Sophie Courrèges et Laurianne Navarre : Former au risque en SVT  

Etudier les risques de crues pour les collégiens des Hautes-Pyrénées n’est pas que théorique... Sophie Courrèges et Laurianne Navarre, professeurs de SVT au collège de la cité scolaire Pierre Mendès-France de Vic-en-Bigorre (65) ont choisi d’effectuer une séquence pédagogique sur le risque d’inondation pour sensibiliser leurs élèves aux moyens de prévision et de prévention. « Les élèves ont été marqués par les 2 inondations importantes de ces trois dernières années », soulignent les enseignantes.  Avec une implication du maire de la Ville et des techniciens du syndicat du bassin versant, leur projet montre aux collégiens les nombreux paramètres pouvant engendrer une inondation. Au bout de 3 semaines, les élèves ont présenté à l’oral leurs stratégies individuelles et collectives pour limiter ce risque.

 

Quel travail réalisent vos élèves sur les inondations ?

 

Il s’agit de traiter une partie du programme de SVT au cycle 4 : « Relier les connaissances scientifiques sur les risques naturels aux mesures de prévention et de protection » qui s’inscrit dans la partie « La planète Terre, l’environnement et l’action humaine ». Nous avons choisi de faire travailler tous les élèves de 4e sur un exemple local de risque météorologique : le risque d’inondation à Vic-en-Bigorre.

 

Nous y avons vu l’occasion de retravailler des notions de 5e (aléa, risque, prévision…) sur un sujet en lien avec le thème de météorologie et climatologie que nous venions de terminer, mais aussi de faire coopérer les élèves en groupe, de leur apprendre à exploiter des documents de nature variée (cartes, documents officiels communaux, PPR, articles de presse…), de construire un diaporama et de présenter un travail à l’oral.

 

En quoi ce risque fait-il davantage sens dans votre localité ?

 

Nous sommes dans le piémont pyrénéen, plus précisément dans le bassin versant de l’Adour amont. C’est un territoire rural qui accueille 185 000 habitants. La population de l’ensemble du bassin est confrontée à différents types de crues (torrentielles en montagnes, lentes dans la plaine ou encore des crues par ruissellement). Certaines communes voient jusqu’à 80% de leur population installée en zone inondable.

 

Le secteur de Vic-en-Bigorre est donc soumis régulièrement à des inondations, dues à des submersions lors des crues des deux cours d’eau qui traversent la zone et à des remontées de nappes phréatiques peu profondes près de la commune. Les élèves ont été marqués par les 2 inondations importantes de ces trois dernières années, où de nombreux champs et routes ont été couverts d’eau et quelques dégâts dans des habitations ont été à déplorer. Il nous a semblé intéressant de les sensibiliser aux moyens de prévision et de prévention de ce risque qui les concerne sur place actuellement mais aussi pour leur vie de futurs citoyens où qu’ils soient plus tard puisque tous les ans les médias nous parlent d’inondations dans de nombreuses régions.

 

Quels sont les intervenants extérieurs prenant part au projet ?

 

Nous avons eu la chance de pouvoir enrichir ce travail cette année grâce à plusieurs intervenants extérieurs. Tout d’abord, M. le Maire de Vic-en-Bigorre a eu la gentillesse d’accepter de réaliser une courte vidéo présentant aux élèves l’enjeu réel que pose le problème des inondations sur la commune. Le maire a en quelque sorte lancé un défi aux élèves en leur demandant de proposer un ensemble de solutions individuelles et collectives dont il pourrait éventuellement s’inspirer lors d’une prochaine réunion. Ce cadre formel a favorisé l’engagement des élèves dans cette activité.

 

Au cours de ce travail qui s’est déroulé sur 3 semaines, nous avons eu l’occasion d’entrer en contact avec des intervenants du Syndicat Mixte de l’Adour Amont (SMAA), et de réfléchir avec eux à une intervention en classe qui ne pouvait se dérouler qu’après l’oral. Deux techniciens du SMAA sont alors venus passer une heure avec chaque classe. Ils ont ainsi complété les connaissances des élèves sur l’historique de l’occupation humaine dans ce secteur rural, la surveillance des cours d’eau du bassin versant, et aussi sensibilisé au travail collaboratif du SMAA avec les collectivités et avec les particuliers dont les agriculteurs du secteur. Le fait que les élèves aient déjà appris et compris quelques notions au cours de leur travail en groupe a permis une écoute active et des échanges intéressants lors de l’intervention dans chaque classe. Le retour des élèves a confirmé que les points abordés par les techniciens du SMAA notamment en termes de solutions individuelles et collectives sont très bien passés (mieux qu’après leur seul travail de recherche). Cela tient en grande partie à l’excellente qualité pédagogique des deux intervenants, que nous remercions encore.

Nous avons déjà réfléchi avec eux à de nouvelles modalités d’intervention pour l’année prochaine afin d’améliorer encore l’ensemble de ce travail.

 

En quoi l’étude du risque d’inondation est-il complexe ?

 

Le risque d’inondation dépend de nombreux paramètres structuraux (la géologie, les cours d’eau, l’érosion, l’urbanisation…) mais aussi de l’évolution des mentalités sur le sujet, comme la déconstruction d’idées fausses, la présentation des nouvelles approches et techniques pour lutter contre ce problème. De plus, le réchauffement climatique, en amplifiant la fréquence des gros orages, devrait contribuer à augmenter le risque d’inondation dans les prochaines années, et le développement des villes devrait être pensé en prenant davantage appui sur les études et expertises locales. Il est donc important de faire prendre conscience de tout cela à un public le plus large possible, ce qui passe par le fait de sensibiliser les jeunes générations à ce risque et aux solutions possibles.

 

Comment se sont débrouillés vos élèves à l’oral ?

 

L’oral est toujours une épreuve redoutée par de nombreux élèves, mais le fait d’être en groupe, avec un support et de connaître les modalités d’évaluation en amont a permis à la grande majorité des groupes de réaliser un bon passage à l’oral. Dès la classe de 6e, nous veillons à réserver un temps de présentation d’un petit sujet devant la classe, en laissant les élèves libres de choisir certaines modalités (seul ou à plusieurs ; partie à présenter…), afin de les préparer progressivement à l’épreuve du DNB puis du lycée.

 

Sur ce sujet du risque d’inondation, le plan et la mise en page du diaporama étaient imposés ainsi que le temps de passage. Les difficultés ont porté sur des confusions entre prévision et prévention du risque, et nous avons constaté que les stratégies individuelles et collectives à mettre en place n’étaient pas très diversifiées ou pas forcément applicables à l’échelle locale. Mais tous les groupes se sont impliqués dans ce travail, et certains élèves ont inséré des photos qu’ils avaient prises eux-mêmes durant la dernière inondation du village, accompagnées de commentaires sur leur ressenti personnel à ce moment-là : c’était très intéressant !

 

 

Propos recueillis par Julien Cabioch

 

Les ressources du projet :

Document Communal Synthétique (DCS) sur les risques à Vic en Bigorre

Carte du PPR (zones constructibles)

 

Dans le Café

Jacques-Marie Bardintzeff : Comment éduquer aux risques géologiques ?  

Géo : Inondation : Comment en parler en classe ?

 

 

 

 

 

Par fjarraud , le mardi 18 mai 2021.

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