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« Avec le président , nous avons décidé de maintenir inchangés au moins pour les 15 prochains jours les règles du confinement ». D’emblée J. Castex a écarté le 12 novembre l’hypothèse d’une évolution du protocole sanitaire qui est pourtant attendue par la plupart des enseignants des collèges. JM Blanquer a confirmé et n’a pas plus parlé d’allègements en lycée, attendus eux aussi. Satisfait de l’évolution de l’épidémie, qui fléchit un peu, et peut-être de la faiblesse de la mobilisation du 10 novembre, le ministre fait une description de la réalité des établissements assez éloignée de la réalité et ne craint pas la colère des enseignants. Les syndicats réagissent.

« Irresponsable d’alléger le dispositif »

Quinze jours après l’annonce du second confinement le 28 octobre par E Macron, J Castex et ses ministres ont fait le point devant les Français et annoncé ce que sera leur politique pour la quinzaine à venir. Elle tient en une formule :  » nous avons décidé de maintenir inchangés au moins pour les 15 prochains jours les règles du confinement ».

Pour J Castex, le confinement « préserve l’éducation de nos enfants et limite l’impact sur les emplois ». Il estime aussi qu’il « semble produire les premiers effets attendus », la courbe de reproduction des contaminations ayant amorcé une baisse. « Il serait irresponsable d’alléger le dispositif », estime le premier ministre. Il annonce le prolonger jusqu’au 1er décembre au moins. Mais il ajoute que « les fêtes de fin d’année ne pourront pas se tenir comme d’habitude ».

JM Blanquer dans le déni

Alors que le grand public a vu les conditions réelles d’enseignement à l’occasion de la grève du 10 novembre et que de nombreux parents et élèves sont inquiets du risque de contamination depuis l’école, Jean-Michel Blanquer a longuement expliqué que la contamination venait d’ailleurs.

« La 2ème vague a été accentuée par les vacances », déclare le ministre, alors que la baisse actuelle pourrait plutôt y correspondre. « Dans les lycées, la limitation du brassage est plus complexe du fait des déplacements plus nombreux des élèves », lesquels « ont un âge et un mode de vie rendant cette population plus sensible au risque sanitaire ».

Autant d’affirmations qui semblent éloignées de la vérité. La limitation du brassage au lycée est complexe parce que la réforme du lycée qu’il a lancée fait que durant la moitié des cours les élèves sont mélangés (ce qui a permis un gros gain de gestion des heures et la suppression d’emplois). C’est d’ailleurs ce que dit la circulaire du 6 novembre sur l’organisation des lycées. Ce n’est peut-être pas leur « mode de vie » qui fait que l’épidémie se répand chez les lycéens mais le fait d’être 8 heures par jour entassés dans des espaces étroits mal ventilés et peu nettoyés et parfois sans même un masque (comme à la cantine ». Le ministre est dans le déni de l’épidémie dans les établissements. IL n’a pas osé ressortir les chiffres communiqués par son ministère. Nous avons pu montré qu’ils sont en contradiction avec ceux du ministère de la santé qui montrent de très nombreux élèves contaminés chaque jour.

Le ministre a aussi évoqué ce qui se passait dans les lycées tournant avec la moitié des élèves en disant que « l’enseignement à distance demande une forte mobilisation des professeurs ». Mais dans ces lycées, sauf exception , il n’y a pas d’enseignement hybride. Le même professeur ne peut pas à la fois faire cours avec un groupe et enseigner à distance avec l’autre. Dissimuler aux parent le fait que la moitié des cours sont supprimés est peut-être habile politiquement. Mais du coup ça empêche le ministre d’annoncer l’inévitable allègement des programmes que les enseignants attendent.

Une annonce curieuse

La seule annonce du ministre mérite qu’on s’y attarde. « On va déployer plus de remplaçants, d’assistants d’éducation et de services civiques », a dit JM Blanquer. Les remplaçants sont déjà tous occupés dans les classes d’enseignants malades. Le ministre va t-il enfin embaucher les enseignants sur listes complémentaires et des AED supplémentaires ? Pour le moment il a renoncé de le faire. S’il mettait à exécution ces propos ce serait un pas positif.

Sur les réseaux sociaux des enseignants ont marqué leur irritation. D’abord devant le déni sur la transmission de la maladie dans les établissements. Aussi le fait que le ministre n’a pas parlé des collèges ou des allègements nécessaires des programmes puisque le temps d’enseignement est divisé par deux au lycée. Rien aussi sur la rupture d’égalité entre établissements et candidats.

Déceptions syndicales

« Ce qui m’a surpris ce sont les propos sur le déploiement d’assistants d’éducation et de remplaçants », nous a dit Frédérique Rolet, secrétaire générale du Snes Fsu. Pour le reste, elle déplore le fait que le ministre n’évoque pas les collèges. « Il aurait pu au moins dire que dans les gros collèges le brassage est là et qu’il faut faire comme dans les lycées, regrette -elle. « Les collègues vont être furieux. Ils va y avoir un sentiment de mépris et d’ignorance du réel. Dans mon propre collège il n’y a même plus de sopalin depuis la rentrée pour le nettoyage ». Ce déni de la réalité F Rolet craint qu’il ne s’étende à la revalorisation promise.

« Ce serait de vraies annonces si elles étaient concrétisées », estime Stéphane Crochet, secrétaire général du Se-Unsa, à propos des propos ministériels sur les remplaçants et AED. Pour les collèges, « on ne s’attendait pas à autre chose. Il va falloir que la discussion se poursuive dans les académies », dit S Crochet. Pas de surprise non plus sur le fait que le ministre ne parle pas d’allègements. « On sait que selon la durée de l’alternance il va falloir aller plus loin et des instructions plus claires.

François Jarraud