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Par Françoise Solliec

Comment gommer pour les élèves les inégalités sociales et territoriales qu’ils subissent ? Comment les aider à leur faire acquérir les codes qui leur permettront de bénéficier au mieux du système éducatif ? Inscrit dans le projet éducatif départemental du Val de Marne, l’observatoire de la réussite et des inégalités scolaires veut répondre à ces questions.

Il est nécessaire pour les collectivités locales d’intervenir sur les inégalités sociales et territoriales, affirme Alain Desmarest, vice-président du conseil général du Val-de-Marne, à la réunion de lancement de l’observatoire régional, le 5 décembre 2011. Les enfants de familles défavorisées n’ont pas la possibilité d’agir sur le monde qui les entoure et beaucoup d’entre eux quittent prématurément le système scolaire à la fin de la seconde. Cependant projeter ces élèves vers le haut et recréer de la mixité scolaire n’est pas chose facile. « Ces élèves ne tirent-ils pas les classes vers le bas, demandent les parents ? »

Il n’y a pourtant pas de fatalité à cette situation, estime Alain Desmarest. Il faut défendre l’école républicaine, même si son contenu et ses objectifs doivent être revisités. De nombreux élèves arrivent aujourd’hui avec un handicap social et culturel ; ils ne possèdent pas les codes. L’école aggrave ces inégalités. Il a donc paru nécessaire d’agir sur l’environnement social des collèges, des collégiens et des familles valdemarnais.

Pour cela, un projet éducatif départemental a été défini, recensant plusieurs leviers d’action. Tout d’abord, il s’agit de travailler sur le bâti : un beau collège est plus propice à la réussite des élèves. Ensuite, il faut impérativement rapprocher de l’école les familles qui en sont les plus éloignées, avec l’appui des équipes éducatives et des associations de quartier. Enfin, il faut disposer d’outils d’aide à la réflexion et organiser une circulation de l’information la plus large possible. C’est ainsi qu’a été mis en place l’ORIS, l’observatoire de la réussite et des inégalités scolaires.

Les instances officielles de concertation, telles le CDEN, ne permettent pas d’échanger avec tous les acteurs, explique Patrick Hervy, un proche collaborateur d’Alain Desmarest. L’ORI a donc d’abord été conçu pour être un espace de partage tenant compte de la richesse et de la diversité de la population du département. C’est un lieu de partage d’idées mais aussi un lieu d’élaboration de propositions qui aideront le conseil général à définir ses politiques.

Pour remplir son rôle de centre de ressources et d’analyses, l’observatoire s’est doté d’un conseil scientifique consultatif dans lequel interviennent largement des chercheurs en sciences de l’éducation. Ils apportent un regard professionnel sur les questions en débat, telles la scolarisation des enfants de moins de 3 ans ou les rapports aux familles des collégiens.

C’est aussi un lieu d’études, comme celle réalisée par des chercheurs de Paris 8 sur la sociologie des collèges, en cours d’exploitation.

Dans le cadre de l’observatoire sont organisés 3 à 4 débats par an, dans des lieux différents à chaque fois, traitant des grandes questions de l’école (travail à la maison, carte scolaire, quelle école pour quelle société). Animés par des chercheurs comme C Ben Ayed ou JY Rochex, ils s’adressent à des publics très variés (élus locaux, parents, associations, enseignants …) et reflètent les préoccupations du conseil général. Celui-ci dispose d’une connaissance fine des collèges et croise les données avec le rectorat, ce qui a permis un travail en profondeur sur la carte scolaire. « Il manque quelques données sur les demandes de dérogation, mais nous travaillons à établir une carte de l’attractivité des collèges » précise P Hervy.

Les compétences élargies du département sur les familles et les aides sociales ont conduit à mettre un place un ensemble d’action sur la parentalité, en étroite collaboration avec les communes. Il s’agit là, dans certains quartiers comme celui du collège Laplace à Créteil, de créer un maillage solidaire et de redonner du sens à la présence des parents dans l’école. Avec l’aide de quelques parents et des équipes éducatives, tous très motivés, un espace parents, équipé informatiquement et en mobilier par le CG, accueille les familles pour des discussions et des moments conviviaux. Les services sociaux sont là pour concrètement des solutions à des situations difficiles. Les associations locales, la ville, tout le tissu existant sont autant de points d’appui.

En complément des actions programmées (équipement de portables pour tous les enseignants et collégiens à la rentrée 2012, restauration scolaire de qualité pour tous, programme pluriannuel d’investissement portant sur 15 collèges dans les 10 ans à venir) les prochains débats de l’observatoire concerneront la parentalité en mars à Champigny, puis l’utilisation des TICE en mai. Parallèlement s’organise une nouvelle réflexion sur ce qu’est la bonne taille pour un collège.

En acceptant l’invitation à participer à l’observatoire régional, les membres du Val de Marne entendent bien y apporter leur connaissance du tissu. Ils sont également intéressés à prolonger leurs travaux sur les questions d’orientation des jeunes et d’offre de formation en lycée ou en apprentissage. Ils sont aussi intéressés par « le regard social » de la région et comptent sur cette collaboration pour ouvrir la réflexion et avoir une interactivité encore plus grandes avec les jeunes et les usagers.