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Du 19 au 23 mars, les enseignants innovants européens ont rendez-vous à Lisbonne
Education cherche politique européenne

Les perspectives soignées, les audaces architecturales, les jardins cachés, le bruit de l’eau, les lattes de bois, les pavés réguliers, les yeux des caméras de surveillance, métallique, vitré, aquatique, réfléchi, beau et froid, le Parque das Nações qui accueillait le forum européen des enseignants innovants pourrait à lui seul symboliser un XXIe siècle de science-fiction, époque où la technologie rendrait en apparence la vie plus belle mais la priverait de sa substance par la soustraction de l’improvisation, de la créativité spontanée. Et puis au cœur du quartier, il y a l’école, bruyante, colorée, dont la conception pensée laisse échapper l’expression individuelle et collective. Bruits de rires, bruits de travail, réalisations des élèves sur les murs, l’école est source de vie.

 

L’école est source d’innovation, d’inventions pour s’adapter aux évolutions de l’époque. A peine la porte fermée, voici que les fenêtres s’entrouvrent sur des savoirs impromptus des connaissances accessibles par un écran, petit ou grand. Pour tous ? Non et Bruce Dixon l’a rappelé lors d’une conférence, le numérique est encore une chimère pour nombre d’élèves partout dans le monde, un univers impossible à explorer faute de réseau, de matériel, de moyens, de pédagogie appropriée. Cette zone blanche ou grise, comment la conquérir ? La question reste posée par temps de crise. Les moyens publics en décrue laissent s’accroitre les différences, les inégalités. Et là, ce ne sont pas uniquement les infrastructures, les équipements qui font défaut. La formation des enseignants s’avère insuffisante lorsqu’il s’agit de faire évoluer ses pratiques dans un univers scolaire qui voit en son sein émerger les particularités et risque l’obsolescence à chaque offensive de la technologie.

 

Krsiten Weatherby, analyste à l’Ocde a présenté lors du forum l’enquête TALIS qui s’intéresse à « l’environnement de l’apprentissage et aux conditions de travail des enseignants dans les établissements scolaires. ». L’étude, menée en 2008 auprès de 24 pays, dont ne faisait pas partie la France, s’est intéressée à plusieurs facteurs dont la formation continue des enseignants, leur évaluation et la gestion des établissements. Ses conclusions sont sans surprise. « Une pédagogie et des enseignants efficaces sont des facteurs indispensables à la formation d’élèves de haut niveau. » Le sentiment d’efficacité des enseignants est directement corrélé à la possibilité de se former et au regard porté sur leur travail. Plus que le mode de gestion de l’établissement, c’est donc la professionnalisation des enseignants qui favorise un enseignement adapté à l’acquisition des compétences du XXIe siècle.

 

Là encore, Bruce Dixon apporte son éclairage. Pour lui, l’accès aux compétences clés du XXIe siècle passe par une consommation critique de l’information et par une construction sociale des savoirs en se nourrissant des savoirs des autres. La publication en ligne rend l’écrit attractif, rénove l’écriture. On publie pour partager, pour être lu, on construit en écrivant dans une exigence de qualité que le regard des autres impose. L’école doit admettre que la connaissance est accessible également en dehors d’elle, parallèlement à son action. Dans ce contexte, le rôle de l’enseignant est primordial. Il doit donner les clés pour décrypter la véracité de l’information, permettre sa transformation en savoir. Les outils changent, apparaissent, disparaissent, se substituent les uns aux autres. C’est aux usages qu’il faut s’intéresser.

 

Confrontés aux panneaux des projets présentés à Lisbonne, les propos de Bruce Dixon sonnent comme une évidence. La publication, la collaboration dans la classe et avec l’extérieur, la combinaison d’outils pour favoriser les usages, la mise en activité des élèves, les ingrédients se retrouvent peu ou prou dans les 80 projets exposés. Un regard rétrospectif sur les forums des enseignants innovants souligne cette convergence progressive vers des pratiques pédagogiques où la construction des savoirs par les élèves est nettement favorisée. De la Serbie au Danemark, de l’Irlande à la Grèce, du Portugal à l’Azerbaïdjan, les principes sont partagés et les interprétations varient. Car convergence ne signifie pas uniformité. L’emprise des systèmes éducatifs nationaux, des référentiels et des modes d’évaluation différents, des politiques publiques éducatives et des investissements reste réel. Alors on s’interroge, l’école du XXIe siècle peut elle se construire par la seule volonté des enseignants, par une innovation sporadique animée par une prise de conscience, une motivation d’un enseignant ou d’un petit groupe de profs à faire évoluer le système ?

