Nicolas Montessuit, étudiant virtuel en grec ancien
Robin Delisle – Nicolas Montessuit, pouvez-vous vous présenter et dire ce qui vous a amené à vous intéresser au grec ancien ?
Nicolas Montessuit – Après des études de mathématiques, je suis devenu linguiste et informaticien. J’envisage les innovations logicielles non pas comme des gadgets technologiques (ce qu’elles sont souvent), mais comme des praxis révolutionnaires (ce qu’elles sont parfois). Agé de 28 ans, j’ai finalement décidé d’apprendre le grec… Tout jeune enfant, je caressais le rêve de parler toutes les langues. Bien sûr, c’est un rêve qui ne s’est jamais réalisé. Par la suite, à partir de l’adolescence, je suis devenu un grand lecteur de philosophie, mais je regrettais de ne pas avoir d’accès direct à Platon ou aux Présocratiques… J’aime aussi certains auteurs classiques comme Lucien de Samosate.
R.D – Nicolas Montessuit, pouvez vous expliquer en quelques mots ce qu’est un wikiwiki ?
N.M – Un wikiwiki est un site web où tout le monde peut ajouter de nouvelles pages ou bien modifier (sans limites) les pages déjà existantes. On peut encore tisser des réseaux de liens entre toutes ces pages. Ce n’est pas un forum, mais plutôt une expérience d’écriture collective, un bloc-notes partagé, un accumulatoire à idées, un outil pour le travail collaboratif…
R.D – Vous avez eu l’idée de mettre en ligne vos cours de grec ancien, mais ce sont des cours d’étudiant et non de professeur : à ma connaissance, c’est la première fois que cela se produit sur la Toile. Pouvez-vous expliquer ce qui vous a donné cette idée, et ce que vous attendez de cette mise en ligne bien peu ordinaire ?
N.M – Ha ! C’était peut-être un peu gonflé de ma part, après tout qu’est-ce que je connais au grec ancien ? En fait je reprends ce que je disais au sujet du wikiwiki : une sorte de carnet de notes personnelles, mais qui peut profiter aux autres, dans la mesure où tout le monde y a accès et peut l’amender… Je me suis dit que mettre par écrit mes cours de grec m’aiderait à les structurer, d’une part, et que les notes que j’avais prises pourraient servir à d’autres. C’est une logique de partage, disons.
R.D – Une fois de plus, on retrouve le grec à la pointe de technologies nouvelles sur la Toile : comment expliquez-vous ce fait étonnant ?
N.M – C’est plutôt étonnant, en effet. Doit-on y voir la trace d’une certaine forme d’élitisme ? Pas forcément. En fait, un cours de grec ancien reste tout de même quelque chose de profondément humaniste, il suffit de penser au bénéfice qu’on peut en tirer quant à sa pratique de la philosophie ou des lettres… Comme d’autre part un certain nombre de pratiques logicielles « hacktivistes » s’efforcent d’augmenter la puissance d’agir de l’utilisateur (en offrant de nouvelles capacités de production ou de hiérarchisation de contenu, par exemple), on peut comprendre que ces deux mouvements, l’humanisme des textes reconnus et la mise en oeuvre moderne de nouvelles praxis intellectuelles, en fait, se rejoignent et se complètent.
Adresse du wikiwiki consacré au grec ancien :
http://bluemoon.tuxfamily.org/lire.pl?page=CoursDeGrec