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Un arrêt du Conseil d’Etat en date du 26 novembre 2012 définit les vacances des enseignants à 5 semaines par an. Mais pour le ministère, contacté par le Café,  » le Conseil d’Etat n’a jamais écrit que les enseignants devaient faire 5 semaines ou 8 semaines. Ce n’est pas son problème ».

Révélée par Claude Lelièvre sur son blog, l’arrêt du 26 novembre juge sur une plainte déposée par une enseignante certifiée qui demandait le report de ses congés sur l’année scolaire, ceux-ci n’ayant pu avoir lieu durant l’été du fait d’un congé de maternité.

Cinq semaines de congé seulement ?

Le Conseil rappelle dans un article 4 les différents textes en vigueur , y compris le calendrier annuel des congés scolaires. Puis il statue dans l’article 5 :  » Considérant qu’il résulte de ces dispositions qu’eu égard aux nécessités du service public de l’éducation, une enseignante ne peut exercer son droit à un congé annuel, d’une durée égale à cinq fois ses obligations hebdomadaires de service, que pendant les périodes de vacance des classes, dont les dates sont arrêtées par le ministre chargé de l’éducation ; que, dès lors, si, conformément au droit de l’Union européenne, elle a droit au bénéfice de son congé annuel lors d’une période distincte de celle de son congé de maternité, elle n’est en droit de prendre un congé annuel en dehors des périodes de vacance des classes que si elle n’est pas en mesure d’exercer ce droit, au cours de l’année concernée, pendant les périodes de vacance des classes précédant ou suivant la période de son congé de maternité ». La référence à « 5 fois ses obligations hebdomadaires de service » signifie un congé de 5 semaines par an.

Le droit et l’usage…

Pour Claude Lelièvre,  » cela ne devrait pas changer grand chose à la durée effective des vacances des enseignants, même si cela apparaît davantage comme fondé sur une sorte de ‘’droit coutumier’’ plutôt que sur un droit juridiquement établi ( ou les ‘’usages’’ font que la durée des vacances des enseignants se confond pratiquement avec celle de leurs élèves , à la réserve près – notamment et parfois – des périodes d’examen ). »

Consulté par le Café, un expert, Laurent Piau, invite à relire l’article 4 de l’arrêt. Pour lui la loi des 5 semaines de congés payés s’applique à tout le monde, y compris les enseignants. Evidemment cet arrêt ignore la réalité du travail enseignant, dont on sait bien qu’il dépasse largement les heures d’enseignement et les 35 heures hebdomadaires. Il y aurait bien une distinction entre le droit et l’usage.

La réponse du ministère

Aussi on s’intéressera particulièrement à la lecture du ministère. Interrogé dimanche 9 décembre, le cabinet de V. Peillon dénie à ce texte le droit de fixer la durée des congés des enseignants. « Le raisonnement du Conseil ne fixe pas les congés d’été des enseignants », nous dit le cabinet. « Il rappelle le droit de base. D’ailleurs dans un autre article il rappelle le calendrier fixé par le ministre. Ce texte est uniquement une analyse en droit d’une situation par rapport à une demande de droit européen. La question du Conseil n’est pas de fixer la durée des vacances. Le recours du ministère n’était pas par rapport à cela. C’est par rapport à une situation individuelle. Le ministère ne demandait pas le temps de travail des enseignants mais d’éclaircir les droits de cette personne. C’est anecdotique ».

Un intérêt partagé ?

Ce texte est publié au moment où Vincent Peillon lance une campagne de recrutement des enseignants. Or la liberté relative dans l’organisation de son temps de travail est un des rares arguments pour attirer des jeunes vers un métier déclassé, mal payé par rapport au niveau de qualification demandé et de plus en plus difficile. Tout doute sur la durée des vacances ne va pas arranger la campagne pour trouver des candidats en nombre nettement supérieur aux années précédentes où, déjà, les candidatures étaient insuffisantes.

Mais l’ambiguïté sur la durée des congés est aussi portée par le ministre lui-même qui a annoncé qu’il pourrait porter à 38 semaines la durée de l’année scolaire (au lieu de 36 semaines) et donc retirer deux semaines de congé en été. En tous cas cet arrêt montre qu’au final tout le monde semble avoir intérêt à redéfinir le métier d’enseignant dans ses différentes composantes.

François Jarraud

L’arrêt

Le blog de C Lelièvre