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Par Françoise Solliec

Depuis quelques années, les constructeurs proposent des formules de classe informatique « clés en mains » comprenant un ensemble de portables, une station de chargement et un réseau Wi-fi permettant l’accès Internet. Diverses expérimentations mettent en lumière des choix et des situations relativement différents.

Dans l’académie de Créteil, le choix avait été fait en 2005 d’acquérir trois classes de 30 portables (avec serveur Kwartz) et de les prêter à des collèges pour une durée suffisamment longue (de 6 semaines à 3 mois). Le nombre des ordinateurs permettait à chaque élève d’utiliser individuellement un poste informatique, facteur qui s’est révélé essentiel dans les bilans d’utilisation. La mise en réseau, réalisée au travers du serveur, a toujours été relativement complexe et a supposé, pour être pleinement fonctionnelle, un accompagnement permanent des équipes d’animation TICE de l’académie Dans les établissements où le coordinateur TICE n’a pas de compétences réseau approfondies, déclare Michèle Monteil, chargée de suivre l’expérimentation à la Datice Créteil, « l’expérience n’a pas été concluante, le dispositif est souvent apparu comme compliqué, difficile à mettre en œuvre voire peu fiable ». Cela démontre l’importance du choix de la solution technique, qui doit pouvoir satisfaire des utilisateurs encore peu avertis.

Pourtant, déclare Michèle Monteil dans l’article qu’elle a écrit pour les dossiers de l’ingénierie éducative à ce sujet, « la classe nomade a permis un usage plus intense et plus individualisé des TICE pour les élèves, elle a rallié à la cause des TICE des enseignants jusque-là réticents. Elle a considérablement augmenté l’autonomie des uns et des autres face à l’outil et montré l’intérêt des réseaux dans les établissements. Les pratiques développées ouvrent naturellement la voie vers les usages des ENT comme prolongation des réseaux de l’établissement vers le domicile et les familles. Elle met en lumière le besoin de formation et d’accompagnement des enseignants ».

Dans l’académie de Versailles, les bilans d’expérimentation sont également contrastés, notamment sur les aspects techniques.

« En ce qui concerne les classes nomades, elles sont bien souvent fixes car, soit le wifi ne fonctionne pas, soit c’est toujours le même professeur qui l’utilise. De nombreux soucis d’ordre technique ont découragé les collègues sans compter les temps de préparation du matériel à chaque cours (installation, allumage des PC environ 7 à 8 minutes en début de séance, etc.) » relève-t-on par exemple dans les observations, alors que les usages sont plutôt connotés positivement. « La classe nomade Apple est depuis son arrivée au lycée intensément utilisée par un professeur d’histoire-géo, qui l’utilise en particulier pour créer des podcasts. »

Au lycée Le Corbusier de Poissy (78), la classe nomade (Apple, une vingtaine de portables, une imprimante et un videoprojecteur) a été utilisée essentiellement par des professeurs de lettres et de langues, en complément des salles multimédias. Le coordonnateur TICE, François Lermigeaud, a pointé dans son rapport d’utilisation la grande souplesse du dispositif.

« L’apport de la classe nomade est de permettre de mettre en place une activité sur ordinateur dans le cadre d’une séance classique, même pour une courte durée. On peut alors très facilement prolonger le cours avec un questionnaire, une activité de recherche ou de rédaction : les élèves travaillent en binôme sur ordinateur ce qui leur permet d’élargir ou de s’approprier une notion que l’on vient d’aborder. C’est aussi l’occasion pour le professeur d’aborder des points de méthodologie et de montrer aux élèves comment rechercher l’information sur Internet et comment utiliser les ressources qu’on y trouve ».

La classe nomade peut aussi répondre à des situations de travail au quotidien. Ainsi, en grec ou en latin, les élèves utilisaient les ressources pédagogiques du projet Helios, « un véritable manuel en ligne ». « La classe nomade est alors un outil très utile qui permet de gérer des groupes très hétérogènes ».

Classe nomade ou salle informatique ? Pour François Lermigeaud, « la question mérite d’être posée : les fonctionnalités offertes par les deux outils sont très proches, mais une classe nomade est sensiblement plus chère et techniquement plus fragile ».

Il s’agit de plus d’un matériel très attractif, facile à voler (plusieurs vols ont effectivement été signalés par les établissements).

« Néanmoins la classe nomade a des atouts :

La mobilité permet d’équiper des zones de l’établissement sans câblage. Toutes les équipes pédagogiques peuvent l’utiliser quelle que soit leur localisation dans les bâtiments

Les portables, utilisés en salle de classe, facilitent la concentration des élèves et le travail sur papier et sur ordinateur : on conserve l’organisation habituelle, le même plan de classe, les mêmes accessoires…

La classe nomade encourage l’utilisation de l’outil informatique de manière ponctuelle et complémentaire aux activités habituelles, elle enclenche une réflexion méthodologique sur l’utilisation raisonnée des tice ».

On peut donc penser qu’avec l’impulsion donnée par le ministère dans le cadre de l’équipement des écoles numériques rurales et l’évolution des portables peu chers du type Asus, la classe nomade a de beaux jours devant elle et qu’elle permettra au numérique d’être de plus en plus présent dans les classes.