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Ancien inspecteur d’académie, auteur de remarquables ouvrages sur l’orientation, Bruno Magliulo est à même de décrypter pour les parents les pièges de l’orientation.

Le site officiel Eduscol montre une certaine amélioration de la situation dans le passage collège – lycée (par exemple une baisse des redoublements). Partagez vous cette vision optimiste ou, compte tenu du taux d’échec en seconde, est -ce reculer pour mieux sauter ?

Le ministère de l’Education nationale s’est résolument engagé dans une politique de réduction des taux de redoublements (aux paliers troisième et seconde), avec redéploiement d’une partie des moyens au profit de l’accompagnement individualisé ou en petits groupes des élèves en difficulté. On imite en cela des pays voisins qui, de longue date, contrairement au système français, pratiquent une telle politique éducative.

Le risque, concernant le passage en seconde est en effet que les échecs y augmentent. Pour éviter cela, il faudra évidemment que la même politique d’accompagnement individualisé, plutôt que de redoublement,soit appliquée en seconde. Il faudra surtout que les moyens que la baisse des taux de redoublement permettra d’économiser, soient en grande partie redéployés au profit du financement de l’accompagnement individualisé des élèves et non simplement récupérés par le ministère

Les familles ont souvent bien du mal à comprendre le fonctionnement de l’Ecole. Comment peut on les aider à mieux communiquer avec les enseignants ? D’ailleurs un parent peut-il communiquer avec un conseil de classe ?

Les parents sont représentés au sein du conseil de classe par les délégués des parents, élus par leurs pairs. Peut on faire mieux ? Certains établissements, dans le cadre de leur autonomie, ont décidé d’associer tous les parents aux délibérations du conseil de classe. On peut aussi œuvrer en faveur d’une amélioration de la communication et du dialogue parents/équipe éducative, tout particulièrement en faveur des parents les moins favorisés, ceux qui ont hélas tendance le moins s’investir dans ce dialogue. Un parent peut toujours être reçu par le professeur principal avant la réunion du conseil (après aussi bien sur), et peut aussi faire connaître un point de vue aux délégués des parents qui vont les représenter.

Pourquoi est-ce si difficile les échanges famille – Ecole ? Pourquoi sont-elles si peu présentes dans les établissements ?

Forte résistance traditionnelle du milieu enseignant à ce que certains d’entre eux qualifient « d’entrisme » des parents d’élèves. Crainte essentielle : perdre de la liberté pédagogique, perdre du pouvoir de décision en matière d’orientation, fréquente réprobation devant l’évolution du métier d’enseignant que cela suppose (plus de participation des parents à la vie de m’établissement c’est obligatoirement plus de temps de présence des enseignants dans l’établissement

Côté parents, force est de constater que si les familles des milieux aisés s’investissent fortement dans ce dialogue, et revendiquent une plus grande présence des parents dans la vie de l’établissement, il n’en va pas de même du côté des familles les plus défavorisées, pour qui l’école représente un monde trop souvent « étranger » , dont ils ne dominent pas les codes, qu’ils craignent aussi. C’est du côté de ces derniers qu’un effort particulier doit être accompli en vue de mieux les associer

Si l’on souhaite que son enfant, très moyen, aille en seconde générale , que peut-on faire pour l’aider ?

L’inciter à travailler plus pour cesser d’être très moyen, mais aussi, mettre plus systématiquement en place des structures d’accompagnement individualisé des élèves en difficulté, au sein de l’établissement, et non en laissant aux familles le soin de rechercher ce soutien à l’extérieur de l’établissement , quitte à y renoncer quand elles n’ont pas les moyens financiers nécessaires pour pouvoir accéder à cette « deuxième école », strictement privée celle là.

Comment déceler que son enfant sera mieux en lycée professionnel ?

Les formations de type « découverte professionnelle » (DP 3h, DP 6h) visent à cela, de même que la multiplication des possibilités de faire un stage durant l’année scolaire de troisième. Mais compte tenu du fait que dans leur quasi totalité, les professeurs de collège sont des enseignants issus du général, et non du technologique ou du professionnel, il est important de compenser cette insuffisance par des partenariats collège/lycées pros, dans le but de faciliter l’information des familles sur ce secteur d’études secondaires.

Quand on est parents comment soutenir efficacement les enseignants ?

Par le dialogue permanent, pour que les uns et les autres se comprennent mieux. Un professeur doit pouvoir expliquer à des parents ce qu’il pense de leur enfant, un professeur doit pouvoir être informé par les parents de certaines choses susceptibles d’expliquer ce qui se passe en classe. Sans dialogue chacun est dans sa bulle.

A la fin d’une troisième vaut-il mieux redoubler pour asseoir son niveau ou tenter une seconde ?

Il n’y a évidemment as de réponse « standard » : elle dépend de la situation propre à chaque élève. Il faut cependant prévenir les parents qu’un redoublement, en France, se faisant (pour le moment) dans des structures pédagogiques identiques, un redoublement risque de ne pas servir à grand chose, même quand il est volontaire.

Il faut que l’élève soit convaincu qu’il faut qu’il profite de cette occasion pour « passer la vitesse supérieure », sinon, son avantage de début d’année scolaire en tant que redoublant va vite s’estomper, et il y a risque qu’il soit à nouveau en perdition, donc que le redoublement ne serve à rien .

Entretien François Jarraud

BrunoMagliulo

Animateur bénévole du blog de l’orientation :

http://conseilsdeclasse.letudiant.fr

Auteur, dans la collection L’Etudiant, de :

100 questions/réponses pour bien s’orienter

– Pour quelles études êtes-vous fait ?