Quand les garçons fatiguent les profs... 

"Que peuvent faire les écoles et les enseignants pour aider les garçons à réduire leur infériorité en lecture ?" L'OCDE tente de répondre à cette question en s'aidant des résultats de l'enquête internationale Talis. Malheureusement, pour l'OCDE, aider les garçons implique une hausse de la charge de travail pour les enseignants. Les garçons sont-ils une calamité ?

 

Les garçons réussissent moins que les filles dans les classes indisciplinées

 

C'est un classique des systèmes éducatifs : les garçons sont meilleurs en maths et les filles plus compétentes en lecture. Cet écart ignore les frontières et s'impose dans la plupart des pays, du moins là où les filles vont à l'école autant que les garçons.

 

La question posée par l'OCDE est celle du "que faire" face à cet handicap masculin. La première constatation faite par Talis c'est le lien entre les résultats des garçons et les problèmes de discipline dans la classe. Plus ils osnt importants, plus l'écart entre filles et garçons augmente. "Peut-être que les garçons sont plus affectés par des conditions d'apprentissage dégradées", écrit l'OCDE. "Peut-être sont-ils ceux qui perturbent les cours". Une certitude : dans une classe agitée les garçons sont moins capables d'apprendre que les filles. Or on sait que les classes françaises sont nettement moins disciplinées que la moyenne de l'OCDE.

 

Multiplier les évaluations : positif pour les garçons ?

 

Seconde constatation de l'OCDE : l'écart de réussite entre filles et garçons diminue dans les classes où l'enseignant déclare des relations positives avec les élèves. La qualité de la relation personnelle avec l'enseignant aurait davantage d'impact sur les garçons que les filles. L'OCDE en tire comme conclusion que les esneignants devraient paser du temps avec les élèves dans des activités complémentaires des cours de façon à en gagner lors des cours...

 

Dernière constatation : l'écart entre les genres diminue aussi dans les écoles où les évaluations sont fréquentes. Multiplier les évaluations serait particulièrement positif pour les garçons. L'OCDE a aussi calculé qu'il y a une corrélation entre l'évaluation externe des enseignants et les résultats des élèves. Un vrai encouragement à multiplier les évaluations des élèves et des adultes.

 

Le poids des stéréotypes de genre

 

Que retirer de tout cela ? D'abord qu'il est intéressant de voir l'OCDE s'occuper de la réussite des garçons. Car il est vrai que les garçons sont plus sujets au décrochage et plus nombreux à abandonner l'Ecole avant le bac. Mais il ne faudrait pas oublier qu'au final, ce sont eux les vainqueurs du système éducatif. Ce sont eux qu'on retrouve majoritaires dans les filières d'excellence. Ce sont eux qui, à niveau égal, n'hésitent pas à les demander quand les filles n'osent pas. S'intéresser autant aux garçons ne doit pas faire oublier cette réalité.

 

Le lien entre la relation personnelle et la réussite des garçons fait écho à des recherches françaises sur ce que Debarbieux appelait "la fabrique des garçons". Il a montré , dans "L'impasse de la punition à l'école", que les punitions encouragent les transgressions plus qu'elles ne les découragent et que c'est particulièrement vrai pour les garçons. Arriver à utiliser d'autres armes relationnelles ne peut que favoriser la réussite des garçons.

 

Une autre mention renvoie à l'image que les garçons ont d'eux mêmes : il s'agit des évaluations. D'autres études ont montré que les garçons souffrent moins de la compétition que les filles et y sont meiux préparés.

 

Derrière toutes ces constatations ce qu'on entend surtout c'est le poids des stéréotypes de genre. Ils sont à l'oeuvre chez les garçons mais aussi chez les enseignants et dans le système lui-même. C'est dans cette lecture que nous partageons la conclusion de l'OCDE qui dit que "trouver lemoyen d'améliorer la discipline dans les écoles et les relations avec les élèves peut aider à diminuer l'écart entre filles et garçons en lecture".

 

François Jarraud

 

Teaching in Focus n°39

Debarbieux

 

 

 

 

 

Par fjarraud , le mercredi 09 juin 2021.

Commentaires

  • Reformateur, le 09/06/2021 à 15:28

    Bonjour,
    Je ne me prononcerai pas sur le sexe des Anges et l'essence des genres. Tel que les élèves sont, lorsqu'ils arrivent à l'école, il me semble que c'est l'esprit de toute la culture scolaire qui impacte plus ce que sont ces garçons.

    Une grande part de la culture scolaire pénalyse plus directement l’adhésion des garçons en moyenne à l’école. Cette capacité pédagogique à "secondariser" les objets du monde, à les couper de l'idée d'action sur le monde. Cette machine structurale, formelle broie tout ce qui lui tombe entre les mains. N'espérez pas de salut, par exemple, d'un certain léger retour actuel du texte documentaire, très délaissé ces 20 dernières années. Il est déjà en cours d'être broyé dans une nouvelle « typologie du texte composite », et rincé aux « processus cognitifs du lecteur »... Bref coupé du lien avec l'action sur le monde.

    Dans son formidable élan abstrait, l'école française est coupée du monde, mais aussi du corps, avec une place de l'activité physique dérisoire. Cette culture asséchante débute dès la maternelle. C’est par exemple le désarroi des collègues devant le volume d’évaluation en maternelle évoqué ou exigé par l’institution. On y perd tout sens de l’action et de la vie.

    Car nous n’avons pas compris que ce qui est important, ce n’est pas d’atteindre l’abstraction pour l’abstraction, mais de permettre à l’élève de faire des liens entre le concret et l’abstrait, entre le sensible et le raisonné. De faire du lien entre le temps, l’espace, le corps, le monde... vécus, et le temps, l’espace, le corps, le monde… pensés. Bref de faire des allers/retours entre la vie et la pensée.

    Nous avons une réflexion inadaptée de la conceptualisation. Elle a été réduite longtemps, sciences structuralistes obligent, à la catégorisation (forme sans fond), puis repensé comme conceptualisation avec un modèle mathématique (Britt Mari Barth) à partir d’objets déjà abstraits.

    Certes, le concept de chien n’aboie pas. Mais lorsque vous entendez ce concept il s’est construit pour vous par une somme extraordinaire d’expériences sensorielles sonores, visuelles, olfactives, tactiles, affectives qui font du concept de chien une puissante synthèse et unité abstraite, organisant un merveilleux « chaos » sensoriel fondamental, celui de notre vie ! Il faut relire Bachelard pour abstraire.

    Bien sûr, il s'agit aussi de sortir les filles de leur capacité à être "conforme" dans une forme scolaire de si peu de fond, de monde ! Des filles qui se conforment, performent dans cette forme sans fond puis qui continuent de se conformer et ne se mettront pas en avant lorsque la vraie vie, l'action sur le monde se présentera à l'approche des études supérieures, qui subitement réveille un peu plus les garçons !

    Cette crise, qui toucherait plus nos garçons tels que nous les recevons à l’école, est une crise sociétale dans laquelle nous avons perdu le goût de l’action sur le monde réel. Elle touche aussi plus nos jeunes enseignants hommes dans le premier degré, qui savent moins pourquoi ils enseignent.

    Puisse notre sortie du confinement être l’occasion de nous rapprocher du monde !
    Cordialement.

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