Blanquer : L'Ecole de demain sera à distance 

L'école de demain s'appuiera largement sur de l'enseignement à distance. C'est ce qu'annonce JM Blanquer dans deux entretiens, sur France Inter le 8 mai et dans le JDD le 10 mai. Présentée comme une conséquence de la crise sanitaire, cette évolution qui met aussi en avant le périscolaire semble annoncer un budget en réduction.

 

"Nous préparons tous les scénarios. L'hypothèse la plus vraisemblable, c'est que le virus sera encore présent en septembre. Dans ce cas, la rentrée ne ressemblera sans doute pas aux précédentes. Cette reprise de mai-juin nous permet d'expérimenter des modalités de fonctionnement, nécessairement mixtes, entre présence à l'école et enseignement à distance. Un groupe de travail va réfléchir aux usages numériques, au travail en petit groupe, à la place du sport et de la culture, que je souhaite développer… Nous devons aussi travailler avec les collectivités locales sur la réorganisation de l'espace, l'articulation scolaire et péri­scolaire. C'est l'occasion de moderniser le système éducatif".

 

Dans le JDD , JM Blanquer est allé au bout du raisonnement amorcé sur France Inter le 8 mai. C'est une version allégée de l’École qu'il annonce avec une part plus importante de périscolaire le développement de l'enseignement à distance. Pour le ministre cette nouvelle organisation est un moyen "de faire de notre école une réelle source de transmission du savoir et d'épanouissement".

 

La découverte de l'enseignement à distance et la formation sur le tas au numérique de la quasi-totalité des enseignants sont certainement des acquis de la période de confinement. Les enseignants ont inventé de nouvelles façons de faire classe à distance. Ils ont réussi à maintenir le fil avec une majorité d'élèves.

 

Pour autant l'enseignement à distance n'a pas vraiment fait ses preuves. D'une part le  décrochage a été massif, particulièrement pour les publics les plus défavorisés. D'autre part, durant cette période la majorité des enseignants ont travaillé sur des acquis plus souvent que tenté de transmettre de nouvelles acquisitions.

 

Surtout, il a manqué à cet enseignement toute sa dimension collective. "La classe n’est pas une juxtaposition d’élèves à qui l’on fournit des travaux individuels, c’est un espace symbolique de construction du collectif et de l’apprentissage du "faire société". On y arrive avec ses singularités et l’on y accède à des savoirs communs en découvrant les règles qui permettent de travailler ensemble et de s’enrichir les uns des autres", explique très bien P Meirieu..

 

Dans l’École de septembre que veut instituer P Meirieu tout sera donc dans les proportions. Il faudrait maintenir une majorité de présentiel. Il faudrait aussi que le périscolaire ne remplace pas au scolaire mais s'y ajoute. Mais ce ne semble pas être le projet ministériel.

 

F Jarraud

 

Blanquer dans le JDD

Meirieu dans La Dépêche

 

Par fjarraud , le lundi 11 mai 2020.

Commentaires

  • sesamp, le 11/05/2020 à 15:10
    Il est toujours étonnant de constater que les prosélytes sont souvent les moins compétents. Les TICE ne font pas une exception à cette "règle"... 
    Pour avoir géré une formation à distance il y a plus de 15 ans et télé-enseigné pour mieux gérer une grande distance entre mon travail et ma résidence, j'ai expérimenté bien avant le confinement la gestion d'un groupe à distance. Les outils ont évolué dans le bon sens. On a depuis peu de temps la possibilité d'exploiter "gratuitement" des outils d'un niveau professionnel. 
    Il faudrait développer un long bilan détaillé de cette pédagogie là.
    Tout d'abord le coût: 
    - Matériel du professeur
    -Matériel des élèves
    - Consommables + frais d'accès (adaptation des moyens aux besoins).
    - Le temps passé par le professeur à l'acquisition des outils (auto-formation).

    Rendement pédagogique:
    -Consolidation d'acquis
    -Nouveaux apprentissages
    -Expérimentations
    -Partage de résultats de pratiques
    -Echanges infra groupe, échanges professeur/élève(s).

