Par François Jarraud
Alors qu’on parle d’instituer des « préfets des études », que le gouvernement aborde la question de la violence scolaire et de l’absentéisme sous le seul angle de la répression, les CPE s’interrogent sur leur avenir et celui de leur métier. Mercredi 5 mais, le Snes organisait à Paris un colloque sur « les CPE au cœur de l’action éducative » pour réfléchir sur l’évolution du métier et clore un cycle revendicatif qui devait conduire les CPE au ministère dans l’après-midi.
Le CPE est-il le bras droit ou le bras gauche du chef d’établissement ?
Cette jolie formule c’est Elodie Hazambourg, CPE et formatrice, qui l’a posé à la salle. Le bras droit, tout le monde voit ce que c’est et un projet de texte en négociation entre le ministère et des syndicats de chefs d’établissement définissent le CPE en ce sens, comme un membre de l’équipe de direction. Une perspective qu’E. Hazambourg réfute au bénéfice du « bras gauche ». Le bras gauche c’est celui de l’inventivité, de l’irrationnel, de la réflexion. Pour elle, la journée du CPE ce n’est pas « faire appliquer la loi mais traiter mille et une choses inattendues », par exemple intervenir quand les comportements risquent de basculer, saisir ces situations pas clairement identifiables pour en faire un moment d’éducation. C’est aussi inventer des sanctions, conseiller un peu tout le monde mais suivre chaque élève. C’est une position éthique et non une strate hiérarchique.
C’est sur éthique aussi qu’Eric Siré, CPE et formateur, amène le débat. Pour lui le CPE est un éducateur pas un régulateur. Il doit être loyal envers le chef d’établissement en tant que fonction et ne pas perdre de vue sa loyauté envers la République.
C’est cette posture éthique que Loïc Clavier, maitre de conférences à l’IUFM des Pays de la Loire, craint de voir disparaître avec la nouvelle formation des CPE. Celle-ci, avec son compagnonnage, enseigne une façon de se tenir, un conformisme et non une attitude réflexive sur le métier.
Entre familles et école
Entre familles et école il y a souvent le CPE. C’est ce que montrent les travaux de Martine Kherroubi, MC Iufm de Créteil, et Yves Careil, MC IUFM de Bretagne.
C’est que la place des familles reste encore fortement marginale dans l’Ecole. Martine Kherroubi a pu montrer comment l’ecole peut arriver à nouer le dialogue avec les familles. Il faut nécessairement travailler sur la relation asymétrique qui existe entre parents et institution scolaire, apprendre à sourire, à accueillir pour faire des parents des alliés. Un des enjeux de l’école c’est justement de construire des relations avec les parents. Elle invite les CPE à réfléchir au fait que l’Ecole laïque s’est construite en réaction contre les gens d’Eglise qui se mêlaient de la vie familiale. Les familles ne veulent pas que l’école se mêle de leurs affaires.
Pour Yves Careil, l’école publique est en train de se transformer pour devenir une école néolibérale, travaillant pour les familles favorisées. « Tous les acteurs de la vie scolaire, malgré leur bonne volonté, structurellement se retrouvent dans l’étau d’une double montée du communautarisme anti-gaulois et du « communautarisme des bien pensants », celle de la nouvelle bourgeoisie bohême.
Maintenir la spécificité française
« Le CPE est uns spécificité française que le gouvernement veut supprimer pour faire des économies », affirme Daniel Robin, co-secrétaire général du Snes. Le Snes dénonce un recrutement insuffisant en nombre et en qualité, et la menace d’évolution du métier. Dans l’après-midi il devait être reçu rue de Grenelle.
Liens
Le programme
http://www.snes.edu/IMG/pdf/Colloque_CPE_5_mai_2010.pdf
CPE un métier social ?
http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2007/10/08102007Accueil.aspx
Familles et écoles, Martine Kherroubi
http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/leleve/Pages/2008/93_EntretienavecMartineKherroubi.aspx