L’Expresso du 9 janvier 2023
- Le fait du jour -
Dans un rapport publié le 4 janvier, l’Inspection Générale dresse le bilan de la première année des PPPE – Parcours préparatoires au professorat des écoles – censées être l’une des solutions à la crise du recrutement des Professeurs des écoles. Recrutés après le bac, de jeunes étudiants et étudiantes, qui se projettent dans le professorat…
Comment tisser du lien entre ainés et jeunes enfants ? Le maire de Barlin, petite commune du nord Pas-de-Calais, a tout simplement décidé de les faire cohabiter. Il a délocalisé l’école maternelle dans les locaux de l’Ehpad de la commune. Une initiative que le jeune maire Julien Dagbert situe dans la continuité de toutes les actions…
- Le système -
Dans un essai paru vendredi dernier « Parlez-vous le Parcoursup ? », Johan Faerber, enseignant en lycée et à l’université, tire à boulets rouges sur Parcoursup, plateforme mise en place par Blanquer pour gérer les inscriptions des quelques centaines de milliers de bacheliers. Il répond aux questions du Café pédagogique. En quoi Parcoursup amplifie-t-il les inégalités ?…
- Les disciplines -
Pour revitaliser la formation, faut-il la rendre un peu moins descendante ? Au collège REP+ Auguste Renoir à Marseille s’est déployée une « constellation » de professeur.es de lettres. Suzanne Ponce en éclaire le fonctionnement : sur un thème choisi (par exemple ici le carnet de lecture et le lexique), avec l’aide d’un « pair-expert », les enseignant.es partagent pratiques et…
- L'élève -
Au Petit Palais, l’exposition « André Devambez, Vertiges de l’imagination » est prolongée jusqu’au 5 février 2023. L’imagination débordante d’André Devambez se découvre jusqu’au 5 février 2023, l’exposition que le Petit Palais lui consacre, est effectivement prolongée. Artiste de la Belle Époque, inventif et déjanté, touche à tout, peintre, graveur, illustrateur, il fait de Paris et de…
- La classe -
Régis Guyon, Directeur adjoint de l’Institut français de l’éducation, ENS de Lyon, est rédacteur en chef de la revue Diversité. Dans l’éditorial du numéro de janvier 2023 qu’il signe, il confie : « En dépit de l’apaisement de la querelle scolaire depuis le XIXe siècle, les religions et leur place dans l’école restent une question socialement et politiquement…
- Le système -
L’intersyndicale – qui réunit la CGT, la FSU, le SNALC, SUD éducation et SNT éducation- se réjouit du premier recul de Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l’Enseignement et de la Formation professionnelle. Le communiqué: Les mobilisations des personnels ont obligé Carole Grandjean à un premier recul : la réforme ne s’appliquera pas à l’ensemble…
Alors que le Ministre et les syndicats sont à la table des négociations pour une revalorisation des personnels, le SNUipp-FSU des Bouches-du-Rhône accuse le ministère de ne pas verser ce qu’il doit aux enseignants et enseignantes. Primes REP et REP+, indemnités de remplacement ou encore primes des RASED… Le SNUipp-FSU indique des centaines d’enseignants et…
La dernière édition de « Le Système éducatif français et son administration », un numéro spécial de la revue Administration & Éducation, est sorti en décembre dernier. La revue, qui parait tous les 3/4 ans s’adresse notamment aux candidats aux concours des personnels d’encadrement et d’éducation. « Certains articles sont seulement actualisés – budget, formation supérieure…, d’autres…
- La classe -
Dans son dernier dossier de veille « La classe à distance : quelles reconfigurations des pratiques ? », l’Ifé fait le point sur la classe virtuelle. Quels en sont les atouts ? les limites ? « Ce Dossier explicite en quoi la classe virtuelle se situe au sein de et en continuité́ avec les évolution politiques, stratégiques et techno- logiques de…
- L'élève -
Mercredi 18 janvier, la Philharmonie ouvre les réservations concernant les activités pédagogiques d’avril à juin 2023 Mercredi 18 janvier à 10h, la Philharmonie de Paris ouvre les réservations d’avril à juin 2023, pour les ateliers de pratique musicale et les visites du musée de la Musique. Toutes les demandes de réservation se font obligatoirement…
- Les disciplines -
Créer un fil de discussion « pour soutenir et nourrir l’acte de lecture » : c’est le travail mené par Grégory Devin avec ses 5èmes du collège Marcel-Grillard de Bricquebec autour de la « Légende de Saint Julien l’Hospitalier » de Flaubert. La séquence est courte et évolutive : « Elle avait pour but originel de travailler l’oral, en partant d’une…
Comment scolariser la bande dessinée en français ? C’est le sujet d’une riche étude d’Hélène Raux : d’une part elle reconstitue l’histoire de son déploiement dans la discipline, d’autre part elle enquête sur les pratiques effectives de lecture et de production dans les classes ainsi que sur les discours et représentations associées. Objet tout à la fois…
L'édito
Amélie, merci !