 

En temps de crise, l’école peut apparaître comme une danseuse coûteuse et les efforts produits par un pays stoppés nets par la diète budgétaire. C’est le cas du Portugal où aux investissements conséquents succède un régime drastique laissant peu de chance à l’innovation de se développer. Lorsqu’on voit son salaire baisser brutalement, de 15% au Portugal, de 30% en Grèce, comment trouver l’énergie de continuer à innover ? Pourtant les enseignants de ces deux pays présents au forum continuent à y croire, continuent encore ne serait ce que pour l’avenir de leurs élèves. Matthieu Robert, enseignant de sciences physiques au collège de Clamecy, trouve dans son contexte local, rural et économiquement en crise, une source de motivation pour son projet. Développer un projet ambitieux avec des élèves parfois fatalistes quant à leu devenir, permet de changer les perspectives de montrer qu’eux aussi peuvent être de plain pied dans l’innovation, produire des contenus performants et regardés avec considération par d’autres. Il enseigne dans un petit établissement dirigé par un principal qui soutient ses initiatives, pour lui deux atouts qui permettent de compenser un éloignement vis-à-vis du niveau académique. C’est vrai, en regardant tous ces profs rassemblés en huis clos au bord du Tage, on sent toute la fragilité de ce qu’est l’innovation pédagogique, toute l’énergie pour lui permettre d’émerger dans un isolement parfois criant.

 

Les projets présentés ne sont qu’un échantillon de ce que l’école peut produire de meilleur dans une pédagogie qui sait tirer des technologies les moyens de transmettre aux élèves le goût et les voies de l’apprentissage. On aimerait que ces initiatives nourrissent aussi les politiques publiques, qu’enfin la politique en matière d’éducation quitte son caractère descendant pour se mettre aussi au diapason du XXIe siècle. En échangeant avec tous ces profs, on rêve qu’en France, la construction de l’école soit continue et collaborative, que le terme innovation pédagogique ne soit pas galvaudé, récupéré pour masquer l’inadéquation entre les directives, les réformes inspirées d’une école d’autrefois et la pédagogie nécessaire pour accompagner les élèves dans leur diversité vers un futur, vers un présent. La clé réside dans la construction collective des savoirs nourrie par des sources diverses qu’il s’agit de discerner. Notre système éducatif est il en passe de nous la donner ?

 

Le forum de l’innovation pédagogique était européen et cette dimension territoriale est bonne à rappeler. Les échanges entre pays au travers des programmes Comenius et autres e-twining offrent un bol d’air aux projets, une ouverture salutaire pour enrichir les horizons. Le forum de l’innovation pédagogique était organisé par Microsoft dans le cadre de son programme Partners In Learning. Et de cela aussi, il était question dans les discussions. L’éducation est un enjeu qui dans les périodes de difficultés financières est passablement délaissé par les gouvernements. Doit on se résoudre à voir le privé investir massivement l’école pour qu’elle puisse vivre et évoluer ? Microsoft est sans doute la plus voyante firme dans ce type d’entreprise mais elle n’est pas la seule. Apple a lancé une plateforme de contenus, les fabricants de TBI et autres tablettes sont présents aussi. Alors, on se dit tant pis ? Ben non, surtout pas. Et on regarde du côté de l’Europe en espérant qu’émerge enfin une politique commune de l’éducation qui mette l’école à sa juste place : celle d’une cause essentielle pour notre avenir.

Enquête TALIS de l’OCDE

http://www.oecd.org/document/51/0,3746,fr_2649_39263231_40691123_1_1_1_1,00.html

AALF, organisation de Bruce Dixon

http://www.aalf.org/

Qaund les élèves apprenent parce qu'ils apprenent aux autres

Braem Fens, enseignant belge, s’est inspiré des « flipping class » pour organiser sa classe, s’en est inspiré pour en inverser le principe. L’idée des flipping class est de proposer les notions à acquérir sous forme de vidéos à consulter à la maison pour consacrer le temps de classe à des mises en activités de l’élève. Braem Fems propose lui à ses élèves de construire des contenus, d’élaborer des vidéos pour expliquer les cours, vidéos destinées aux autres élèves.

