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Le vote négatif du CSE, la déception des acteurs marquée par un vote majoritairement blanc peuvent surprendre alors que la question des rythmes scolaires a été si longtemps négociée. Si échec il y a, où se situe-t-il ? Est-il définitif ?

Probablement les Français ne vont rien y comprendre. Cela fait trois ans que les commissions se succèdent pour une réforme des rythmes scolaires. On ne va pas retracer l’histoire de la commission Chatel qui déjà avait réuni la fine fleur des experts pour arriver à un rapport qui proposait le retour à la semaine de 5 jours au primaire. La concertation voulue par V Peillon a recommandé la même chose. Enfin indépendamment du ministère, les acteurs de l’Ecole ont aussi travaillé la question. On peut citer en exemples le « Réseau des villes éducatrices » ou encore la grande concertation réussie par la JPA rassemblait à peu près les mêmes organisations et personnes que lors du CSE du 8 janvier…Toutes ces réunions se sont conclues par des compromis acceptant l’idée du retour aux 5 jours.

Comment une si longue préparation a-t-elle pu aboutir à ce vote négatif ? Sans doute les négociations précédentes s’en sont tenues, selon un défaut bien français, au terrain des idées au lieu d’attaquer la question sous un angle pragmatique. Les difficultés financières, les compensations à trouver se sont déclarées très tard alors qu’elles étaient prévisibles et auraient du être anticipées. Elles sont arrivées à un moment où l’Etat met la reconstruction économique au premier plan. Malgré tout 250 millions ont pu être trouvés. C’est à la fois insuffisant par rapport aux besoins des communes. Un simple calcul basé sur les critères définis par l’Etat montre qu’il faudrait au moins 400 millions. Encore ces calculs pèchent-ils probablement par optimisme. C’est aussi beaucoup par rapport à la situation des enseignants pour qui il n’y a jamais de crédits salariaux disponibles…

Cet échec reflète aussi une difficulté politique profonde. Trente ans après les lois de décentralisation; le système éducatif est resté profondément centralisé. Les compétences entre Etat et collectivités territoriales sont étroitement enchevêtrées ce qui permet au premier de rester maître du jeu. Aussi quand il s’agit d’impulser des projets éducatifs territoriaux, qui sont existent chez tous nos voisins, cela semble tout sauf naturel pour les enseignants français mais aussi probablement bien au-delà y compris chez de nombreux élus locaux. Les collectivités financent déjà largement l’Ecole (en gros pour un quart des dépenses). Mais elles le font très souvent en substitution ou appui des programmes étatiques. Le décret et la loi d’orientation envisagent autre chose. Pour la première fois faire des collectivités territoriales de vrais partenaires du système éducatif. Est-on certain que cette question politique a vraiment été travaillée ? En dehors des experts et d’une poignée de responsables convaincus qui a vraiment perçu les enjeux ? Ont-ils été expliqués ? Si certains syndicats refusent clairement la « territorialisation » combien d’acteurs n’en voient pas l’intérêt ?

S’agit-il alors d’un échec définitif ? Certainement pas. L’opinion sait que l’Ecole ne fonctionne pas bien et que les rythmes sont un élément du problème. Les attentes sont tellement fortes qu’elle exigera probablement des changements à ce niveau. Pour autant, la refondation ne peut se résumer à cela. Si faire passer la réforme des rythmes participe d’une modernisation institutionnelle, on ne changera pas l’Ecole seulement en modifiant son environnement. L’essentiel des efforts à faire se situent dans la classe et dans la formation des enseignants. Pour ces questions le consensus est-il là et les difficultés concrètes ont-elles été anticipées ?

François Jarraud