Le bac et ses apprentis-sorciers
Malade depuis des années, le bac pourrait être remis en question par des actions de sabotage cette année. Avec plus de 600.000 candidats et 4 millions de copies, l’organisation du bac, en année ordinaire, relève de l’exploit. C’est pas moins de 125.000 examinateurs que les rectorats doivent mobiliser chaque année pour corriger des épreuves de plus en diverses (par exemple 54 épreuves de langues !). En effet on a vu ces dernières années les options se multiplier sans que soit pour autant introduit un minimum de contrôle continu. Cette double évolution, d’ouverture d’un coté, de tradition de l’autre, a fragilisé l’organisation de l’examen. Seuls y échappent les nouveaux dispositifs, par exemple les TPE où le ministère a finalement réussi à introduire une parcelle de contrôle continu, et le bac professionnel. Une deuxième cause de fragilité résulte de son inefficacité. Certes le bac est devenu un véritable rite de passage pour les adolescents et une icône pour le système éducatif. Mais cela n’arrive plus à camoufler ses insuffisances. Une très récente étude ministérielle montre que le bac n’est plus le sésame de l’enseignement supérieur qu’il est censé être. Les bacheliers ont bien du mal à décrocher leur DEUG : seulement 45% des étudiants l’obtiennent en deux ans. Ce taux descend à 17% pour les titulaires d’un bac technologique. Aujourd’hui la réussite dans l’enseignement supérieur passe par les classes préparatoires où l’on est admis sur dossier.
C’est ce bac malade qui doit cette année faire face à de nouvelles attaques. La menace d’une grève le 12 juin plane toujours et elle pourrait rendre difficile le déploiement des surveillants. Mais c’est surtout la perspective d’un véritable sabotage de l’examen qui pèse sur l’avenir du bac. Un mystérieux collectif anonyme appelle à noter toutes les copies entre 15 et 20. Cet appel est justifié par le souci “d’esquiver les risques” de sanctions qui pourraient accompagner le rétention de notes ou le blocage de l’examen et de “menacer le gouvernement de graves perturbations dans la gestion des flux à la rentrée.. (afflux massifs d’étudiants dans le supérieur)”. Et il semble bien que le procédé ait déjà été utilisé pour certains examens professionnels dans le sud-est.
En discréditant ainsi l’examen, ces enseignants pourraient bien obtenir deux effets inattendus. En premier lieu le recours systématique aux livrets scolaires par les jurys, c’est à dire la fin des principes républicains d’anonymat et d’égalité des candidats. En second lieu, devant l’afflux de candidats, l’instauration officielle ou officieuse d’un examen d’entrée dans le supérieur. Il existe déjà de facto pour les filières les plus recherchées qui recrutent sur dossier. On voudrait l’obtenir qu’on ne s’y prendrait pas autrement. On le voit, le bac, au coeur des contradictions du système scolaire depuis des années, dont la moindre n’est pas la perception du pouvoir enseignant, pourrait succomber à ces nouvelles épreuves.
http://www.lemonde.fr/article/0,5987,3224–323099-,00.html
ftp://trf.education.gouv.fr/pub/edutel/dpd/ni0332.pdf
http://www.examensdelegalite.fr.st/
Meirieu : il faut adapter le bac
Dans un entretien au Figaro, Philippe Meirieu appelle à une évolution du bac : ” Ce qu’il faut se demander, c’est si l’on peut continuer à évaluer la démarche scientifique expérimentale avec du papier et un crayon, si l’on peut continuer à tenir la recherche documentaire à l’écart d’un examen qui reste essentiellement basé sur la mémoire, si l’on doit écarter complètement le travail en équipe dans un monde qui le requiert de plus en plus”.
http://www.lefigaro.fr
Les curiosités du bac
Une bonne année pour le bac ? 2002 ! C’est ce que montre l’étude publiée par le ministère sur la session 2002, avec près de 500.000 bacheliers sur 630.000 candidats : 62% des jeunes d’une génération ont obtenu leur bac. Voilà pour la satisfaction. Mais l’étude révèle bien des inégalités si ce n’est des anomalies. Ainsi les résultats montrent le respect des clichés sexistes : les filles réussissent mieux en lettres et moins bien en maths. Ils révèlent que le bac ne comble pas le fossé social : les enfants de milieu défavorisé ont toujours des résultats inférieurs aux classes moyenne ou supérieure, la discipline la plus sélective étant les maths. Mais la pire fantaisie est dans les résultats. Alors que le taux de succès à l’examen varie de 80% (bac général) à 77% (bac technologique et professionnel), les moyennes sont très fréquemment inférieures à 10. C’est le cas en philosophie, où selon les sections elle oscille entre 8 et 9,1, en français écrit où elle varie entre 8,6 et 9,7, en maths (à l’exception des séries technologiques). Curieux examen qui commence par estimer les candidats médiocres avant de leur reconnaître la dignité de bachelier.
ftp://trf.education.gouv.fr/pub/edutel/dpd/ni0334.pdf
http://www.adobe.com/Acrobat/readstep.html