Remplacement, cours et garderie 

Par François Jarraud




"Le remplacement constitue une préoccupation majeure pour notre ministère tant les enjeux pour les élèves et les familles peuvent être importants ; la continuité du service public impose que tout enseignant absent soit remplacé", écrit une note de service publiée au Bulletin officiel du 14 octobre. Elle présente une série de dispositifs pour pouvoir faire face aux remplacements à un moment où les postes de remplaçants sont supprimés.


Ainsi, dans les établissements, " il convient, en priorité, de trouver des solutions de remplacement du cours prévu dans la même discipline ou dans une autre discipline au sein de l'établissement. Lorsque cela ne sera pas possible, des activités d'accompagnement, de révision et de soutien devront être organisées en s'appuyant sur les ressources de l'établissement et particulièrement les outils numériques. Le concours d'enseignants de l'établissement disponibles ou en sous-service, de personnels titulaires affectés en zone de remplacement (TZR) disponibles au sein de leur établissement de rattachement, celui des assistants d'éducation et, le cas échéant, celui des assistants pédagogiques, est à privilégier dans ce cas".


Au niveau du bassin d'éducation, " des personnels habituellement chargés des remplacements des moyennes et longues absences peuvent être disponibles dans certaines disciplines. Vos services doivent ainsi pouvoir être sollicités pour l'affectation d'un enseignant non titulaire pour le remplacement de courte durée, en particulier s'agissant des absences non prévisibles. Les étudiants en Master 2 volontaires peuvent également être mobilisés dans le cadre de leur stage en responsabilité. S'agissant des TZR, leur mobilisation doit se faire prioritairement sur les absences à l'année ou les absences moyennes intervenant en cours d'année. Leur affectation pour effectuer des remplacements dans des disciplines connexes ne peut qu'être encouragée".


Une certaine incrédulité. La FCPE parisienne ironise sur les mesures envisagées localement. " Dans certaines disciplines non seulement il n’y a pas de remplaçants mais il n’y a pas assez de professeurs pour pourvoir à tous les postes… Alors quoi de plus simple en effet pour un enseignant de maternelle, d'enseigner la littérature en terminale ou l'allemand en quatrième ? Sans douter un instant de la capacité d'adaptation de nos enseignants, de qui se moque-ton ?", écrit la FCPE 75. "Le raisonnement présenté est tout à fait inquiétant. Il réaffirme le renoncement de l’Education Nationale à toute formation sérieuse des enseignants. Il suffit d’avoir fait de l’anglais à la fac pour être indifféremment instituteur de maternelle ou professeur d’anglais au collège".


La Fsu, à travers ses syndicats, dénonce l'utilisation d'enseignants du primaire "en surnombre", c'est-à-dire de Rased ou de conseillers pédagogiques, comme si leur métier n'existait pas, une pratique que L'Expresso avait aussi mentionnée dans une académie de l'ouest.  Dans L'Expresso du 14 octobre, Philippe Tournier, du Snpden, premier syndicat de chefs d'établissements, dénonçait l'absence de moyens pour payer les remplaçants en ce début d'année scolaire. 


De la chaîne d'économies à l'arrêt du vélo. C'est donc bien la gestion de l'Etat, les grandes économies décidées au sommet qui finalement en appellent des moyennes, la suppression de postes de remplaçants, qui elles-mêmes obligent à en imaginer de plus petites, comme le système D appliqué au remplacement.  La nouveauté de la rentrée c'est que c'est déjà l'essentiel, le service rendu aux parents et aux élèves, qui est affecté. Quand la "bonne gestion" se réduit à la suppression du service est-ce encore de la bonne gestion ?

La note

http://www.education.gouv.fr/cid53540/menh1023436n.html


De l'extinction des inutiles dans l'Education nationale…

Qu'est ce qu'un enseignant : une personne qui encadre une classe. C'est la définition donnée par un inspecteur d'académie de l'ouest de la France.  Tout le reste est inutile et appelé à disparaître.


Dans une lettre en date du 24 septembre, il invite "les enseignants du premier degré non chargés de classe" à faire des remplacements dans le second degré, où il y a des déficits "structurels" d'enseignants. Ces enseignants "non chargés de classe"  sont désignés : conseillers pédagogiques, rased, titulaires remplaçants. Tous sont désignés comme disponibles de suite pour des remplacements de longue durée.


Darcos avait déclaré les Rased inutiles avec la mise en place de l'aide individualisée.  Si, au bout d'un conflit mémorable, quelques milliers seulement ont été "sédentarisés", l'idée de leur inutilité demeure au regard de cet inspecteur. Ainsi le soutien aux élèves les plus en difficulté ne devrait plus avoir sa place dans l'éducation nationale, le dispositif commun devant y remédier. Cette qualité est étendue aux conseillers pédagogiques. La preuve est faite que les enseignants n'ont pas besoin de formation continue  puisqu'on balance directement des diplômés de l'université dans les classes du primaire. ..


Le premier intérêt de ce texte c'est bien sur de  nous indiquer quelles seront les premières victimes des réductions de postes de la rentrée 2011.  Cet inspecteur d 'académie qui considère dès maintenant que les Rased ou les conseillers peuvent être utilisés dans le secondaire et qu'ils ne manqueront pas au primaire,  les mettre très probablement en tête de liste des postes à supprimer sur son territoire. La promesse que "à l'issue de cette mise à disposition, les enseignants réintègreront leur poste d'origine" semble un peu cynique si on suit cette perspective.


Mais ce texte a aussi l'intérêt de nous présenter les représentations d'un cadre de l'éducation nationale. Deux ans après le départ de Darcos, l'idéologie qui l'animait est toujours bien présente chez les cadres. Elle s'habille, comme ici, de soucis gestionnaires. Mais en réalité c'est bien une conception de l'école et du rapport pédagogique qui est à l'œuvre quand on décide de supprimer le soutien pédagogique des enseignants et celui des élèves en difficultés graves. Cette suppression c'est celle de la pédagogie.


Ainsi la guerre idéologique continue dans l'Education nationale. Comme toute guerre civile elle laisse comme victimes les plus faibles, profs en difficultés ou élèves qui s'adaptent mal à l'Ecole. Ce que Darcos n'a pu terminer, Bercy pourrait le faire…




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Par fjarraud , le mercredi 20 octobre 2010.

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