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Egalité des chances, méritocratie et justice sociale Il relève que « dans le monde du marché, la croyance est la même : la prise de risques, les responsabilités et le travail doivent être sanctionnés parce qu’ils mesurent le mérite de chacun. On croit d’autant plus à l’égalité des chances et au mérite que l’on pense souvent que cette forme de justice est efficace : les élites sont les meilleures possibles, chacun est à la place qui lui convient, chacun a intérêt à être efficace, ce qui contribue à l’efficience collective et à «la richesse des nations» ». Pourtant, pour lui, l’égalité des chances peut être source d’injustice. » La lutte pour l’égalité des chances ne peut pas faire l’économie du combat pour la réduction des inégalités sociales, des inégalités des positions et des ressources. Non seulement c’est la meilleure manière de se rapprocher de l’horizon de l’égalité des chances lui-même, mais c’est aussi la seule façon d’offrir des garanties et une égalité sociale fondamentale à ceux qui échouent dans la compétition égalitaire, fût-elle juste. Autrement dit, il faut définir les inégalités tolérables engendrées par l’égalité des chances et définir les biens, la dignité, l’autonomie, la santé, l’éducation… qui doivent être offerts à chacun indépendamment de son mérite et, surtout, de son absence de mérite. En ce sens, la gauche ne saurait totalement attacher son projet et son destin à celui de l’égalité des chances car, même s’il devenait juste que certains soient plus mal payés, plus mal logés et plus mal instruits que d’autres, il serait injuste qu’ils soient trop mal payés, trop mal logés et trop mal instruits. Pour être justes, les conséquences inégalitaires de l’égalité des chances et de la méritocratie doivent donc être sérieusement limitées…. Travaillons d’autant plus à la réalisation de l’égalité des chances que nous en sommes loin, mais craignons que ce mot d’ordre écrase aujourd’hui toutes nos conceptions de la justice et, plus immédiatement, qu’il écrase un débat politique où la gauche et la droite semblent partager les mêmes liturgies. Craignons aussi qu’un horizon aussi ambitieux ignore ses propres faiblesses et engendre des déceptions dont nous aurons beaucoup de mal à nous remettre. Même juste, l’égalité des chances implique mécaniquement qu’il y ait des vaincus, or la justice sociale consiste plus à se placer de leur côté qu’à s’assurer de l’équité de leur échec ». Ségrégation scolaire et sociale : deux études de la DEP Changeant d’échelle, une autre étude identifie les établissements sélectifs. « Un quart des lycées a des élèves de seconde dont les caractéristiques sociales et scolaires sont significativement différentes de celles de l’ensemble des élèves issus des collèges qui les alimentent » affirme l’étude de la DEP. Elle identifie trois types d’établissements particulièrement sélectifs : de grands lycées généraux publics de centre-ville dotés de CPGE, des lycées généraux privés de petite taille implantés dans des villes moyennes, des petits lycées privés franciliens. Inversement les lycées technologiques accueillent plutôt des élèves défavorisés. Profession : prof Forces et faiblesses de l’école rurale en Haute-Corrèze Ils décrivent un système éducatif dispersé et écartelé où les établissements secondaires se livrent à une véritable « chasse à l’élève » tant celui-ci se fait rare. Mais on retiendra particulièrement l’évaluation des écoles, souvent regroupées en Réseaux de réussite éducative (RRE). « La très petite taille des structures constitue un atout pour une application, presque « spontanée », de la politique des cycles, notamment en cycle 2. Dans les écoles où une classe unique accueille en général tous les élèves d’un même cycle (cycle 2 pour l’école de Saint-Etienne-aux-Clos, cycle 3 pour l’école d’Aix), il n’existe pas de strict cloisonnement entre les trois niveaux de classe. Le maître peut ainsi adapter sa pédagogie aux aptitudes des élèves, les meilleurs participant aux activités de la classe supérieure, les moins bons confortant certains acquis de la classe antérieure. Cette souplesse permet sur trois ans d’éviter la plupart des redoublements ou des maintiens en cours ou en fin de cycle ». L’efficacité n’est pourtant pas uniforme. » Les petites structures d’enseignement constituent un atout incontestable, notamment au cycle 1 et au cycle 2, pour la prise en charge des élèves en difficulté. Le suivi individualisé évite les décrochages et permet une application judicieuse de la politique des cycles. Pour les élèves moyens et bons, en revanche, l’avantage est beaucoup moins évident, et le taux de réussite global n’est pas meilleur (voire parfois inférieur, à l’entrée en 6ème) à celui qui prévaut dans des territoires moins ruraux. Il est difficile néanmoins, dans ce taux de succès, de faire la part de ce qui relève des déterminants socioculturels de la population et de ce qui relève des structures d’enseignement elles-mêmes ». Une évaluation qui devrait sourire aux partisans des petites structures rurales. Plus sombre est le diagnostic en ce qui concerne l’intégration des TICE. » Bien que la plupart des écoles et l’ensemble des collèges soient correctement équipés en matériel informatique, le brevet informatique et internet (B2i) demeure, pour beaucoup d’acteurs, enseignants comme élèves, un « objet éducatif non identifié », qui n’a quelque chance de prendre forme et sens que si le chef d’établissement, ou parfois un enseignant, s’attache personnellement à sa mise en œuvre ». Le corps à l’école Jacques Nimier propose des approches différentes. Ainsi André Giordan appelle à mieux connaître