Une 7ème mission pour Macron : Les profs stagiaires se rebiffent à Paris 

Qui a dit qu'Emmanuel Macron n'aurait pas de période de grâce ? Alors que l'on parie sur l'identité du prochain ministre de l'Education, les chantiers sont, eux, bien identifiés. A commencer par la formation des enseignants, une réforme plutôt ratée du quinquennat Hollande. Après Grenoble, un collectif de profs stagiaires s'est créé à Paris pour réclamer des améliorations.

 

Tout commence en mars dernier. Un petit groupe de profs stagiaires d'histoire se retrouvent pour convenir que leur formation à l'Espé (Ecole supérieure du professorat et de l'éducation) de Paris ne va pas. Trop de travail et trop d'enseignements déconnectés de leurs besoins, pas assez de cours pour apprendre le métier et les aider dans le mi temps qu'ils assument au collège.

 

Les stagiaires en colère entendent alors parler de l'appel de Grenoble lancé par des stagiaires eux aussi insatisfaits de leur formation. Ils s'aperçoivent qu'ils ne sont pas   seuls à éprouver ce malaise. Ils se rencontrent pendant les vacances pour dresser la liste de leurs griefs.

 

Pétition

 

" A la rentrée, explique Martin, prof stagiaire en histoire, nous avons contacté les syndicats pour nous aider à mobiliser, faire des tracts et organiser une AG. Mais tout le reste, c'est nous. "

 

 Le 26 avril,  ils sont près de 70 stagiaires, du second et aussi du premier degré, réunis dans l'amphi de l'Espé du site Molitor où se tient l'AG. Preuve que le mécontentement est partagé.

 

Un cahier de doléances commence à circuler pour cerner ce qui ne va pas. Une pétition est mise en ligne. En l'espace d'une semaine, elle dépasse les 210 signatures - 269 à la date du 8 mai. Elle sera bientôt remise au directeur de l'Espé.

 

Surcharge

 

Sans surprise, les stagiaires se plaignent d'une surcharge de travail. Un point dénoncé par les syndicats lors de la mise en place de la réforme. En Master 2, un étudiant doit à la fois rédiger un mémoire, suivre des cours et enseigner à mi temps - soit 9 heures par semaine pour les profs de collège.

 

" Lorsque nous avons cours à l'Espé, nous rentrons chez nous vers 18-19 heures. C'est alors que nous nous mettons à préparer nos cours, explique Martin, d'où un niveau de stress et de fatigue. "

 

Il reconnaît ne pas être le plus mal loti. Certains mettent une heure et demie pour venir à l'Espé. Or souvent les cours ont lieu sur les deux sites, le matin aux Batignolles, l'après-midi à Molitor. Ils peuvent ainsi faire plus de 4 heures de transports dans la journée...

 

Meubler 

 

Les stagiaires dénoncent aussi l'inadéquation de la formation, loin de leurs attentes. "  Notre principal besoin est d'être formés au métier d'enseignant, souligne  Martin. Or nous avons toute une série de cours qui sont là pour meubler la formation."

 

Il cite des cours du tronc commun aux premier et second degrés. Par exemple " l'option yoga de 18 heures, sortie de nulle part et sur laquelle on est évalué ". Ou encore les projets de classe interdisciplinaires. " Le cours est inter-degrés. Un enseignant de maternelle peut alors se retrouver avec un prof de lycée. Si le projet ne tient pas, on nous dit : ce n'est pas grave, ce sont de faux projets... En plus, ils sont longs à préparer, il faut se voir en dehors. "

 

Théorique

 

Martin évoque aussi l'anglais dans lequel les étudiants de Master 2 doivent valider un certain niveau. " Le problème là encore est que l'enseignement n'est en rien lié aux pratiques enseignantes et aux besoins que l'on pourrait avoir pour la classe. "

 

Il y a enfin les cours théoriques comme ceux du mercredi matin, dispensés par des profs de fac qui n'ont pas enseigné dans des écoles depuis belle lurette. Des cours magistraux sur l'histoire de la Chine ou de Byzance qui peuvent être intéressants et inscrits au programme, mais jugés trop déconnectés. 

