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Que disent les syndicats de la prime au mérite annoncée par JM Blanquer pour les personnels des Rep+ ? S’agit-il d’une remise en cause du statut des fonctionnaires ? Frédérique Rolet (Snes) et Stéphane Crochet (Se-Unsa) répondent aux questions du Café pédagogique.

Sur la prime

« Il y a tellement de facteurs de progression des élèves qu’il est bien difficile de définir un indicateur pour mesurer ce « mérite », nous a dit F Rolet, secrétaire générale du Snes Fsu. « Comment le calculer ? Avec le taux de réussite au DNB (brevet) ? On connait les biais. Dans ce cas on finit par seulement entrainer les élèves aux tests.. En plus on va introduire des divisions dans l’équipe si un des membres ou plusieurs n’atteignent pas les objectifs affichés. Cela va créer une ambiance délétère ». Elle souligne aussi que « ce n’était pas ce qui était prévu : la prime devait stabiliser les équipes de Rep+ ce qui suppose qu’elle soit donnée à tous, y compris les AED ».

« La prime au mérite c’est une vision erronée et idéologique des motivations des enseignants. Penser qu’une prime est un levier pour que les enseignants s’engagent dans des projets est une vision déformée de la façon de travailler des enseignants. Le ministère va créer une usine à gaz qui ajoutera des dysfonctionnements… Qui évaluera ce mérite ? Le ministère parle de façon énigmatique d’une évaluation par des personnes autres que celles pouvant toucher la prime, ce qui exclut les personnels de direction et les inspecteurs. Alors qui? A l’ESEN le ministre a parlé d’auditeurs du système éducatif ce qui renvoie au projet Macron d’agence de l’évaluation du système éducatif. On a l’impression qu’on ne nous dit pas tout… »

Le statut de la Fonction publique remis en cause ?

S’agit-il d’une remise en cause du statut de la fonction publique ? « On est dans un projet d’ensemble qui rappelle la ligne Sarkozy de 2008. Il y avait déjà ces idées reçues, la volonté de toucher au statut , d’individualiser les carrières, de développer le nombre de contractuels et de remettre en cause le recrutement par concours ». Pour elle, « cette prime au mérite est une première brèche dans le statut alors que les enseignants n’étaient pas touchés jusque là. On importe chez les professeurs ce qui ne marche pas ailleurs ».

« Si on reste à un système avec une part fixe et une part variable dans cette prime on sera surtout dans un dispositif guidé par l’idéologie, plutôt qu’une remise en cause du statut de la fonction publique », nous dit Stéphane Crochet. Pour lui, la situation faite aux syndicats aujourd’hui « n’est pas pire que sous Sarkozy, pas plus revancharde « 

Dans un communiqué, le Snuipp Fsu juge sévèrement la division de la prime.  » On est en droit de s’interroger sur les critères « objectifs » qui présideraient à l’attribution de cette part variable de la prime à tel enseignant, telle équipe d’école et pas à telle autre. Doigt mouillé ou pilotage par les résultats ? Quoi qu’il en soit, et décidément bon élève du gouvernement, le locataire de la rue de Grenelle envisage donc et sans attendre, de mettre en musique « la remise à plat complète des modalités de rémunération des agents publics et la généralisation de la rémunération au mérite au niveau collectif et individuel » annoncée mi-juin par Matignon dans le cadre de la réforme de la fonction publique. Pour le SNUipp-FSU il y a là un dangereux précédent, d’autant que les études internationales montrent que la rémunération au mérite, là où elle a été mise en place, a été un échec, démotivant les équipes et ne favorisant en rien la réussite des élèves ».

Propos recueillis par François Jarraud

Communiqué snuipp

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