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Exclusif. Le ministre de l’Education et le secrétaire d’état chargé du numérique visitent la Gamer Assembly ce dimanche à Poitiers. JM Blanquer a déjà visité Poitiers pour déclarer la ville « capitale de l’Education Nationale » le 12 décembre dernier. Cette nouvelle visite s’accompagne d’une annonce majeure dont nous vous donnons la primeur.

Au vu des coûts des installations et des difficultés rencontrées par de nombreux établissements à accéder à des équipements sportifs adaptés aux besoins d’éducation et au programme, le ministère de l’Education prend des décisions. Après avoir travaillé avec la ministre des sports et le secrétaire d’état chargé du numérique, le ministre de l’éducation envisage une réforme d’ampleur de l’EPS. Entre besoin de faire des économies, nécessité de s’adapter au monde numérique, évolution de la culture des élèves et donc multiplication des difficultés de toutes sortes pour enseigner l’EPS, le ministère de l’éducation a décidé de remplacer l’EPS par « l’eSport ». Cette évolution qui se veut progressive s’appuie sur de nombreuses observations et analyses qui confortent les pouvoirs publics dans ce domaine.

Finies les courses d’orientation, finie la natation dans la piscine à l’autre bout de la ville, finis les sports collectifs dans des salles coûteuses (en hiver il faut les chauffer pour que les élèves puissent y aller en dehors des heures réservées aux sportifs, il faut les entretenir etc.).

L’apparition du numérique amène de grandes transformations. Ainsi des enseignants d’EPS n’hésitent plus à utiliser les tablettes, les smartphones des élèves ou les leurs, les objets connectés dans leurs cours ainsi qu’on a pu le constater lors de la réunion des professeurs d’EPS à Paris en janvier dernier. Après un propos liminaire de l’inspectrice Générale sur le choc du numérique pour l’éducation, trois enseignants (aussi formateurs et chercheurs) ont montré cette évolution, tout au moins pour l’usage des objets connectés et du potentiel vidéo permis par les smartphones et tablettes avec des applications adaptées. Le Café Pédagogique qui y était présent a pu observer et analyser ces évolutions.

Des indiscrétions venues de plusieurs sources dans plusieurs ministères nous permettent de révéler une nouvelle étape. Désormais l’EPS sera remplacée par l’eSport. Autrement dit on fera l’EPS dans des salles de cours en utilisant les moyens informatiques disponibles et en particulier les plus mobiles et connectés. En fait l’idée est un peu la même que pour l’enseignement technologique : aller de plus en plus vers la simulation. Quand on constate que le plaisir de joueurs professionnels de sports d’équipe est de rejouer aux mêmes jeux sur écran dès lors qu’ils ont un temps libre et d’attente, on comprend la proximité entre performance réelle et performance virtuelle.

Ce qui est plus intéressant encore dans ce projet ce sont les possibilités offertes : pas d’accidents corporels, pas de contacts physiques entre enseignants et élèves, plus de vestiaires sordides, criards et parfois pires, bref, un enseignement sécurisé. On peut rêver à un univers aseptisé. Et les jeunes dont on nous dit qu’ils sont tout le temps sur leurs jeux vidéo, voilà une belle opportunité de faire de ces activités décriées des activités scolaires. Imaginons ce groupe d’élèves en train de passer leur bac numérique sur une simulation de jeu collectif. L’enseignant enregistrerait automatiquement les traces de leurs activités (les manettes de jeux sont reliées à un système de logs automatique), et pourrait, à l’aide d’un logiciel d’analyse des data et de quelques algorithmes d’intelligence artificielle donner les résultats quasi instantanément.

Les chefs d’établissements interrogés voient cela d’un bon œil : finis les casse-têtes d’organisation, fini les profs en jogging dans l’établissement alors qu’on veut l’interdire aux élèves, bref que des avantages. Quelques enseignants d’EPS auxquels nous avons soumis l’avant-projet nous ont fait part de leur inquiétude mais aussi de leur satisfaction. Inquiétude pour leur avenir et leurs compétences bien sûr. Satisfaction d’avoir enfin un vrai statut de prof, avec des salles de classes et une vraie reconnaissance des collègues. Mais c’est surtout envers les jeunes qu’ils se sont interrogés : « on va faire des obèses », « il va falloir faire des cours anti-popcorn, burger et autres pizza ». Même si la proximité entre les contenus d’enseignements et les pratiques sociales des jeunes peut sembler attirante, il reste beaucoup de questions à examiner.

Une plateforme numérique sera mise à disposition pour échanger et travailler à distance, afin que ceux qui font les lois les vivent en quelque sorte avant de les promulguer…

Le projet d’arrêté