Le Figaro
du 2 février rend compte de manière originale de la publication, par
l’historien Jacques Marseille, d’un nouvel ouvrage : « La guerre des deux
France ». Le quotidien publie le texte d’un débat contradictoire entre
l’auteur et Elie Cohen. Pour J. Marseille, les années post 1973
correspondent à de « Nouvelles Trente Glorieuses » aussi prospères que les
années 1945-1973 : » Si les premières Trente Glorieuses ont permis, entre
1945 et 1973, un triplement du niveau de vie des Français, les nouvelles
Trente Glorieuses ont aussi pavé la voie à une augmentation du pouvoir
d’achat de plus de 50% ! « Pourquoi alors parler des « Trente Piteuses » ?
Parce que, selon lui, toute une partie de l’opinion française vit dans le
mythe. » Les mythes nous influencent plus que les réalités. C’est à un
mythe tenace – l’idée d’une paupérisation de la France et d’un déclin absolu
– que j’ai voulu consacrer l’essentiel du livre. Ces représentations sont…
fausses : il y a beaucoup moins de pauvres aujourd’hui qu’il y a trente ans
et ces pauvres ne sont plus les mêmes. En 1973, les pauvres étaient pour
l’essentiel les personnes âgées. Aujourd’hui, ce sont principalement les
jeunes ou les victimes des dégâts de la vie. C’est que la pauvreté n’est
plus principalement liée à la conjoncture économique, mais à l’exclusion
sociale et à la marginalisation. Mais alors qu’il existe une France qui
avance et dont on peut facilement mesurer les progrès, la majorité des
Français est persuadée que la France s’enfonce dans la pauvreté. Un mythe
qui les décourage et les rend amers, alors qu’ils devraient se féliciter de
nos performances qui sont, elles, bien réelles. » Aussi dénonce-t-il
cette France qui tirerait le pays vers le bas. Pour Elie Cohen, » la
France est en train de devenir une économie de services avec une conscience
malheureuse d’être une économie de services. La condition de cette mue
exceptionnelle a été le développement d’un Etat amortisseur social. Songez
par exemple que la sidérurgie est passée en vingt ans de 185 000 emplois à
35 000. Comment voulez-vous gérer un dégonflement aussi massif, sans la mise
en place de dispositifs majeurs d’accompagnement ? Ce que vous écrasez de
votre mépris, c’est l’ingénierie sociale qui a rendu, cahin-caha,
humainement supportable cette formidable transformation économique ».
Article du Figaro