L’Expresso du 13 décembre 2022
- Le fait du jour -
Pour la rentrée 2022, le ministère annonçait une hausse significative des « moyens » d’enseignement, particulièrement dans le premier degré. La carte scolaire de la rentrée 2023, présentée le 13 décembre, rompt avec cette tendance. C’est une baisse nette d’environ 1300 postes ETP qui aura lieu à la rentrée. L’enseignement primaire, privilégié jusque-là, subit les…
Peut-on aller contre le nouveau management public et imaginer une autre direction d’établissement que celle des managers ? C’est ce que tente de faire Christophe Prochasson, historien, mais aussi ancien recteur et conseiller éducation du président de la République (entre 2015 et 2017). Dans la revue Germinal (n°5), il dessine ce que pourrait être cette…
C’est sans doute le défi de ce quinquennat pour l’Éducation nationale. La Depp publie deux notes relatives à l’évolution du nombre d’élèves dans le premier et le second degré. Déjà se distingue nettement les effets de la baisse du nombre des naissances. Le nombre d’élèves diminue fortement dans le premier degré. La chute aborde le…
- Les disciplines -
Comment interroger les élèves sur leurs certitudes ? Laurent Reynaud, professeur des SVT au lycée Jacques Feyder d’Epinay-sur-Seine (93), fait émerger les doutes sur des questions scientifiques. Avec sa pratique, il essaie que « les savoirs scolaires soient pour les élèves des réponses aux doutes qu’ils rencontrent ». Ce travail effectué en groupe favorise les…
- Le système -
« Comme tout est illogique, contradictoire dans l’enseignement de l’orthographe, à peu près seule la mémoire visuelle s’y exerce. Cet enseignement oblitère la faculté de raisonnement ; pour tout dire, il abêtit. Il a le vice énorme d’incliner vers l’obéissance irraisonnée ». Rien de moins républicain que le culte de l’orthographe. C’est ce qu’explique avec…
« En captant les élèves les plus favorisés, l’enseignement privé accentue le phénomène, tout en se situant en concurrence directe avec l’école de la République », montre le sénateur (PC) Pierre Ouzoulias dans une question adressée à P Ndiaye. « Il s’insurge contre ce mouvement de fond, alors même que 73 % du budget des…
« Ce matin, on a fait cours dans le noir, il n’y avait pas d’électricité ». BFM s’est rendu au lycée Voillaume d’Aulnay-sous-Bois (93). La chaine décrit une situation d’abandon très embarrassante pour la présidente de la région IDF : murs à nu, fenêtres qui ne ferment plus, salles de classe où il faut 14°C,…
Jeudi 8 décembre, l’ensemble des enseignants du collège Anatole France de Chateaudun a débrayé. Les enseignants s’opposent à la décision préfectorale d’expulsion d’un élève géorgien âgé de 14 ans. Très impliqué dans la vie du collège, le jeune élève a de bons résultats. Sa famille est menacée en cas de retour en Géorgie. Dans L’Echo…
- La classe -
Grand succès pour la conférence du Cnesco sur l’évaluation avec plus d’un millier de participants. Le Cnesco vient de mettre en ligne les vidéos des différentes interventions sur sa chaine Youtube. Vous pouvez découvrir ou revoir les participants à cette conférence. Les vidéos Sur le site du café Sur le site du Café
« Et surtout, qu’on cesse de faire des dictées, ces usines à erreurs qui empêchent tout progrès en orthographe ». Sur son blog, Eveline Charmeux réagit à la chute de niveau en orthographe des écoliers. « Tout au contraire, il faut donner l’habitude aux enfants de ne jamais écrire de mémoire : dès qu’on a…
- L'élève -
- Les disciplines -
Une note de service fixe le calendrier des épreuves expérimentales d’ECE. Elles auront lieu du 28 au 31 mars en métropole et dès le 7 mars à La Réunion. Quant aux situations d’évaluation, la banque sera en ligne le 10 janvier. Les situations retenues dans chaque académie seront connues le 13 février. Du 10 janvier…
On croit tout savoir du merle. Et on a tort. D’abord, on ignore son caractère très belliqueux. Avec le merle, c’est chacun chez soi et malheur à celui qui franchit la frontière. On sous-estime aussi ses capacités. Des merles peuvent traverser des mers, voler pendant des centaines de kilomètres pour partir vers des rivages plus…
L'édito
Amélie, merci !
Alors que les enseignants entament un mouvement social de longue durée, il faut rendre sa part de mérite à Amélie Oudéa-Castéra. Pour avoir incarné aussi visiblement les non-dits du projet éducatif d’Emmanuel Macron, elle mérite un remerciement. Et elle nous donne l’occasion de revenir sur ce projet et ce combat. Depuis 2017, Emmanuel Macron a fait de l’éducation « le combat de notre siècle ». Et, depuis 2017, les enseignants bloquent le projet. Un long septennat de luttes qui nécessite maintenant une réponse de la société.
