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Le 20 novembre, JM Blanquer a vivement critiqué un stage organisé en décembre par Sud Education 93. Ce stage interroge les inégalités ethniques dans l’éducation nationale. Un atelier prévoit de faire travailler séparément les enseignants « blancs » des « non blancs ». C’est cette séparation qui fait réagir le ministre. Pourtant la question posée par le stage s’impose…

Le programme du stage de Sud Education

 » Qui sont nos élèves ? En quoi sont-ils racisé-es et pourquoi l’enseignement à ces élèves en particulier est-il un enjeu spécifique et primordial ? Au-delà du discours largement répandu de la méritocratie et des élèves « tous identiques » dont la simple volonté de travailler est la clé de leur réussite, il s’agira de comprendre et de déconstruire la question raciale sociologique, nécessaire à un enseignement spécifique pour nos élèves héritier-es d’un passé colonial et de l’immigration ». Le stage syndical organisé par Sud Education 93 les 18 et 19 décembre pose de front une question qui saute aux yeux dans les établissements défavorisés.

Il pose la question de l’islamophobie et pour ce faire invite un ancien directeur du CCIF. Une formatrice ESPE évoque les inégalités ethnoraciales à l’école. Le stage prévoir plusieurs ateliers pédagogiques allant du primaire au lycée, animés par des enseignants inspirés d ela pédagogie de P Freire.

Mais c’est l’atelier final qui amis le feu aux poudres en prévoyant de faire travailler séparément les enseignants blancs et les autres.  » Nous, enseignant.e.s non-blanc.he.s, avons une vie professionnelle différente. Quels sont nos positions et les enjeux auxquels nous devons faire face, que ce soit vis-à-vis de l’administration, des élèves, des parents ou des collègues? Réunissons-nous entre nous pour définir les termes qui nous caractérisent et discuter des problématiques et enjeux auxquels nous devons faire face », annonce un stage.  » Cet atelier proposera de réfléchir collectivement à nos postures d’enseignant.e.s blanc.he.s dans des classes où la majorité des élèves subissent quotidiennement, à l’extérieur et à l’intérieur de l’école, le racisme systémique », annonce l’autre atelier.

La réaction de JM Blanquer

Dénoncé par un site d’extrême droite, le stage syndical de Sud éducation a fait réagir le ministre qui , dans un tweet écrit : « inconstitutionnel et inacceptable. Je condamne avec fermeté le projet d’une réunion syndicale triant les membres sur la base de leur origine ».

Sud Education a réagi rappelant que « le ministre de l’éducation n’a pas à intervenir sur le contenu des stages syndicaux » et que « les libertés syndicales sont un droit constitutionnel ».

La mixité sociale, angle mort de la politique Blanquer

Derrière cet échange il y a une réalité objectivée par des travaux sociologiques et une résistance croissante à ces travaux. Ainsi un colloque organisé par l’Espe de Créteil en 2017 n’a réussi à se tenir que très difficilement. Les organisateurs étaient réduits au silence, sous pression de leur hiérarchie, et le colloque encadré par un service d’ordre imposant.

Pourtant la question de l’apartheid scolaire se pose bien. G Felouzis a été pionnier sur ce sujet , publiant les premières études sur l’apartheid dans les collèges bordelais au début du siècle. Depuis d’autres travaux ont fait avancer les connaissances sur la dimension systémique des inégalités raciales dans l’école. Les enseignants du 93 sont aux premières loges pour en mesurer les effets, notamment comment cette dimension a pénétré les choix scolaires des élèves.

La question est étroitement liée à un angle mort de la politique ministérielle : le combat pour la mixité sociale à l’école. Les efforts déjà timides du gouvernement précédent ne semblent pas repris par JM Blanquer qui reste muet sur ce thème. Or la lutte concrète contre les inégalités devrait être sa première urgence.

Si la stage de Sud Education 93 peut apparaitre maladroit dans son libellé et son organisation, il a le mérite de proposer une réflexion indispensable aux enseignants. Il est temps de voir la réalité de inégalités ethniques dans l’école ne serait ce que parce qu’hélas elles se recoupent avec les inégalités sociales.

François Jarraud

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Dossier Mixité sociale

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