Bram enseigne à des jeunes de 11 à 13 ans pour qui la passivité en cours conduit vers l’ennui. La création de vidéos a le double avantage de stimuler leur créativité et de les amener à creuser les notions. En mathématiques, ils élaborent des présentations détaillant les étapes du raisonnement avec un commentaire oral. Leur démonstration ne sera pas celle d’un enseignant, elle emprunte les voies de leur propre raisonnement. Bram Faems énonce comme principe le fait de respecter ce cheminement.

Les élèves travaillent en petits groupes. Bram est là pour les accompagner, répondre à leurs questions, les aider à résoudre les difficultés qu’ils rencontrent, à repérer les erreurs. Soixante vidéos ont été postées sur You Tube, vues 3600 fois. Pour les élèves, le fait que leur travail soit vu est particulièrement motivant et renforce le niveau d’exigence sur leur propre production. Autre résultat de l’initiative : l’acquisition de compétences numériques est renforcée.

Bram Faens évalue la réussite de son projet aux réactions positives de ses collègues. Progressivement, d’autres enseignants proposent le même type d’initiatives. Mettre les élèves en situation d’enseignants, offrir à l’enseignant un rôle d’accompagnement, les relations dans la classe de Bram s’inversent et se complètent.

Le principe des flipping classroom

http://cursus.edu/dossiers-articles/articles/17805/faut-flipper/

/articles/17805/faut-flipper/

Partagez les étoiles

Anna Galystan enseigne les sciences en Arménie auprès d’enfants de 11 à 12 ans. Elle aime le ciel, les planètes les étoiles et elle a eu envie de partager sa passion avec ses élèves. Elle est même allée plus loin en permettant à sa classe de partager ses découvertes et ses travaux avec d’autres personnes, d’enrichir leurs connaissances par ces échanges impromptus.

Différentes disciplines interviennent dans le projet : l’arménien, les mathématiques, les sciences, les technologies de l’information et de la communication. Différents outils également. Pour explorer le ciel, les élèves utilisent le logiciel worldwide telescope. Ils créent de présentations, des animations, des vidéos pour raconter leurs découvertes. Ils les glissent dans un livre numérique. Aux amis connus et inconnus qui les rejoignent sur leur page Facebook, ils offrent une planète virtuelle en lui donnant leur nom.

Anna Galystan explore les possibilités données par les Tice. Les évaluations sont réalisées avec des QCM illustrés permettant de creuser les réponses, par exemple. Par son initiative, elle souhaite aussi sensibiliser les élèves aux questions d’environnement. « On peut découvrir de nouvelles planètes mais il faut aussi apprendre à préserver la notre » conclut Anna.

World wide telescope

http://www.worldwidetelescope.org/Home.aspx

Le site du projet

http://ohanyan.eiu.am/arm/p

Belle rencontre dans une école en crise

Aujourd’hui, nous avons visité l’école Vasco de Gama, un bel établissement situé dans le quartier du Parc des Nations, avec sur les murs de jolies mosaïques, un hall lumineux et une architecture favorisant le travail. L’accueil était chaleureux, des gâteaux, des jus de fruits, des enseignants et une direction heureux de nous faire visiter l’école.

 

L’établissement accueille des enfants de 3 à 14 ans, souvent issus de milieu aisé puisque l’immobilier dans le quartier est cher, et ceux qui n’habitent pas là ont leurs parents qui travaillent dans le secteur comme cadres. L’école développe nombre de projets innovants en s’appuyant notamment sur les labtops distribués par l’état dans le cadre du programme Magalhès. Au CDI des élèves jouent sur ordinateur, certains sont sur leur page Facebook, d’autres sont rassemblés autour d’une vidéo. Dans la salle de technologie, six élèves s’entrainent avec leurs robots construits en Légo, ils préparent une rencontre avec d’autres écoles. On entend des rires venant d’une autre salle de classe. Un petit groupe d’élèves joue avec des dés et des pierres colorées. Ils sont en soutien de maths. Leurs camarades de classe sont en cours un étage en dessous.

