Vous pensiez tout savoir de Jules César ? Vous vous trompiez ! Prolongement de la série télévisée Jules, le formidable roman graphique Moi, Jules César, signée par Alfred de Montesquiou pour le texte, et Névil pour les dessins, nous embarque dans les plis et replis de la vie de cet homme au destin exceptionnel, célèbre et méconnu à la fois. En route pour le Rubicon !
Un travail d’enquête impressionnant
Nourri de trois ans d’enquête « sur trois continents et 16 pays », qui ont conduit l’auteur « sur les lieux mêmes des grands faits d’armes de Jules César », l’ouvrage s’appuie avec soin sur les écrits de César et des auteurs de son temps ou du début de notre ère, tels que Cicéron, Suétone – son premier biographe – ou encore Plutarque. Mais aussi sur les travaux de 32 historiens et historiennes contemporain·es, spécialistes de l’une ou l’autre période de sa vie, s’efforçant « d’être le plus fidèle possible à ce que l’on sait de lui ».
Pas moins de 300 notes complètent l’ouvrage qui offre une parfaite – et somptueuse – reconstitution d’un grand nombre de lieux, monuments, paysages, rites… mais aussi d’épisodes célèbres de la vie de César. Dynamisme et précision des dessins de Névil, magnifique travail de la coloriste Vérane Otéro emportent les lecteurices dans cette épopée souvent sanglante, faite de batailles dantesques et de complots retors.
L’ouvrage sort aussi des sentiers battus de la légende, pour nous faire découvrir des événements moins connus, comme celui de la rocambolesque prise en otage de César par des pirates, racontée par Plutarque, ou le rôle joué par exemple par sa fidèle alliée Servilia, sœur de Caton, sortie de l’invisibilisation par le travail de recherche « des historiennes Suzanne Treggiari à Berkeley, ou Sara Borrello en Italie ».
L’autobiographie d’un animal politique moderne
Le récit se présente comme une autobiographie en onze chapitres dans laquelle César prend la parole – pour cette fois à la 1ère personne ! – pour revenir sur les périodes clés de sa vie, de sa « Jeunesse à Subure », au « Rendez-vous avec la mort » dans sa cinquante-sixième année, en passant par « Les Marches du pouvoir » ou encore « Le Soleil de Pharsale ». Mais Moi, Jules César donne également à voir « l’être de chair et de sang », et « l’homme derrière le mythe », mythe parfois d’ailleurs édifié par César lui-même et écorné par le récit (non César n’est pas né par césarienne !). Et s’attache aussi à montrer la métamorphose progressive et patiente de « l’outsider, pauvre, malade, chétif », en véritable animal politique.
Un homme qui, il y a 2000 ans, avait déjà su percevoir les enjeux géopolitiques essentiels que constitue la mer Méditerranée ; un homme pour lequel Pline l’ancien inventa le terme de « crime contre l’humanité » ; un homme qui « court-circuita les institutions de la République pour parler directement au peuple » ; un homme qui, finalement, par bien des aspects « rappelle étrangement notre époque »…
Un très bel ouvrage et un outil précieux pour tous ceux et celles qui s’intéressent à l’histoire ancienne… mais pas que !
Claire Berest
Moi, Jules César, Alfred de Montesquiou et Névil. Sur le site des éditions Allary.
