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« Tourner la page ». Dans son allocution du 14 juin, le président de la République a annoncé la réouverture complète des écoles et collèges à compter du 22 juin. Il n’a pas parlé des lycées. Il n’a pas eu un mot pour les enseignants, violemment calomniés par une véritable campagne de presse, alors même qu’il rendait hommage, à juste titre, aux soignants. Il n’a rien dit sur les raisons et l’intérêt pédagogique d’une réouverture complète un 22 juin… Les syndicats réagissent à son discours.

Réouverture complète des écoles et collèges

« A partir de demain nous allons pouvoir tourner la page du 1er acte de la crise ». Emmanuel Macron a annoncé le 14 juin le passage au vert de tout l’hexagone et de l’outre mer sauf la Guyane et Mayotte.

« Des demain les crèches, écoles et collèges se prépareront à accueillir à partir du 22 juin tous les élèves de manière obligatoire et selon les règles de présence normales », a déclaré E Macron le 14 juin.

Qu’en est-il des lycées ?

Le président n’a rien dit pour les lycées. Il n’a rien dit non plus des établissements de Guyane et Mayotte, deux territoires où le virus est très actif.

D’après l’entourage du ministre, les lycées d’Ile-de-France rouvriraient mais avec les règles de la zone verte actuelle : retour d’un niveau seulement. Le protocole ne changerait pas dans les lycées.

Avec ou sans protocole ?

Quelle application sera faite dans les établissements et les écoles ? Les propos du président de la République donnent à penser qu’on « tourne la page » et donc à un retour à avant le 16 mars.

Mais est-ce vraiment possible ? Le président lui-même signale que le virus est toujours là et qu’il « faudra éviter les rassemblements car nous savons qu’ils sont les principales occasions de propagation du virus ».

Deux points du protocole empêchent actuellement d’accueillir tous les élèves : la règle de distanciation et celle du nettoyage. On peut considérer que ces deux règles vont sauter. Les principes de circulation, qui imposent également de fermer des salles, devraient disparaitre. Et on reviendrait à l’emploi du temps d’avant le 16 mars. Ce retour au mois de mars est évidemment le plus simple pour les chefs d’établissement. Mais il pose des questions sanitaires. Selon l’entourage du ministre les règles seront discutées demain.

Restent deux problèmes. D’abord le cas des enseignants vulnérables. Les faire revenir alors que le virus est toujours là serait irresponsable. Ensuite la situation des élèves et de tous les personnels : rouvrir les classes alors que la plupart sont bondées à craquer c’est prendre le risque de voir des clusters apparaitre rapidement ou au moins une relance de l’épidémie début juillet.

Quelle finalité pour ce retour ?

Enfin il y a une interrogation. A quoi sert cette réouverture complète le 22 juin ? Dans la plupart des établissements du second degré les élèves n’ont plus de manuels. Les conseils de classe et l’orientation sont faits. Ceux qui reviendront le feront pour voir leurs camarades un jour ou deux seulement. Quant aux lycéens, si les lycées rouvrent complètement, il ne sont habituellement plus là fin juin en année normale… Que feraient des collégiens et des lycéens du 22 juin au 4 juillet ? Il est fort probable qu’on en verra très peu.

Pas un mot en faveur des profs

Le plus choquant du discours présidentiel est dans ses silences. Le président n’a rien dit non plus sur les enseignants. Il a rendu hommage aux soignants et « à tous ceux qui ont continuer à travailler » permettant à la population de se nourrir. Alors que les enseignants font l’objet d’une véritable campagne de dénigrement dans la plupart des grands médias (France 2, Bfm, Lci, France Inter, Europe 1) ce silence fait sens. Alors même que le président parle d’unité il n’a pas un mot pour mettre fin au prof bashing.

Les réactions syndicales

« Dire qu’on va accueillir tout le monde c’est dire qu’on ne veut plus de protocole sanitaire. Est-ce bien raisonnable ? », nous a dit Benoit Teste, secrétaire général de la Fsu. « IL y a 15 jours tout le monde disait qu’il fallait respecter les prescriptions strictes des protocoles sanitaires. On a vu des établissements devenir de nouveaux clusters. Est-ce souhaitable d’accueillir tous les élèves ? On imagine qu’il y aura quand même des règles à respecter comme la désinfection des salles de classe. Le danger est potentiellement là ».

« On attendait une parole de reconnaissance du travail accompli par les enseignants. Avant, le président disait que tout le monde était formidable. C’est fini », ajout B. Teste. « Avant on expliquait aux personnels vulnérables que la solidarité c’était de ne pas revenir dans les établissements. Aujourd’hui on leur reproche ces consignes ».

Stéphane Crochet, secrétaire général du Se-Unsa, attend des précisions sur l’aménagement des protocoles sanitaires. « Le retour à la normale dans une semaine c’est envisageable si le protocole est réellement allégé. A ces conditions c’est une bonne nouvelle de retrouver les élèves ». Son syndicat demandera à ce « qu’on ne prenne de risques  » avec les personnels vulnérables.

« Je pensais qu’il pouvait avoir un mot pour les professeurs », nous a dit Frédéric Marchand, secrétaire général de l’Unsa Education. « Ca aurait été bienvenu. »

Les syndicats ont rendez vous demain avec JM Blanquer pour en savoir plus sur le maintien ou pas de protocoles et les catégories de personnels.

François Jarraud

Le discours de Macron