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Comment enseigner en demi-groupes quand le rectorat le refuse ? Avec la crise sanitaire qui s’aggrave et un protocole qui semble trop peu efficace face au risque Covid, dans de nombreux lycées des enseignants tentent de diminuer les effectifs des élèves. Mais le plus souvent c’est en vain, le ministre lui-même ayant déclaré qu’il souhaite maintenir tous les élèves dans les établissements. Les professeurs du lycée Charlotte Delbo de Dammartin-en-Goëlle (77) ont peut-être trouvé la solution. Il suffit de s’entendre avec les parents, eux aussi soucieux de la santé de leur enfant.

Prise d’autonomie

« J’espère que demain on sera en capacité de proposer des solutions à la direction et de passer à des demi groupes ». Liliane (le prénom a été changé NDLR) enseigne au lycée Charlotte Delbo de Dammartin-en-Goële, un établissement polyvalent de taille moyenne situé dans une banlieue pavillonnaire au nord de Paris et parle au nom de l’assemblée générale des enseignants du lycée. Depuis le 30 octobre ils échangent avec leur proviseur pour dégager une solution permettant d’assurer la sécurité sanitaire de tous, professeurs et élèves.

« On préfère éviter la fermeture du lycée qui risque fort d’arriver si on continue à être plus de 30 dans de petites salles ». nous dit Liliane. Une première assemblée générale, soutenue par le Snes Fsu, Sud et la Cgt, qui a eu lieu en visioconférence le 1er novembre, avait soulevé la question. Le 2 novembre une seconde assemblée générale, en présentiel, annonce qu’un certain nombre d’enseignants seraient en grève le lendemain suite au refus du Dasen d’autoriser les demi groupes.

Mardi 3 les enseignants répartissent les élèves dans deux groupes et voient avec eux les outils disponibles pour assurer la continuité pédagogique. Le lycée a l’avantage d’avoir reçu des tablettes pour les élèves de seconde. La troisième assemblée, réunie dans l’après midi, aboutit à un communiqué envoyé aux parents. Il leur demande « de ne pas envoyer leur enfant au lycée s’il est du groupe B mercredi 3 et du groupe A jeudi 5 novembre dans le but d’obtenir les conditions de distanciations physique nécessaires à la sécurité de tous ».

Soutien des parents

Mercredi 3 novembre, 202 élèves , soit 36% de l’effectif est absent. Une grande majorité des parents a suivi les enseignants et l’établissement peut fonctionner avec des classes en demi groupe.

« On a reçu des messages de soutien des parents. Mais en même temps ils son inquiets pour le programme », dit Liliane. « On réfléchit à la continuité pédagogique. Dans un premier temps le groupe absent fait des révisions. On en profite pour expliquer aux élèves présents comment ça va fonctionner en distanciel : quels outils les enseignants vont utiliser, quelles sont les attentes des professeurs. On recense aussi l’équipement et la connexion Internet dont peuvent bénéficier les élèves pour l’enseignement à distance ».

Comment expliquer ce soutien des parents ? « Ils sont inquiets eux aussi des conditions sanitaires dans lesquelles vivent leurs enfants. Ils comprennent qu’on agit pour le bien de tous ».

Pour autant, les professeurs sont conscients de la fragilité de cette prise d’autonomie. « On espère que nos propositions de solution seront acceptées par le Dasen. Notre objectif c’est d’éviter la création d’un cluster et la fermeture du lycée. On prépare des emplois du temps pour le distanciel pour pouvoir suivre chaque élève ».

L’attente de la régularisation

Quelque soit la décision de l’institution, les enseignants voient déjà les lacunes de l’année dernière. « On demande un allègement des programmes et une refonte du calendrier du bac qui est intenable notamment pour les épreuves de janvier et mars ». D’ici là ils espèrent que l’administration aura régularisé cette prise d’autonomie liée aux insuffisances du protocole sanitaire.

François Jarraud