Alors que les enseignants entament un mouvement social de longue durée, il faut rendre sa part de mérite à Amélie Oudéa-Castéra. Pour avoir incarné aussi visiblement les non-dits du projet éducatif d’Emmanuel Macron, elle mérite un remerciement. Et elle nous donne l’occasion de revenir sur ce projet et ce combat. Depuis 2017, Emmanuel Macron a fait de l’éducation “le combat de notre siècle”. Et, depuis 2017, les enseignants bloquent le projet. Un long septennat de luttes qui nécessite maintenant une réponse de la société.
L’Ecole et Ibiza
A quoi pense Emmanuel Macron ? D’année en année, son choix semble moins sur. Jean-Michel Blanquer avait su déguiser la politique éducative d’Emmanuel Macron sous le masque de la République et de la science. En 2018-2019, au moment de la loi Blanquer, sous la poussée des enseignants, son siège vacillait. Mais, avec l’aide de la droite sénatoriale, il avait réussi à se maintenir en usant de son image de défenseur de l’Ecole. Il fallut Ibiza pour qu’il tombe. Le ministre faisait passer ses vacances avant son travail, la jet-set avant la République.
Avec Amélie Oudéa-Castéra, Ibiza est arrivé dès le premier jour. Mieux que ses prédécesseurs elle affichait sans vergogne ses choix de caste et revendiquait ses privilèges. De déclaration maladroite en formule malheureuse, la ministre a fini par incarner la grande bourgeoisie séparatiste, plutôt VIIème que 6ème. Ce choix, malheureux pour E. Macron, met en évidence les décisions anti sociales de la politique éducative d’E. Macron.
Une seule politique depuis 2017, celle de Macron
Car, depuis 2017, c’est bien la même politique éducative qui essaie de s’installer. On peut même remonter à 2016, où le futur ministre d’Emmanuel Macron, membre de l’Institut Montaigne, la définit. Dans “L’école de demain“, JM Blanquer en fixe les bases. C’est l’autonomie d’établissements scolaires mis en concurrence, dirigés par des chefs managers. C’est la fin du collège unique remplacé par des établissements à autonomie pédagogique. C’est l’éducation réduite aux fondamentaux dans le premier degré et pliant sous leur poids dans le second. Ce sont des enseignants dont les pratiques pédagogiques sont dictées et dont le mérite est estimé annuellement grâce aux évaluations nationales. Cette privatisation de la gestion de l’éducation nationale est proclamée par les gouvernements d’E. Macron. En février 2018, E Philippe promeut l’individualisation des salaires et la libération des managers dans toute la fonction publique. Quelques mois plus tard, E. Macron fait de la transformation de l’Ecole “le combat de notre siècle”. En aout 2022, il revient sur les fondamentaux de 2016 : autonomie des établissements, contractualisation générale des établissements et des enseignants. Cela nous donne le Pacte, le CNR.
Les enseignants sont seuls à faire reculer Macron
Si E. Macron se répète depuis 2018, si ses gouvernements fixent le même cap depuis 2017, c’est que la politique éducative du président peine à s’installer. Certes la loi de transformation de la fonction publique est passée. La loi Blanquer aussi. Le Pacte est mis en place. Mais la grande libéralisation de l’Ecole promise depuis 2016 n’a toujours pas eu lieu.
Les enseignants ont fait reculer Blanquer et sa loi en 2019. Il a fallu la désorganisation issue du confinement pour que la loi Rilhac passe. La transformation radicale du lycée professionnel a été freinée par des années d’opposition réussie des enseignants des L.P. Ils ne s’en rendent pas forcément compte. Mais les macronistes le savent. Les enseignants ont réussi, et eux seuls, à bloquer Jupiter.
Au point de bascule
Aujourd’hui, alors qu’Amélie Oudéa-Castéra entame sa mission ministérielle, les syndicats enseignants sont presque unanimes à écrire que “nous sommes à un point de bascule pour l’Ecole publique“. Sud, Unsa, Fsu, Sgen Cfdt et Cgt appellent ensemble à “une réponse forte qui passe par une action dans la durée“. Ils rejettent la politique présidentielle, jugée “passéiste et conservatrice“. Ils dénoncent “une école du tri social” marquée par la disparition du collège unique et l’affectation des jeunes élèves à des filières séparées. Ce tri social est particulièrement visible au collège et au lycée professionnel.
Particularité française
Alors que, chez nos voisins, la révolution libérale de l’Education a pu se mettre en place, la France résiste. C’est grâce aux enseignants. Mais leur action est possible par l’écho qu’elle rencontre dans la société. Dans un numéro de la Revue de Sèvres consacré à la privatisation de l’Ecole, Xavier Pons relevait cette spécificité française. ” Les Français sont pour le libre choix de l’Ecole… Mais une fois mis devant le choix ils se posent des questions”, écrivait-il. Parce que la privatisation menace les communs, encourage la fragmentation de la société, colporte des valeurs qui s’opposent aux valeurs collectives. A ce titre, le “nouveau pacte” et la transformation du collège sont une “révolution culturelle” dans la mesure où il attaque les bases de l’école publique.
Puisque nous atteignons le point de bascule, les Français peuvent encore s’opposer à ce projet et défendre leur école. Les enseignants ont besoin d’eux.
François Jarraud