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Loïc Godet , un projet en Éducation au Développement Durable.
Loïc Godet est professeur de Lettres Classiques depuis 15 ans, avant d'arriver à Nantes il a connu le cadre des ZEP, RAR à Paris, la zone violence en Picardie... Son collège n'est pas « étiquetté » d'un label, ce qui ne veut pas dire que le quotidien soit un chemin pavé de roses... Il nous propose un projet « interdisciplinaire » dans le sens où il n'est pas centré sur sa discipline. Par le biais d'un « club horticulture et développement durable » où pouvaient s'inscrire élèves de SEGPA et d'enseignement général ainsi que par des cours de français en en liaison avec l'EDD, le but de Loïc est que les élèves aient un aperçu du monde professionnel et politique afin qu'ils puissent accéder à une compréhension fine des interactions de ces deux univers.

CP : Pouvez-vous nous indiquer ce qui vous a amené à mettre en place ce club et à l'inscrire sous cette double tutelle du champ professionnel et du politique ?

LG : Le club est né de la volonté d'une de mes collègues de SEGPA qui souhaitait s'ouvrir sur d'autres champs. Je souhaitais quant à moi retrouver du sens à mon métier mais aussi donner du sens aux apprentissages en modifiant la perception de ceux-ci par des activités hors cadre du collège : insérer l'espace public comme lieu de transformation par des activités pédagogiques en liaison avec le monde contemporain (supprimer l'aspect artificiel des enseignements). J'avais également l'ambition d'une première inscription dans le milieu professionnel pour éviter des "stages-kebab" en liaison avec le marché vert du travail. Enfin il s'agit de modifier la perception du collège en lançant un vaste programme de communication et insister sur le travail liée à la mixité sociale par l'EDD

CP : Ce projet a-t-il eu des incidences sur vos pratiques, sur votre façon de travailler ?

LG : Personnellement, oui ! J'ai construit des passerelles multiples avec le monde professionnel. (communication et interface,) Il a fallu en particulier que je me pose comme un professionnel également, face à des exigences sociales qui dénaturent notre métier. J'ai dû davantage utiliser les TICE, utilisation plus importante du Livret Personnel de Compétences. Certains collègues m'ont suivi (professeur de Segp, infirmière, un professeur de lettres) mais je peine à créer des éco-délégués et à convaincre du bien-fondé de ceux-ci. J'ai « perfectionné » mes méthodes de connaissances du terrain que j'avais mises en oeuvre lors de ma « période parisienne » : s'intégrer dans le terrain où évoluent les élèves, pacifier le territoire de recrutement en liaison avec des agents de quartier...

CP : A quels écueils avez-vous dû vous heurter ?

LG : La principale difficulté fut la question de la mixité sociale des élèves (et des familles) très difficile à obtenir. Le rôle du chef d'établissement est important, briser la réputation d'un établissement en voie de paupérisation d'une ville de province est difficile. Il y a peu de dispositifs que l'on puisse solliciter et on peut douter parfois de la réelle volonté de faire bouger les lignes, ainsi par exemple une formation pour devenir formateur en EDD a été annulée inopinément...Le gestionnaire a un rôle fondamental dans ce type de projet : il a une influence réelle sur le devenir de certaines actions, ce que l'équipe enseignante oublie souvent. L'EDD a cette particularité qu'elle est holistique : tout (humains comme terrioire, local comme mondial) est en interdépendance étroite.

CP : Comment ce projet évolue au cours du temps ? Quelles suites

comptez-vous lui donner ou quels prolongement dans votre activité ?

LG : On peut dire qu'un projet en amène un autre (6 autres !), mais il me devient très difficile de tout conjuguer car je suis plutôt seul à les mener... Un mi-temps ne serait pas superflu alors je crois que je vais m'économiser et ralentir sur les projets l'an prochain en 2013-2014. Pour l'heure, actuellement, je me proposerais sans doute d'accompagner les élèves dans la recherche de stages professionnels en liaison avec l'EDD et l'évènement « Nantes capitale verte de l'Europe ».

CP : Du point de vues des élèves, des familles, quelles « retombées »?

LG : C'est variable selon les classes mais tous les élèves partagent une attraction évidente pour rencontrer des professionnels et donner du sens concret aux contenus pédagogiques. L'aspect de la continuité des savoirs sur 2 ans (4ème et 3ème) est primordial et assure une cohésion de la transmission. La mise en relation de plusieurs matières participe également à cette cohésion mais ce qui fait aujourd'hui le plus défaut, à mon sens.

Les familles ne s'associent que de façon minoritaire, malgré une publication dans le journal de quartier.

CP : Quelques mots sur votre motivation à la participation au forum ?

L'EDD est un facteur de réussite pour un monde en perte de sens comme le nôtre : un débat (une escarmouche plutôt) a eu lieu sur l'enseignement de la morale laïque, et pas une fois l'EDD n'a été signalée. Or, qu'est-elle sinon la prise en compte de l'autre et des interactions de notre monde de manière globale, et ce en proposant des actions locales de résolutions des problèmes ?

J'espère qu'un jour, l'EDD sera un ferment éducatif au territoire européen, une cohésion des actions pédagogiques dans une mise en oeuvre libre du carcan administratif. Notre schéma français d'éducation est bien trop artificiel, coupé du monde moderne : faire de l'élève un acteur de son apprentissage et du professeur un citoyen actif et reconnu car en liaison constante avec son territoire seraient mes deux priorités à l'heure actuelle.

Mon but est aujourd'hui de rechercher des passionnés comme moi, afin d'échanger sur ces pratiques, de créer les premières étapes d'un réseau national en instaurant un ordre de priorités, afin de comparer ce qui est mis réellement en place dans les Académies, derrière les effets d'annonce.

Propos recueillis par Lucie Gillet

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