L’Ecole et Ibiza
A quoi pense Emmanuel Macron ? D’année en année, son choix semble moins sur. Jean-Michel Blanquer avait su déguiser la politique éducative d’Emmanuel Macron sous le masque de la République et de la science. En 2018-2019, au moment de la loi Blanquer, sous la poussée des enseignants, son siège vacillait. Mais, avec l’aide de la droite sénatoriale, il avait réussi à se maintenir en usant de son image de défenseur de l’Ecole. Il fallut Ibiza pour qu’il tombe. Le ministre faisait passer ses vacances avant son travail, la jet-set avant la République.
Avec Amélie Oudéa-Castéra, Ibiza est arrivé dès le premier jour. Mieux que ses prédécesseurs elle affichait sans vergogne ses choix de caste et revendiquait ses privilèges. De déclaration maladroite en formule malheureuse, la ministre a fini par incarner la grande bourgeoisie séparatiste, plutôt VIIème que 6ème. Ce choix, malheureux pour E. Macron, met en évidence les décisions anti sociales de la politique éducative d’E. Macron.
Une seule politique depuis 2017, celle de Macron
Car, depuis 2017, c’est bien la même politique éducative qui essaie de s’installer. On peut même remonter à 2016, où le futur ministre d’Emmanuel Macron, membre de l’Institut Montaigne, la définit. Dans « L’école de demain« , JM Blanquer en fixe les bases. C’est l’autonomie d’établissements scolaires mis en concurrence, dirigés par des chefs managers. C’est la fin du collège unique remplacé par des établissements à autonomie pédagogique. C’est l’éducation réduite aux fondamentaux dans le premier degré et pliant sous leur poids dans le second. Ce sont des enseignants dont les pratiques pédagogiques sont dictées et dont le mérite est estimé annuellement grâce aux évaluations nationales. Cette privatisation de la gestion de l’éducation nationale est proclamée par les gouvernements d’E. Macron. En février 2018, E Philippe promeut l’individualisation des salaires et la libération des managers dans toute la fonction publique. Quelques mois plus tard, E. Macron fait de la transformation de l’Ecole « le combat de notre siècle ». En aout 2022, il revient sur les fondamentaux de 2016 : autonomie des établissements, contractualisation générale des établissements et des enseignants. Cela nous donne le Pacte, le CNR.
Les enseignants sont seuls à faire reculer Macron
Si E. Macron se répète depuis 2018, si ses gouvernements fixent le même cap depuis 2017, c’est que la politique éducative du président peine à s’installer. Certes la loi de transformation de la fonction publique est passée. La loi Blanquer aussi. Le Pacte est mis en place. Mais la grande libéralisation de l’Ecole promise depuis 2016 n’a toujours pas eu lieu.
Les enseignants ont fait reculer Blanquer et sa loi en 2019. Il a fallu la désorganisation issue du confinement pour que la loi Rilhac passe. La transformation radicale du lycée professionnel a été freinée par des années d’opposition réussie des enseignants des L.P. Ils ne s’en rendent pas forcément compte. Mais les macronistes le savent. Les enseignants ont réussi, et eux seuls, à bloquer Jupiter.
Au point de bascule
Aujourd’hui, alors qu’Amélie Oudéa-Castéra entame sa mission ministérielle, les syndicats enseignants sont presque unanimes à écrire que « nous sommes à un point de bascule pour l’Ecole publique« . Sud, Unsa, Fsu, Sgen Cfdt et Cgt appellent ensemble à « une réponse forte qui passe par une action dans la durée« . Ils rejettent la politique présidentielle, jugée « passéiste et conservatrice« . Ils dénoncent « une école du tri social » marquée par la disparition du collège unique et l’affectation des jeunes élèves à des filières séparées. Ce tri social est particulièrement visible au collège et au lycée professionnel.
Particularité française
Alors que, chez nos voisins, la révolution libérale de l’Education a pu se mettre en place, la France résiste. C’est grâce aux enseignants. Mais leur action est possible par l’écho qu’elle rencontre dans la société. Dans un numéro de la Revue de Sèvres consacré à la privatisation de l’Ecole, Xavier Pons relevait cette spécificité française. » Les Français sont pour le libre choix de l’Ecole… Mais une fois mis devant le choix ils se posent des questions », écrivait-il. Parce que la privatisation menace les communs, encourage la fragmentation de la société, colporte des valeurs qui s’opposent aux valeurs collectives. A ce titre, le « nouveau pacte » et la transformation du collège sont une « révolution culturelle » dans la mesure où il attaque les bases de l’école publique.
Puisque nous atteignons le point de bascule, les Français peuvent encore s’opposer à ce projet et défendre leur école. Les enseignants ont besoin d’eux.
François Jarraud