Un peu plus loin, une classe de primaire s’exerce à dessiner des mots et des personnages sur Excel à partir des coordonnées fournies par l’enseignant. Chacun utilise son labtop personnel et tous suivent les indications et les progressions sur le TBI. L’enseignant nous explique un des travaux réalisés : à partir d’images et de phrases piochées sur des cartes, les élèves ont conçu un conte illustré par leurs dessins et ont ensuite réalisé un montage vidéo. L’accompagnement est important aussi. Chaque classe a un coordonateur qui consacre une heure par semaine à recevoir les élèves, à voir avec eux leurs éventuelles difficultés et une autre heure pour recevoir les parents qui le souhaitent.

 

Candida Rosa, enseignante en anglais, nous sert de guide. Le groupe s’étire dans les couloirs mais se rassemble pour regarder l’innovation pédagogique mise en œuvre dans un autre pays que le leur, un autre système, des moyens différents. A la fin de la visite, Jérôme Staub et Elsa Lemoine m’accompagnent pour dialoguer avec Candida. L’école est belle, les pratiques sont là mais la crise a du passer ici comme ailleurs au Portugal.

Candida Rosa nous explique posément que oui, ici aussi les effets de la crise se font sentir. Certains parents quittent le quartier devenu trop cher. Son salaire comme ceux de tous les enseignants a diminué brutalement de 15%, rendant la vie difficile et tout projet impossible. La mesure a été brutale. Partout au Portugal, des classes et des postes ont été supprimés y compris ceux destinés à l’aide aux élèves handicapés. A l’école Vasco de Gama, un élève trisomique ne reçoit plus d’accompagnement spécifique pour sa scolarité. Il est dans la classe se sentant isolé des autres puisque face à des savoirs désormais inaccessibles pour lui. Candida nous précise qu’elle ne fait pas de politique mais elle ne comprend pas pourquoi des sommes ont été englouties dans des programmes de construction qui ne se justifiaient pas. Des écoles ont par exemple été construites pour être fermées peu après, d’autres ont fait l’objet de rénovations sans objet. Et puis il y a toutes ces dépenses somptuaires qui amènent un pays au bord de la faillite, avec une dette que chaque citoyen est sommé de rembourser. Pour elle le Portugal est un petit et pauvre pays, les ambitions ont été démesurées et c’est ce que tout le monde paye aujourd’hui.

Sur le seuil de la porte, Candida nous embrasse.. Nous avons envie de lui dire que son école est belle et que ce que nous y avons vu ne disparaitra pas : une envie d’enseigner et d’apprendre, un bonheur à partager. Mais ces mots nous semblent faibles au regard de l’émotion que nous percevons. Alors nous partons en nous disant à bientôt.

L'eau source d'échanges

Carlos Trincão est coordonateur d’une école primaire dans la ville portugaise de Tomar, « ville des Templiers » nous précise t’il. Il participe avec huit autres classes européennes à un projet Comenius autour du thème de l’eau. « L’eau est vitale pour la planète, elle est importante pour les activités économiques, le tourisme, les religions également ». Le thème est porteur de partages avec d’autres pays, d’autres cultures et la recherche de partenaires sur e-twining a été aisée. Une classe française de l’enseignement spécialisé s’est inscrite dans le projet. Pour Carlos Trincão, la diversité des participants est importante et favorise l’échange, la participation de tous les élèves, y compris ceux qui se sentent peu intégrés dans le système scolaire. Dans son école, 20% des élèves sont gitans, elle accueille aussi quelques enfants migrants.

Le thème de l’eau se décline dans toutes les disciplines : mathématiques, portugais, arts, entre autres. En mathématiques les élèves ont comparé les usages de l’eau entre les différents pays en utilisant un outil commun partagé sur le web. En pratique artistique et numérique, ils ont interprété une peinture grecque en l’adaptant en dessins qu’ils ont ensuite numérisés. Autre production: à partir d’une œuvre originale et avec l’accord de l’auteur, ils ont effectué un travail de réécriture et d’illustrations traduit ensuite en plusieurs langues dont le grec, le gaélique et le turc.. L’ensemble des productions est mise en ligne dans une bibliothèque. Les élèves des différents pays échangent sur skype et se rendent parfois visite. La déclinaison du projet peut être aussi locale. L’an passé, pour la journée de l’eau, les élèves de l’école de Tomar sont allés dire des poèmes à la piscine municipale pour les baigneurs ravis.

