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Publiés le 11 juillet, les premiers documents budgétaires annoncent une hausse d’un milliard du budget de l’éducation nationale en 2020. L’éducation nationale connaitrait la plus forte hausse après les armées. Mais cette somme ne devrait pas épargner des tensions pour l’éducation nationale compte tenu de la croissance des besoins en 2020 du fait des décisions d’E Macron et de la montée du SNU.

Un budget qui n’impose plus les suppressions de postes de fonctionnaires

Publié le 11 juillet, le premier « rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques  » apporte des éclairage sur les plafonds de dépense des différents ministères.

Globalement le budget 2020 est marqué par une nouvelle hausse des prélèvements obligatoires (de 43.8 à 43.9%) , un taux de croissance de la dépense publique stable par rapport à 2019 (0.5%) et un poids de la dette publique inchangé à 98.9% du PIB. La loi de finances publiques revient sur le dogme des 50 000 suppressions d’emplois de fonctionnaires d’Etat d’ici 2022. Il est maintenant précisé que l’incidence du schéma d’emplois d’ici 2022 sera « inférieure ou égale à – 50 000 emplois ETP ».

Un milliard pour l’éducation

L’éducation nationale devrait voir son budget passer de 51.68 milliards à 52.72 milliards soir une hausse de 1.04 milliard. « Le budget du ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse sera en hausse (+2,6 Md€ en 2022 par rapport à la LFI 2019), permettant notamment de mettre en oeuvre les annonces du Président de la République relatives au dédoublement de classes et à la limitation du nombre d’élèves en CP, CE1 et grandes sections de maternelles, ainsi que la montée en charge du service national universel », précise le ministère des comptes publics. « Par ailleurs, les effectifs seront stabilisés sur 2020 – 2022. Au total, la hausse sur le quinquennat atteindrait près de 4,5 Md€ pour permettre le renforcement des moyens de l’enseignement scolaire ».

Une hausse importante ?

Cette hausse d’un milliard en 2020 est importante dans des dépenses ministérielles totales qui ne vont augmenter que de 4.85 milliards. En fait l’éducation nationale est le second ministère qui voit son budget progresser, derrière les armées (+1.53 milliard) et devant la santé (+0.82), l’intérieur (+0.72) et l’écologie (+0.64). Mais , compte tenu de sa masse budgétaire, cela ne représente qu’une croissance de 2%. C’est moins que la santé (+6%), les armées (+4%) et l’intérieur (+4%) et autant que l’écologie (+2%). Somme toute l’éducation nationale augmente à peine plus que le budget total des ministères (+1.8%).

La vraie question est de savoir si la hausse d’un milliard va vraiment « donner de l’air » à l’éducation nationale et si elle permet de faire face aux besoins.

Pour situer cette hausse il faut la comparer à celle des années précédentes. En 2017, N Vallaud Belkacem avait arraché 3 milliards à Bercy. En 2018, JM Blanquer avait obtenu une hausse de 1.3 milliard, qui s’est avérée insuffisante pour que les premiers dédoublements se fassent sans peser sur les autres classes. D’autant que le ministre ne dépensait pas 260 millions. Résultat : en 2019 le budget de l’éducation nationale augmentait de seulement 0.9 milliard. C’est pratiquement cette hausse qui est renouvelée en 2020.

Un apport suffisant pour les nouvelles charges de l’éducation ?

Il faut aussi l’évaluer par rapport à la hausse des charges de l’éducation nationale en 2020. On peut déjà retirer du milliard environ 400 millions correspondant à la hausse automatique du glissement vieillesse technicité (le fait que les fonctionnaires « montent » en ancienneté et gagnent plus) et à l’application du PPCR. Le doublement des primes Rep+ devrait couter environ 100 millions. Plus difficile à évaluer est la prise en charge des AESH sur le budget éducation nationale. En 2019 cela représentait 200 millions. Il y a aussi le SNU dont les effectifs vont passer de 2000 jeunes en 2019 à 40 000 en 2020. Le cout estimé pourrait être un peu inférieur à 100 millions. On a déjà presque dépensé le milliard.

Double équation pour le ministre

Il y a pourtant un dernier élément à prendre en compte. Le 25 avril, E Macron a annoncé le passage à 24 élèves par classe pour toutes les classes de la GS de maternelle au Ce1 et le dédoublement des GS de l’éducation prioritaire. Cela représente 10 000 postes. Comme cette évolution doit se faire jusqu’en 2022, il faut ajouter 3 300 emplois par an dans le premier degré. En supposant qu’on les trouve, cela représente une charge de 200 millions, du moins si on crée ces postes.

Avec un milliard supplémentaire, JM Blanquer va se trouver devant une double équation à résoudre. Comment boucler le budget qui s’avère très juste alors que les enseignants exigent des hausses salariales et que le gouvernement les annonce depuis des mois ? Où dégager 10 000 postes pour le premier degré sans en créer ? Car ce qui est aussi inquiétant c’est la déclaration selon laquelle  » les effectifs seront stabilisés sur 2020 – 2022″.

Avec un milliard supplémentaire, JM Blanquer devrait se trouver devant un double mécontentement. Celui des enseignants qui demandent des hausses de salaire. Et celui des enseignants du second degré qui devraient voir de nouvelles suppressions de postes alors que le second degré voit le nombre d’élèves augmenter et que les classes sont déjà chargées. On comprend mieux pour quoi la seconde heure supplémentaire devient obligatoire dès la rentrée 2019…

François Jarraud

Le tiré à part et le rapport