    Il serait intéressant de faire un bilan entre les résultats d'une pédagogie TICE / pédagogie présentielle.
    Nous avions à bac +5 mis en place une pédagogie TICE pour les meilleurs éléments d'une formation sélective considérant qu'elle ne pouvait être accessible pour les autres sans avoir de conséquences sur la qualité des résultats. Le coût d'une telle formation si elle est budgétée de façons sérieuse la rend totalement inefficace au regard de toute pédagogie traditionnelle. 
    Aura-t-on une évaluation sérieuse comme on la trouverait en science avec un groupe TICE et un autre présentiel. A résultats égaux, quels vrais moyens mis en place? A coûts égaux (y compris le financement les temps "gris" hors pédagogie active et celui des moyens matériels individuels) quels résultats relatifs?
    Si on me montre l'efficacité des TICE - NTI , je veux bien manger mon chapeau. Ce n'est pas faute de les maîtriser car je les pratique depuis longtemps et même en présentiel, je demande à mes élèves de consulter mes supports sous Moodle et de me restituer leurs travaux sur plate-forme en ligne, mais on travaille ensemble!
    L'interaction du groupe a un rendement qui même mauvais sera toujours supérieur à celui du numérique.
    Si on minimise les coûts et les difficultés des TICE tout en maximisant les bénéfices, on n'aura aucune mauvaise foi à en faire la panacée dont chaque ministre rêve secrètement. On pourra même penser à réduire la masse d'enseignants en développant des applications… il suffira de définir une nouvelle façon de mesurer cette pratique pour la rendre plus performante au regard de ce nouveau "thermomètre"... J'en frissonne déjà.

    Je vous renvoie à la page Wikipédia dédiée aux TICE qui précise dans le paragraphe bilan, le rendement des TICE par une enquête internationale:

    Selon une enquête diligentée par l'OCDE dans le cadre du programme PISA 10 : "Malgré des investissements considérables en ordinateurs, connections internet et logiciels éducatifs, il y a peu de preuves solides qu'un usage accru des ordinateurs par les élèves conduise à de meilleurs résultats scolaires en mathématiques et lecture" et "les pays qui ont le moins investi dans l'introduction des ordinateurs à l'école ont progressé plus vite, en moyenne, que les pays ayant investi davantage. Les résultats sont identiques pour la lecture, les mathématiques et les sciences". Enfin, "les associations avec l'utilisation/l'accès aux TICE est faible, et parfois négative, même lorsque sont examinés les résultats en lecture digitale et en mathématiques sur ordinateur".


    De : fjarraud
    Publié : lundi 11 mai 2020 07:35
    Objet : Blanquer : L'Ecole de demain sera à distance

    • Fraisine1, le 13/05/2020 à 13:45
      Il est facile de glorifier l'enseignement à distance quand cela ne coûte pas un centime au ministère de l'EN.
      Les profs uitilisent leur matériel personnel pour effectuer du distanciel (ordinateur, imprimante, encre et papier), et le jour où une sur-utilisation fait rendre "l'âme" à l'ordinateur, le ministère ne propose pas d'en fournir un autre. Cette situation est impensable en entreprise.

      Alors pour le distanciel de septembre que semble prévoir notre ministre:
      pas de matériel fourni par l'EN, ==> pas de travail en distanciel
  • BEBEL33, le 11/05/2020 à 12:19
    Le monde d'après, hélas, ce sera le monde d'aujourd'hui en pire !

    Quand un ministre est capable de vendre une "modernisation du système éducatif" avec toujours moins de moyens humains, toujours plus d'outils reposant sur les moyens des familles et des personnels, toujours plus de numérique mais sans la logistique derrière, il n'y a rien de bon à attendre.

    Il faut avoir un certain culot pour prôner une école de demain largement fondée sur l'enseignement à distance quand on dit en même temps que celle-ci est génératrice d'inégalités et que c'est pour cela qu'il faut ouvrir et de façon précipité - voire en contradiction avec le conseil scientifique - les écoles en mai-juin. Le "en même temps" macronien c'est bien ça : dire tout et son contraire dans un foutage de gueule que le ministre n'arrive même plus à contenir.

