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Vae Victis ? Quel avenir l’Education nationale envisage-t-elle pour les redoublants de terminale ? Dans le département des Hauts-de-Seine, particulièrement privilégié, doté de milliers de places en CPGE, le bac 2014 a laissé sur la grève une cinquantaine de lycéens des filières générales, dont 32 en série ES. Ce sont des jeunes des communes populaires du nord du département. Plus d’une semaine après la rentrée 27 ne sont toujours pas affectés en établissement. « Faute de place dans les lycées », le Dasen envisage un dispositif spécifique pour ces élèves à risque. Une initiative qui permet en même temps de remplir les statistiques de la lutte contre le décrochage.

C’est le cas de Caroline (prénom changé), 17 ans, une lycéenne de Suresnes. Peinée par son échec au bac ES alors que ses résultats scolaires étaient moyens, Caroline ne baisse pas les bras. Ce bac elle le veut pour poursuivre des études supérieures. Et elle s’engage à travailler beaucoup plus pour le décrocher. Elle a tout de suite agi pour être reprise dans son lycée. En vain. Elle se déclare prête à accepter n’importe quel autre lycée. Mais mardi soir, à l’issue d’une nouvelle réunion de commission à l’inspection académique, elle était toujours sur le carreau.

Alors que le ministère affiche sa volonté de lutter contre le décrochage, sur le terrain les services de l’Etat ferment la porte des lycées et en fabriquent. Pour les proviseurs ces jeunes présentent le risque de faire chuter le taux de réussite de l’établissement. A l’inspection académique on met en avant le taux de remplissage des lycées. « On dépasse les capacités officielles », nous dit-on. Et on met en avant un fort afflux en seconde. « On respecte la règle qui privilégie les montants » dit-on à l’Inspection académique. En fait, selon son dossier de rentrée, le département accueille à cette rentrée 43 830 lycéens soit 53 de plus dans le public. L’essentiel de la hausse des effectifs s’est faite dans les lycées privés.

« Les redoublants de terminale seront pris en charge », promet la direction académique des Hauts-de-Seine. Pour nos lycéens non affectés, elle va proposer un dispositif spécial dans le cadre de la mission de lutte contre le décrochage scolaire (MLDS). Ils auront le statut d’élève, promet-on à l’inspection, et quelques cours à la demande. Mais ils seront présentés au bac en candidats libres et ne seront pas réellement scolarisés.

Dans le dossier de rentrée de l’inspection académique, Philippe Wuillamier vante « l’école bienveillante pour lutter contre le décrochage scolaire ». Le département dispose de groupes de prévention du décrochage scolaire installés dans les lycées pour prévenir le décrochage. Est-ce parce qu’elle est tellement intéressée par cette lutte que l’académie fabrique elle-même ses décrocheurs pour mieux les traiter par la suite ?

François Jarraud