Dans l’école, quasiment tous les élèves sont équipés de petits ordinateurs portables, ce qui facilite le travail de communication et de numérisation. Durant les trois dernières années, le gouvernement a pratiqué une politique de déploiement basé sur le volontariat des parents. S’ils en manifestaient la volonté, un portable était fourni à leurs enfants pour le prix de 50 euros s’ils n’étaient pas bénéficiaires d’aides sociales, gratuitement pour les plus démunis et 20 euros pour ceux qui se trouvaient en situation intermédiaire. Le déploiement est aujourd’hui terminé et les restrictions budgétaires ne permettent pas d’espérer une nouvelle vague d’équipement. Carlos gère les portables comme les autres outils, manuels scolaires, compas, par exemple. Il précise quand les élèves devront les amener en classe en fonction de l’activité prévue. Leur usage est entré dans les mœurs pédagogiques.

Le projet Comenius d’une durée de trois ans s’achève dans deux mois. Déjà, les partenaires pensent à la suite dans l’idée de travailler cette fois, sur les monuments, les marques de civilisation. Les élèves de Tomar visitaient le 20 mars des grottes, une visite carrefour entre les deux thèmes : celui de l’eau et celui des traces laissés par l’homme sur les parois.

Carols Trincão ne redoute pas une remise en cause du projet par la crise économique profonde que vit le Portugal. Le financement européen garantit le fonctionnement et l’appui du groupe d’écoles auquel appartient l’école de Carlos montre tout l’intérêt apporté à un projet qui favorise la participation de tous les élèves. La ville des templiers pourra encore accueillir les langues, les accents et les cultures de toute l’Europe dans son école.

Sourire grec

La délégation grecque ne passe pas ici inaperçue avec à sa tête Kostas Dimitriou venu avec son collègue Markos Hatzitaskos à Lisbonne pour présenter son projet. Kostas développe un humour à toute épreuve à propos de la crise économique, de Dominique Strauss Kahn et de tout sujet qui arrive dans la conversation. Mais son projet lui est très sérieux.

Kostas et Markos sont enseignants en sciences dans un établissement privé d’Athènes regroupant 3950 élèves et 480 profs dans le primaire et dans le secondaire. Ensemble, ils animent le projet « from student to student » où les élèves créent les contenus destinés à d’autres élèves. Leurs productions peuventt prendre la forme de présentation, de jeu sérieux ou de vidéo et concernent des disciplines aussi variées que l’histoire, la technologie, la géographie, les sciences sociales ou la technologie. Avant d’être mis en ligne, elles sont évaluées par un enseignant. D’autres enseignants de l’établissement les utiliseront par la suite pour leurs cours.

Lorsqu’on demande à Markos si ce projet ne risque pas de s’éteindre si les moyens affectés à l’école sont écornés, il s’arme d’humour pour répondre « mon école est privée et donc il n’y a pas de problème, pas de problème non plus pour mon salaire ». Mais Markos comme tous les grecs a vu ses impôts augmenter de 30%. Mais cela, il préfère ne pas trop le dire au risque de perdre son sourire.

Le site Internet : http://www.haef.gr/en/fromstudents2students/#main.html

Ambassadrice de la langue française

Gulbéniz Mazahim-Kizi est chargée de cours à l’Universitié des langues d’Azerbaidjan. « Seule enseignante universitaire présente au forum » nous dit elle dans un français impeccable. Gulbeniz enseigne le français et défend l’enseignement de cette langue, « la langue de l’amour ». Son enseignement comprend également un volet de formation des enseignants. Alors, pour mettre en œuvre son projet de développement de la pratique du français à l’école, elle s’est associée avec Naila Hasanova, une de ses anciennes étudiantes, aujourd’hui enseignante en secondaire à l’école n°55 de Bakou.