son propre corps. » L’enfant est souvent dans l’étrangeté par rapport à celui-ci. Une » éducation corporelle » peut rendre le corps (son corps) plus familier à travers ses sensations, ses émotions, ses désirs ? Comment les reconnaître ? Les ressentir ? Les connaître de l’intérieur ? En dépasser les tensions ? La place du plaisir lié à un rapport ludique d’échanges avec l’environnement ou avec l’autre, ses stress, ses frustrations sont d’autres accroches pour mener des activités. Comment les apprivoiser ? Les positiver ? Les exprimer ? Les partager ? La personne se trouve carrément évacuée, voire niée, dans l’enseignement actuel ». Jeanne Moll évoque le désir inconscient y compris le désir d’enseigner. » Le désir d’enseigner et /ou d’éduquer s’origine le plus souvent dans l’identification inconsciente de l’enfant d’autrefois à un maître ou une maîtresse qui lui semblait détenir un immense pouvoir sur la classe . La fascination d’alors est venue satisfaire, dans un premier temps, la pulsion d’emprise lorsque l’enfant s’est mis à vouloir toujours jouer à l’école avec ses camarades qu’il régentait à plaisir ». Didier Martz évoque le « corps altéré » celui du handicap. » « Handicap, Handicapé, dément, malade ». Ce sont d’abord des mots, des abstractions qui tentent de désigner quelque chose, quelque chose de perçu d’abord avant d’être nommé. Qu’on perçoit, non pas comme » handicapé » ou comme » handicap » – ça, c’est le mot, la catégorie qui vient après, qui vient recouvrir ce qu’on perçoit – mais comme différent, comme » pas pareil « . Quel socle commun ? L’actualité récente semble lui donner raison. On sait déjà que la mise en apprentissage à 14 ans décidée par le gouvernement Villepin écartera du « socle commun » une partie des jeunes des banlieues pauvres. Autrement dit, le « socle commun » est mort cet automne avant d’avoir été défini. Inutile alors ce numéro des Cahiers ? Certes non. D’une part parce que le socle (presque) commun va être défini et mis en œuvre. D’autre part parce qu’il invite à réfléchir sur les objectifs du système scolaire. Philippe Perrenoud analyse le socle comme un avatar des inégalités sociales. « Pour concevoir une éducation de base qui préparerait à la vie, il importerait d’ancrer le curriculum dans une analyse des pratiques sociales ordinaires, pour répondre à la question décisive : de quelles connaissances et compétences les jeunes de demain auront-ils besoin pour être des citoyens à part entière dans la société… Or le curriculum actuel joue le rôle de socle pour une autre statue, celle des études longues, de la formation d’une élite. Ceux qui prétendent qu’on peut faire « d’une pierre deux coups » sont naïfs ou malhonnêtes. La citoyenneté exige un autre équilibre des disciplines et la relégation au second plan de ce qui n’est que propédeutique des études longues. Si le débat sur les socles… n’aborde pas ce problème, ce n’est qu’un trompe l’œil ». Et c’est la grande force de ce numéro que d’avoir réussi à lier étroitement les réflexions de chercheurs et celles d’enseignants de terrain. Il n’oublie pas les TICE. Ainsi Mario Asselin montre comment, au Québec, en s’axant sur l’apprentissage des compétences à travers le portfolio électronique, il réussit à élever le niveau de connaissances. « Les parents constatent que les jeunes ont besoin de savoir (connaissances) pour bien agir (compétences). Et ça les rassure ». Bruno Devauchelle analyse l’expérience du B2i comme un précurseur de la notion de socle commun. Violence scolaire : faire confiance aux parents Ce qui ne l’empêche pas de signaler la montée de la violence. « Notre pays se distingue par une montée de la violence anti-institutionnelle plus forte qu’ailleurs. Une des impasses françaises réside également dans le fait que l’établissement scolaire est déconnecté de la communauté de voisinage. Or, la proximité de l’école par rapport au quartier est un des points forts de la lutte contre la violence scolaire. Nous sommes au contraire dans une crispation identitaire de l’institution, des enseignants. Plus qu’ailleurs, ceux-ci expriment une méfiance à l’égard des parents d’élèves. Au lieu d’avoir une action commune, on recherche un coupable. On se prive ainsi des meilleurs alliés possibles ». Violence scolaire : des solutions ? Diplômes et inégalités « Cette inflation des diplômes est plus destructrice que formatrice. Elle rend les jeunes très utilitaristes… Les diplômes sont déclassés, sauf dans les grandes écoles. Ceux qui ont des diplômes plus élevés que leurs parents n’accèdent pas à des positions sociales plus intéressantes parce que le «rendement» de ces diplômes sur le marché a baissé ». Elle demande donc qu’on encourage les jeunes à monter des projets personnels plutôt que poursuivre des études supérieures. Cette critique de la démocratisation scolaire, Marie Duru-Bellat l’avait déjà faite dans une communication à Dublin en septembre dernier. » On peut se demander si une politique d’allongement de la scolarité est efficace pour réduire les inégalités sociales. On est amené à y voir plutôt une contre-réforme, donnant un peu plus aux défavorisés et la possibilité de rester au sommet aux plus avantagés. Etendre l’éducation est justement ce qui permet le maintien des inégalités sociales ». Son raisonnement s’articule en trois points : la distribution des diplômes demeure inégalitaire (85% des enfants de familles favorisées ont le bac contre 23% des enfants de parents inactifs), les diplômes se dévaluent avec leur massification, la mobilité sociale ne dépend pas que des diplômes, avec le même bagage les jeunes ont des chances inégales. |
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