Les professeurs responsables des mauvais résultats en maths ? 

Depuis la publication des résultats de Timss 2019 en décembre dernier, on sait que le niveau en maths des jeunes français, à l'école et au collège, est le plus bas de tous les grands pays développés. Ces résultats auraient du réveiller le pays tant leurs conséquences peuvent être lourdes dans l'avenir. Ils nous valent la publication de trois documents de la Depp, deux Notes et un document de travail, qui interrogent les pratiques des enseignants. Les professeurs sont-ils responsables du très bas niveau en maths des élèves français ?

 

En cm2

 

La première Note de la Depp étudie les pratiques d'enseignement des maths en Cm2, un niveau proche de celui évalué dans Timss (CM1). Reposant sur un enquête auprès de 1317 professeurs des écoles, elle montre des différences dans les pratiques d'enseignement. Ainsi, " concernant la résolution de problèmes, les pratiques sont davantage différenciées puisque la moitié environ propose souvent des problèmes pour découvrir une notion (49 %), pour apprendre à chercher (50 %) ou pour se confronter à la complexité (problèmes à étapes sans question intermédiaire, 46 %)... Les avis sur les traces écrites (résumés à mémoriser, proposés par l’enseignant ou co-construits avec les élèves) sont plus contrastés et varient selon les contenus. Ainsi, trois professeurs sur quatre en proposent rarement pour la résolution de problèmes alors qu’ils en donnent presque tous pour la multiplication par 10, 100 ou 1 000 des nombres décimaux (87 %).. Les activités mises en place par les enseignants varient selon leur ancienneté : ceux entrés plus récemment dans le métier proposent notamment moins de situations complexes, de moments de travail réflexif sur les connaissances". Tout cela amène la Depp à proposer 5 groupes d'enseignants ayant des choix didactiques différents.

 

En 4ème

 

Le principe est le même dans la seconde Note de la Depp sur les pratiques en 3ème, un niveau proche aussi de celui de Timss (4ème). La Note ne relie pas les profils d'enseignants à la réussite des élèves mais définit 4 profils d'enseignants.

 

Ils sont nettement plus développés, tout comme l'analyse de pratiques, dans le document de travail de la série Etudes. Là le lien est nettement fait entre pratiques enseignantes et réussite des élèves. " L’analyse des pratiques déclarées s’agissant de l’enseignement du calcul littéral montre en effet des choix d’enseignement qui ne tiennent pas suffisamment compte des enjeux d’apprentissage du calcul littéral. Ceuxci ont trait à l’équilibre entre technique de calcul et résolution de problèmes, à la motivation du sens et de l’intérêt du calcul littéral, à la variété et à la complexité des types d’exercices proposés aux élèves, ainsi qu’à la formulation des propriétés et des justifications pendant les interactions. Ces choix didactiques, qui sont explicités dans le rapport, ont une influence sur les usages du calcul littéral par les élèves et l’intelligence du calcul qu’ils développent. Ils mettent en évidence une interprétation variée des attentes institutionnelles contenues dans les programmes (par exemple, la chronologie des séquences ou l’ordre de présentation des connaissances et des compétences associées des programmes de 3e selon qu’il s’agisse des expressions littérales ou des équations). Ces attentes sont précisées dans les ressources développées sur Éduscol, mais cellesci ne sont lues fréquemment que par un peu moins de la moitié des enseignants lorsqu’ils préparent leurs séquences et séances de mathématiques", souligne le document. " L’évaluation diagnostique s’avère encore peu développée. Par ailleurs, les choix des enseignants concernant les autres dimensions de cet axe ne sont pas sans incidence sur l’autonomie, la prise d’initiatives des élèves et leur responsabilité dans la recherche et l’analyse critique de leurs stratégies de résolution et de leurs raisonnements... Les enseignants exerçant en EP se caractérisent par des pratiques globalement moins favorables aux apprentissages : ils s’attachent, par exemple, moins à motiver le sens et l’intérêt du calcul ; les problèmes qu’ils proposent à leurs élèves sont moins complexes et variés ; enfin, ils recourent davantage à l’usage de formulations simplificatrices au détriment de formulations mathématiques... Il convient de remarquer qu’une faible part des enseignants interrogés rapportent suivre fréquemment des activités de formation continue sur certains contenus mathématiques, comme l’enseignement du calcul littéral".

 

Ces remarques sur les pratiques des enseignants ne sont pas sans valeur. Mais l'enjeu des résultats catastrophiques en maths et sciences des élèves mériteraient d'autres commentaires.

 

Le refus de voir les facteurs systémiques ?

 

Que veut dire d'ailleurs ce très bas niveau des élèves français ? En fait il y a deux phénomènes. D'une part il y a le fait que les meilleurs des élèves français sont plutôt moins bons que leurs camarades des autres pays développés. Ce fléchissement au sommet reste assez mystérieux. Plus repéré et commenté, il y a d'autre part les résultats de plus en plus faibles d'une partie croissante des élèves qui décrochent totalement des apprentissages basiques des maths. Ces jeunes sont pour l'essentiel ceux de l'éducation prioritaire et des quartiers pauvres.

 

Là on voit tout de suite d'autres explications que les seules pratiques des enseignants.  Une saute aux yeux dans la Note de la Depp, qui pourtant ne la relève pas. En CM2 en éducation prioritaire on compte davantage d'élèves en éducation prioritaire qu'hors éducation prioritaire : 18.2 contre 17.4. Evidemment ça contredit le discours officiel sur le fait que les dédoublements en CP Ce1 n'auraient pas d'effet sur l'encadrement des élèves... Surtout on a un facteur d'aggravation des difficultés des élèves. Les enseignants exerçant en éducation prioritaire (EP) sont plus diplômés qu'hors EP et plus jeunes. Mais ils font face à la ghettoïsation du système éducatif et à la dégradation des conditions de vie des familles dans les zones d'EP. Ils sont aussi souvent pas remplacés ou carrément pas recrutés.

 

D'autres analystes se sont attachés à étudier les raisons de la faible efficacité de l'enseignement des maths à l'école et au collège. On pourra lire les analyses de Pierre Arnoux et Serge Petit par exemple. L'enjeu est suffisamment important pour que la réponse ne porte pas que sur les pratiques enseignantes. En mettant le projecteur sur ce point on laisse dans l'ombre les raisons systémiques de l'effondrement du niveau en maths.

 

François Jarraud

 

Note Depp Cm2

Note Depp 3eme

Document de travail

Les résultats de Timss

L'analyse de Pierre Arnoux

Et de Serge Petit

 

 

 

Par fjarraud , le mardi 02 mars 2021.

Commentaires

  • EMARSILIO, le 03/03/2021 à 11:45
    Bonjour, 
    Je n'ai pas bien saisi ce passage : 

    "Là on voit tout de suite d'autres explications que les seules pratiques des enseignants.  Une saute aux yeux dans la Note de la Depp, qui pourtant ne la relève pas. En CM2 en éducation prioritaire on compte davantage d'élèves en éducation prioritaire qu'hors éducation prioritaire : 18.2 contre 17.4. Evidemment ça contredit le discours officiel sur le fait que les dédoublements en CP Ce1 n'auraient pas d'effet sur l'encadrement des élèves."


    Vous parlez des effectifs de classe ? 
    Merci ;-)



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