) ou encore afaire, horible, il n’ariva, arêter (Voyage de Scarmentado, Éd. 1778) et, dans les registres de l’Académie française de 1771, Clédat a relevé fames, chapèle, laquèle, éxécuter, oficiers, abé. Il est bien temps d’en rester là de nos « préjugés orthographiques ».

 

Dans sa lettre ouverte Ferdinand Brunot ajoute après avoir souligné que beaucoup trop de temps est consacré à l’enseignement de l’orthographe et il ajoute que cet enseignement « a d’autres défauts que d’être encombrant. Comme tout y est illogique, contradictoire, que à peu près seule, la mémoire visuelle s’y exerce, il oblitère la faculté de raisonnement, pour tout dire il abêtit…Il a le vice énorme d’incliner plus encore vers l’obéissance irraisonnée. Pourquoi faut-il deux p à apparaître et un seul à apaiser, il n’y a d’autre réponse que celle-ci : parce que cela est. Et comme les ukases de ce genre se répètent chaque jour, ce catéchisme…prépare et habitue à la croyance au dogme qu’on ne raisonne pas, à la soumission sans contrôle et sans critique. C’est d’un autre côté, n’est-ce pas, Monsieur le Ministre que l’Ecole républicaine entend conduire les esprits...¨

 

Gabriel Cohn Bendit

 

Un texte à lire dans  « 80 ans je persiste et signe » que vous trouverez sur mon site

 

Par fjarraud , le jeudi 10 novembre 2016.

Commentaires

  • Michel MATEAU, le 11/11/2016 à 21:47

    Il n’y a pas de doute qu’une nécessaire et profitable réforme de l’orthographe est nécessaire. Surtout pour des raisons de cohérence et d’harmonie. Mais il n’est pas sûr alors que la cohérence et l’harmonie aillent automatiquement et systématiquement dans le sens d’une simplification. Il faudra donc trouver un juste équilibre et faire preuve de plus de nuances que M. Cohn-Bendit.
    Quant à la vieille lune du caractère arbitraire de l’orthographe qui « prépare et habitue à la croyance au dogme qu’on ne raisonne pas, à la soumission sans contrôle et sans critique »,  elle a le même parfum suranné que « sçavoir »…

    De l’eau est passée sous le pont, nous ne sommes plus ni au XVIIIe, ni au XIXe, ni dans le premier tiers du XXe, ni même dans les années 70 et les usages (jamais aussi nombreux) de l'écrit ont bien changé. Ce sont dans ces usages que se préparent peut être bien les réformes de l'orthographe, en tout cas bien plus que dans le prétendu "iconoclasme" de (l'icône) Gabriel Cohn Bendit.

    Une icône qui ne perd pas l'occasion de se faire un peu de pub au passage en renvoyant vers son livre....Pas très élégant.. mais l'élégance et ses règles ne sont elles pas elles aussi des "dogmes qu'on ne raisonne pas" ?

  • lite44, le 10/11/2016 à 17:36
    Un regard "iconoclaste"… M. Cohn-Bendit n'aurait-il pas l'innocence des nouveaux convertis découvrant la pierre philosophale. Non pas que son point de vue soit inintéressant ; il y manque juste une culture de l'écrit, quelques bases linguistiques et moins d'anachronismes. Plaider pour une orthographe voltairienne – la fameuse peinture de la voix – c'est tout de même faire l'impasse sur ce qu'est fondamentalement l'écrit, compte tenu notamment de la structure spécifique de la langue française et de ses nombreux homophones. Pour ne citer que cet exemple.
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