Le constat des deux enseignantes est simple : les élèves qui apprennent le français, le pratiquent peu, par crainte de ne pas s’exprimer correctement et par manque d’opportunité d’échanges. Pour favoriser cette pratique, elles ont conçu un projet en quatre étapes avec des élèves âgés de 14 à 17 ans autour du thème de la protection de la planète. Chaque étape dure une semaine et vise l’acquisition de compétences différentes en langue mais aussi en communication, en pratique informatique ou dans le domaine du savoir-être. En tout, ce sont 40 compétences qui sont acquises tout au long de l’action.

Gulbéniz Mazahim-Kizi est venue à plusieurs reprises en France, elle y a constaté l’effort réalisé pour la gestion des déchets en particulier dans l’espace public. Elle a donc proposé de travailler autour du thème de la ville propre. Les élèves ont dans un premier temps collecté les données, créé un agenda commun pour les partager. Ensuite, ils ont mis au point des messages et des activités pour sensibiliser les habitants de leur ville et en particulier les jeunes sur la gestion des déchets au quotidien, l’utilisation des poubelles par exemple. Deux enseignants français sont venus leur rendre visite. Les élèves ont posé des questions qu’ils avaient préparées à l’avance sur le développement durable et les initiatives prises en France dans ce domaine. Enfin, en dernière étape, ils ont partagé par écrit avec des élèves français. Cet échange a abouti à la création d’une page Facebook pour laquelle ils appellent d’autres classes de France, d’Azerbaïdjan et d’ailleurs à venir les rejoindre.

Pour Gulbéniz, ce projet est le premier d’une longue série à naître. Pour l’année prochaine, elle prévoit un stage de ses étudiants à l’école n°55 de Bakou où ils pourront observer et partager les pratiques de Naila Hasanova. Elle aime la langue française et ne se résout pas à la voir devenir obsolète dans les programmes d’enseignement. Elle dirige une revue « le français en Azerbaïdjan » dont l’Ambassade de France finance les frais de publication. Elle y rassemble les initiatives et les témoignages d’autres enseignants mordus comme elle de la langue française. Les uns et les autres y contribuent bénévolement.

Pour que ses projets respirent et perdurent, pour que les élèves azéris continuent à apprendre activement le français, Gulbéniz recherche des classes françaises de tout niveau qui pourraient échanger et participer à des projets sur des thèmes touchant le développement durable ou autres.

Contact : lefrancaisenazerb@yahoo.com

 

Avec art, contrer le harcèlement

Maria Demetriou Neofytou est enseignante en arts dans une école élémentaire de Nicosie en Chypre. Dans son école comme dans tant d’autres, les pratiques de harcèlement, bénignes ou affirmées, se sont installées. Stigmatisations verbales, insultes par messagerie instantanées, elles se multiplient sans que les adultes sachent à temps ce qu’il faut faire pour les contrer. Maria est convaincue que l’art est un moyen de modifier les perceptions négatives que l’on a de soi, perceptions à l’origine du harcèlement ou objet même des vexations. Elle a demandé à ses élèves âgés de 10 et 11 ans de se représenter en dessin avec une expression d’émotion. Que ressent on lorsqu’on est touché par un sentiment négatif ou positif? Quel visage a-t-on à cet instant ?

A partir des dessins, ils ont construit des images puis des animations associant le son pour réaliser des courts métrages contre le harcèlement. Pour la partie technique, une enseignante en science a apporté son appui, apprenant aux enfants à se servir des différents logiciels. Le travail a été montré aux autres classes, aux parents aussi. Chacun a été invité a évaluer les réalisations en regardant en quoi elles contribuent à sensibiliser au phénomène du harcèlement.

Pour Maria Demetriou Neofytou, l’objectif était aussi de produire un message positif à partir de sentiments qui le sont beaucoup moins. L’association de l’art et de la technologie favorise la créativité, permettant à chacun de s’exprimer, de prendre du recul par rapport à ses propres impressions en les exposant et en les partageant. La notion de partage est importante et le succès de son initiative se traduit par le nombre d’évaluations reçues de la part des parents et des autres élèves de l’école.

Bem-vindo a Lisboa

L’endroit est splendide quoiqu’un peu désincarné, une pincée de modernité architecturale au bord de l’Océan, un vestige entretenu des splendeurs de l’exposition universelle de 1998, le PIL se déroule au FIL, dans les modernes perspectives du Parque das Nações.