 

" Or, on a un an pour apprendre le métier, souligne Martin, découvrir le maximum de pratiques, apprendre par exemple comment faire une vraie différenciation. On préfèrerait avoir plus de didactique et plus de pédagogie. "

 

Infantilisation

 

Comme leurs homologues grenoblois, les stagiaires parisiens déplorent enfin une  infantilisation de la part des formateurs des Espé, avec remise de devoirs, suivi des présences... " On ne se sent pas considéré comme des adultes responsables alors même que l'on est devant des élèves trois jours par semaine ", regrette Martin. 

 

A l'Espé de Paris, il n'a pas été question de lancer un grève. Les cours finissent fin mai et en Master 2, les étudiants terminent et soutiennent leur mémoire. " Pour nous c'est trop tard, mais ce mouvement, on l'a lancé pour les stagiaires de l'an prochain, précise Martin, on a même proposé de revenir pour les aider. La solidarité entre étudiants est quelque chose de très important. "

 

Véronique Soulé

 

Lire les précédentes chroniques

 

La pétition en ligne  

 

Et pour suivre le mouvement

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Sur les stagiaires en grève de l'Espé de Grenoble

La position de Pierre-Yves Duwoye

 

Les 6 travaux d'E Macron

 

 

Par fjarraud , le mercredi 10 mai 2017.

Commentaires

  • thais8026, le 10/05/2017 à 14:41
    Je ne comprends pas le problème de l'infantilisation : rendre des devoir et relevé d'absence !
    Mais est-ce que ces stagiaires ont compris qu'il n'avait pas encore le CAPES et que ces cours sont obligatoires. 
    Quand je fais une formation, je signe un relevé de présence alors que je suis titulaire et je ne prends pas cela comme de l'infantilisation mais comme un contrôle nécessaire. En effet, quand j'obtiens une formation je prends une place et il est normal que l'on vérifie ma présence parce quelqu'un d'autre n'a pas pu y aller et que des moyens financiers ont été mis à ma disposition (ma présence est le gage de son utilisation correcte).
    De plus, un cours trop théorique, comment cela ? Doit-on se limiter à un niveau terminale ? Si c'est au programme, je trouve intéressant d'avoir des connaissances supérieures cela permet de rendre son cours plus vivant, de faire, de voir des liens que l'on ne ferait pas nécessairement.
    Pour le reste je ne connais pas donc...
    De plus, ils ne sont plus étudiants, période où ils choisissaient leurs UV. Ce n'est pas eux de décider de leur formation mais à l'Etat. C'est l'Etat qui définit les compétences de ces fonctionnaires pas les fonctionnaires.
    • JeanNicolas, le 10/05/2017 à 15:58
      En effet vous ne connaissez pas...
      Quand on est fonctionnaire-stagiaire c'est que l'on est DEJA lauréat du CRPE CAPES Agreg...etc.

      Pour les cours théoriques je suis assez d'accord avec vous mais on exige de nous la maîtrise de pratiques professionnelles au bout d'une année... Année pendant laquelle on a le droit de dire, unanimement, que nous ne sommes pas assez formés A L'ESPE (université) pour répondre à ces exigences.
      Puisque justement c'est la hiérarchie de L'Education Nationale qui nous le fait sentir...
      C'est quand même idiot de ne pas titulariser des stagiaires pour ça... Puis de prendre des contractuels à pole emploi en attendant...
      Il y a un réel manque d'harmonie entre EN et Université...
      Encore une fois : ce n'est pas marginal, les retours sont identiques dans l'ensemble des ESPE de France.

      La plupart d'entre nous se plaisent en cours théoriques sinon nous n'aurions pas choisi ce métier. Ce serait avec joie que j'assisterais au cours de "Philosophie de l'Education", au sein d'une formation plus longue dans laquelle seraient déjà présents les prérequis les plus basiques nécessaires à tout début de pratique dans l'enseignement ...

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