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Renaissance des IUFM , ou pas ? A l’heure ou en retard ? Avec des enseignants de terrain ou sans ? Le ministre de l’Education nationale et la ministre de l’Enseignement supérieur ont donné le coup d’envoi de la mise en œuvre des ESPE pour la rentrée 2013 lundi 1er juillet à l’Université de Lyon 1 porteuse du projet commun d’ESPE des trois universités lyonnaises et de celle de Saint Etienne.

Une mise en œuvre trop rapide ?

Contrairement à ce que l’on aurait pu penser, la mise en œuvre des ESPE se fait plutôt en bon ordre. Le vice-président de la CPU, par ailleurs président de l’université de Saint Etienne a tenu à le rappeler dans son introduction au discours des ministres. Ceux-ci ont abondé dans ce sens en soulignant la formidable qualité des échanges entre les ex-IUFM et les universités dans la mise en place des maquettes. Si quatre maquettes d’ESPE présentées semblent encore faire problème, le ministre de l’Education a rappelé la méthode retenue pour cette mise en place fondée sur le droit à l’essai erreur et surtout sur l’accompagnement des équipes dans l’écriture de leurs projets. Lors de la conférence de presse, les ministres ont rappelé que cette procédure d’accréditation devrait servir de modèle pour les diplômes délivrés par les universités. Concertation et prise en compte des diversités et des spécificités locales sont la base de la méthode mise en place.

Une journée de lancement importante pour les ministres

Trois temps ont marqué ce déplacement à Lyon : un premier temps dans lequel les acteurs locaux ont présenté ce qu’ils faisaient en matière de formation initiale et continue, un deuxième temps au cours duquel les ministres ont pris successivement la parole, un troisième temps de conférence de presse.

Un atelier de travail et de témoignage

Dans la première partie de la matinée, trois exemples de dispositifs de formation des enseignants ont été présentés. Le premier dispositif a montré la place du numérique en formation initiale, le deuxième a permis de comprendre l’importance de la formation à la conduite de classe, la troisième présentation portait sur la formation continue s’appuyant sur le numérique, à distance.

Les ministres ont questionné les intervenants. La première question portait sur la manière de combler l’écart entre la maîtrise qu’ont les élèves du numérique et celle des enseignants. Cela amène deux questions complémentaires : d’une part la formation des formateurs, d’autre part la gestion des particularités locales, des contextes. A la première remarque, il a été question des moyens nécessaires dans des dispositifs autres que face à face. Pour la deuxième, les échanges ont montré l’extrême difficulté à fabriquer une formation à Lyon et à la diffuser dans d’autres lieux sans prendre en compte les contextes locaux.

Cela a été l’occasion pour le ministre Vincent Peillon de rappeler son attachement à la formation progressive, en particulier dans le domaine professionnel. Comme les exemples évoquaient la nécessaire alternance entre la théorie et la pratique, le ministre n’a pas manqué l’occasion de mettre en avant son souhait de professionnaliser la formation (stage en M1 de 6 semaines recommandé) le plus tôt possible, sans pour autant renoncer à la qualité de la formation. Les concours vont évoluer au fur et à mesure et dès à présent l’accent pédagogique et professionnel est pris en compte dans les épreuves.

Une question particulière a été abordée, celle du témoignage des enseignants en poste dans les ESPE. Question délicate au moment où des personnels des ex-IUFM se soucient de leur avenir. Le ministre a laissé entendre qu’il faudrait veiller à ce que les enseignants qui interviennent en ESPE puissent réellement montrer des pratiques innovantes. Il compte en particulier que l’on fasse appel aux enseignants innovants auxquels il a rendu hommage.

Les discours des Ministres lors du séminaire national

Geneviève Fioraso a commencé son discours en rappelant l’importance de l’égalité des chances comme fondatrice de la démarche. Elle a ajouté que les ministères précédents avaient largement négligé cette question. L’importance du lien entre l’ensemble des acteurs scolaires et universitaires a été rappelée tout comme l’ancrage de la formation dans les universités (sans pour autant préciser les compétences respectives et surtout les prises en charge financières).

Pour Geneviève Fioraso, la simplification de l’offre de l’enseignement supérieure fait partie de ce projet global d’articulation avec le scolaire « peut-on accepter qu’il y ait 10000 offres de master, en mentions, spécialités et disciplines, cela est illisible pour les élèves ». Les ESPE vont être aussi un laboratoire du numérique pour l’enseignement supérieur mais aussi un modèle pédagogique autour du tutorat, de la professionnalisation et de la spécialisation progressive.

Les ESPE ne sont pas les IUFM toilettés, mais bien une « maison des enseignants » qui associe aussi bien la recherche que la pratique dans des dispositifs comme ceux présentés en première partie de la matinée par l’ESPE de Lyon-Saint Etienne.

Pour Vincent Peillon, l’ambition est non seulement de « refonder l’école de la république, mais aussi de refonder la république par l’école ». Il s’agit de renouer avec une tradition faite d’ambition et d’humilité. Au rang des moyens 27000 postes sont consacrés à la formation initiale. Les jeunes enseignants seront rémunérés en M2, 800 millions d’euros y seront consacrés. Le ministre a rappelé que l’entrée dans le métier devait se faire de manière progressive en évitant des ruptures entre théorie et pratique.

Par ailleurs, le ministre a rappelé la nécessité de renforcer l’école inclusive. 10 000 contrats aidés permettront de mieux accompagner les enfants. Il a appelé aussi à réduire les écarts entre filles et garçons dès l’école. Vincent Peillon a aussi évoqué la pédagogie comme centrale, mais pas forcément nouvelle « La pédagogie n’est pas un gros mot » a-t-il déclaré. En insistant sur le lien entre didactique et pédagogie, il a rappelé qu’il fallait combattre pour que les 20% d’élèves en grande difficulté parviennent enfin à réussir. Il a cependant déploré que la mise en œuvre de principes essentiels, les cycles, le socle commun ne se traduisent pas dans les faits.

A propos des acteurs partenaires, le ministre a rappelé que « les collectivités territoriales ne sont pas qu’un carnet de chèque». Au-delà c’est bien cette dynamique partenariale qu’il entend stimuler aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du système éducatif. Les ESPE sont désormais au centre de la formation initiale et continue des enseignants. Le ministre à rendu hommage aux personnels des ex-IUFM qui ont su maintenir une dynamique innovante alors que le bateau tanguait ces dernières années. La conclusion du ministre a porté sur les élèves, qu’ils soient à l’école ou qu’ils soient étudiants en ESPE, en appelant chacun à comprendre leur point de vue, et surtout comprendre ce dont ils ont besoin.

La conférence de presse n’a fait que confirmer tous ces propos. Les ministres n’ont pas fourni d’éclairages plus précis sur des questions comme les enseignants qui travaillent aussi dans les ESPE ou encore sur la part d’autonomie financière des ESPE vis-à-vis des universités.

Bruno Devauchelle

Le dossier de presse

Etat des lieux au 1er juillet