    Blanquer ou "l'horreur pédagogique", voilà le titre d'un livre que j'aimerai écrire si j'en avais le temps. En attendant, j'espère que les enseignant(e)s ne se laisseront pas imposer ce retour du non-sens et que les parents seront exigeants à bon escient envers ce sytème qui se moque d'eux. 
  • delacour, le 11/05/2020 à 10:14

    "Cette reprise de mai-juin nous permet d'expérimenter des modalités de fonctionnement, nécessairement mixtes."



    On peut rêver d'un enseignement à distance. Alors il faut tout mettre en œuvre pour qu'il soit efficace.

    Il y a d'abord des contraintes matérielles et logistiques. Chaque enfant doit disposer d'un ordinateur et d'un accès à Internet. L'enseignement étant obligatoire, l'Etat doit fournir tout le matériel nécessaire. On a bien réussi à faire construire des écoles dans toutes les communes de France, on doit donc fournir aux élèves (en prêt) le matériel nécessaire. Ce sera le plus cher, mais le plus facile à réaliser.

    Il y a ensuite la réalité de l'enseignement à distance. Elle ne peut recouvrir la conquête d'apprentissages tels que la parole, la marche, l'éducation physique, l'intercommunication base de la parole de l'écriture-lecture, encore moins la socialisation. Réduire l'école à des savoirs en faisant fi de la créativité et de l'invention, individuelle et collective, serait confondre savoir mémorisé et intelligences corporelles, culturelles, sociales et autres.

    Il y a surtout le manque de preuve scientifique de l'efficacité de l'apprentissage en marge de l'enseignement. Aucun logiciel n'a été testé sur son efficacité à faire progresser les élèves. Tout logiciel est produit en fonction de connaissances relevant de la communication présentielle. Il reste à inventer des logiciels ayant fait leur preuve en tant que logiciel, sans aide extérieure (certaines familles sont incapables d'aider leurs enfants).

    Et finalement, on oublie un peu vite l'apprenant. Aura-t-il par exemple l'envie d'apprendre, d'utiliser les logiciels plutôt que d'aller disputer une partie de foot ? En classe les maîtres savent découvrir les élèves peu motivés, ils peuvent les aider discrètement à se "mettre en route". Faudra-t-il des logiciels espions pour surveiller et dans le meilleur des cas, fournir une aide au lieu de sanctionner ?  

    On aurait pu croire que cet épisode scolaire spécial montrerait à tous l'intelligence collective du corps enseignant, et son dévouement sans bornes, suffisamment pour que la confiance soit la règle.

    Restera encore à former les enseignants, au four et au moulin, en présentiel et à distance, avec des méthodes bien lissées dont on assurera la validité. Comment apprendre aux élèves la responsabilité dans la liberté si on commence par réduire leur espace d'existence ?

    Le métier de passeur s'apprend souvent sur le tas, les théories n'étant que des éléments de réflexion, les savoirs sont intrinsèquement inutiles, mais leur mode d'acquisition indispensable.

    Il y a encore beaucoup de grain à moudre. Quant aux expérimentations souhaitées, sont-elles déjà prévues ?

  • FDaddy, le 11/05/2020 à 09:45
    Le désengagement de l'état :
    - réduire les groupes
    - mettre en place le télé-enseignement pour enseigner à des groupes pris en charge par d'autres personnes
    - donner le sport et la culture aux collectivités locales

    c'est le grand retour des TAP

    Va-t-on réduire les inégalités sociales  ?
    - communes riches : activités riches
    - communes pauvres :....
    - La ville contre la campagne
    - Les centres urbains contre les banlieues

    Les deux articles qui se suivent dans cet expresso montrent tout l'enjeu
    - L’école de demain sera à distance.
    - Le directeur de cabinet siège à l'Ifrap.

    Bon courage

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