Par François Jarraud
La réforme des rythmes scolaires devait être un point d’appui de la refondation. Elle est devenue un cauchemar onéreux dont l’efficacité est interrogée. Sur le terrain politique, la défaite d’une nouvelle décentralisation est-elle établie ?
La place qu’a prise la réforme des rythmes a d’emblée été exagérée. Alors que la refondation de l’Ecole devrait être concentrée sur les changements de pédagogie et de contenus d’enseignement, un processus long mais compréhensible et mobilisateur pour les enseignants, la refondation s’est décentrée vers la question des rythmes. Comme le faisait remarquer Bruno Suchaut, dans L’Expresso du 14 novembre, “on en arrive à se détourner de l’objectif essentiel” et à considérer les rythmes en eux-mêmes. Au final, arrivera-t-on vraiment à justifier l’efficacité pédagogique des nouveaux rythmes ? Qui peut croire que diminuer de 30 minutes les heures de cours va régler la question de l’échec scolaire massif dès le primaire ?
Le changement de cap gouvernemental en réponse à la crise a rendu plus difficile toute solution au problème des rythmes. Si le gouvernement veut obliger les communes à développer du périscolaire, il est légitime qu’il les aide puisqu’il controle étroitement leurs recettes. Mais comment faire face à cette dépense supplémentaire qui pourrait atteindre 600 millions selon l’AMF ? Comment justifier un tel soutien aux collectivités locales alors que les enseignants, touchés eux aussi financièrement par les nouveaux rythmes, ont des salaires nets en recul depuis plusieurs années ? Dans un autre contexte budgétaire la réforme aurait été aisée. Elle ne fait plus qu’entretenir la compétition entre acteurs.
Mais la grande victime de la querelle des rythmes c’est la décentralisation. On sait bien que ce n’est sans doute pas par hasard si la totalité des pays développés ont décentralisé leur système éducatif. Certes ceux qui sont allés le plus loin en ce sens, comme la Suède, reviennent en arrière. Mais tous ont trouvé un équilibre entre l’étatique (les programmes , les examens souvent) et le local (la gestion des moyens le plus souvent). Pas la France. En France l’enchevêtrement des compétences fait que l’Etat garde la main sur tout. Dans la situation actuelle, l’Etat est l’arbitre du devenir des projets éducatifs locaux. Pire la question des politiques éducatives locales au lieu de susciter des rapprochements entre acteurs les a dressés les uns contre les autres. Ce qu’a mis en évidence la question des rythmes scolaires, c’est que les acteurs de l’Ecole ne sont pas prêts à une véritable décentralisation.
François Jarraud
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