Pour ce forum, l’Europe est conviée dans une acception large, de l’Italie à l’Azerbaïdjan, du Kosovo à la Norvège. Lisbonne désignée capitale de l’innovation pédagogique ouvre plus grands ses bras que le drapeau européen. Ville de voyages, ce que le métissage éducatif dans une ville en crise donnera comme couleurs, on a hâte de le voir : une teinte technologique, une dominante pédagogique, une ouverture ou un retour vers l’académique. Les forums internationaux ont cette utilité aussi : traquer au revers des affichages standardisés, la note unanime ou la touche originale, ce qui fait sens commun et ce qui se démarque.

L’Europe définit une politique éducative, bonnes intentions, bonnes pratiques, un programme communautaire qui en définitive imprègne encore faiblement les politiques nationales. Les enseignants inventent t’ils cette internationale éducative où les principes de base favoriseraient les interprétations locales Dans les innovations présentées par les enseignants au forum européen partners in learning, sans doute lirons nous des solutions trouvées pour bâtir le futur, architectures audacieuses pour favoriser les apprentissages.

Et puis lorsqu’on quitte le Parque das Nações, belle vitrine d’un rêve d’expansion, les pas nous mènent vers le vieux Lisbonne, ses rues où l’histoire se lit et où les murs reflètent les inquiétudes contemporaines. La crise est là affichée dans un appel à la grève nationale le 22 mars. Cette juxtaposition d’une vision futuriste et d’une réalité implacable donne aussi le ton d’une éducation partout en proie aux difficultés de l’époque : à la fois source de l’avenir et victime collatéral de la rigueur budgétaire. Alors, oui, l’endroit est bien choisi, Lisbonne incarne les courants contradictoires auxquels sont soumis les systèmes éducatifs européens.

Le projet de Jerome Staub : Paysages sonores et cartographie du bruit: pour découvrir l'espace urbain à partir d'appareils mobiles

Peux tu te présenter ?

Je suis professeur d'Histoire-Géographie depuis une petite dizaine d'années, dans l'académie de Limoges à Saint Yrieix La Perche, en collège et lycée. Je suis également enseignant associé à l'IFE-ENS LYon, groupe Eductice-S2HEP où je m'occupe de géomatique. Le travail autour d'espaces et sonorités s'inscrit dans cette démarche.

Quel projet vas-tu présenter à Lisbonne ?

A Lisbonne, nous allons proposer un travail autour de l'écoute de la ville grâce à des outils mobiles, découvrir les bruits et les sons d'un espace urbain et essayer d'analyser l'espace urbain à partir de ces sons collectés. La dimension pollution sonore est également présente puisqu'elle est la première approche du son par les agglomérations urbaines.

Comment t’es venue l’idée de ce projet ? Qu’est ce qui l’a motivé ?

Ce projet est issu d'un travail commun lors d'IDD avec mon collègue d'éducation musicale Vincent Marsick autour de la création multimédia d'un paysage alliant images et sons. Depuis, nous avons monté plusieurs projets autour de l'écoute des espaces dont fait parti ce travail.

Quels moyens mobilise t’il ?

Il mobilise essentiellement des outils mobiles utilisés en sortie de terrain (smartphones, tablettes numériques) et une salle informatique pour créer la cartographie et le rendu d'expérience.

Quel objectifs vise t’il ?

Il a plusieurs objectifs:

· travailler différemment le cours de géographie de seconde sur l'espace urbain en partant non pas de l'image mais du son et réussir à monter une analyse intéressante à partir de cette entrée.

· Mettre en avant l'importance de la géographie de l'espace vécu et sa traduction cartographique grâce à des outils en ligne.

· Créer un travail collaboratif dans la mesure où il implique deux classes de seconde qui ont des travaux différents à effectuer mais avec un objectif commun.

· Développer l'attention des élèves à l'écoute, à leur propre écoute des bruits et des autres

· Envisager un début de prévention face à la pollution sonore et aux niveaux sonores auxquels les élèves peuvent être exposés.

· Réfléchir aux usages des outils nomades (notamment les téléphones portables et les tablettes) dans le milieu scolaire en particulier au cours des sorties de terrain.

Qu’attends tu de ce forum ?

Ce forum est un magnifique rassemblement d'enseignants aux projets les plus variés avec lesquels on pourra dialoguer, échanger, réfléchir...Bref, créer des liens.

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