France Stratégie publie un rapport alarmant sur la résurgence des stéréotypes chez les jeunes et propose 20 recommandations pour inverser la tendance. Elle appelle à une mobilisation forte du monde scolaire. « L’école est un maillon clé pour casser les schémas genrés et construire un esprit d’égalité dès le plus jeune âge », affirme Clément Beaune, Haut-commissaire au Plan, alertant sur le rôle des « réseaux sociaux [qui] agissent comme une arme de construction massive des stéréotypes de genre ».
Alors que les stéréotypes de genre reculent lentement chez les adultes, ils persistent voire s’intensifient chez les adolescent.es, selon une enquête CSA-France Stratégie menée auprès des 11-17 ans. Dès les premières années de scolarisation, les enfants intègrent des représentations sexuées sur les rôles, les compétences ou les comportements attendus, qui influencent durablement leurs parcours éducatifs et professionnels.
Des idées reçues solidement ancrées dès le collège
L’enquête révèle que plus de la moitié des adolescents.es (54 %) estiment que « les mères savent mieux répondre aux besoins des enfants que les pères », tandis que 58 % considèrent que « les garçons sont par nature plus violents ». Ces croyances, souvent implicites, sont renforcées par les normes sociales, scolaires et numériques.
À l’école, ces stéréotypes se traduisent par : des attentes différenciées selon le genre, une orientation encore très genrée, notamment au moment du collège et du lycée, une sous-représentation des filles dans les filières scientifiques et techniques, des manuels scolaires encore trop souvent porteurs de représentations stéréotypées.
Lutter contre les stéréotypes à l’école : une priorité urgente
Dans son rapport « Lutter contre les stéréotypes filles-garçons. Quel bilan de la décennie, quelles priorités d’ici à 2030 ? » publié le 12 mai, France Stratégie identifie l’école comme un levier essentiel pour bâtir une culture de l’égalité. « Ces représentations dans les têtes nourrissent les inégalités dans les faits, les discriminations, voire les violences sexuelles ou sexistes. C’est un continuum, un esprit d’égalité qu’il faut bâtir dès la petite enfance », souligne Clément Beaune, Haut-commissaire au Plan.
Le rapport appelle à renforcer les politiques éducatives et à en faire un pilier de la lutte contre les inégalités entre les sexes. Parmi les 20 recommandations proposées, plusieurs ciblent directement l’Éducation nationale, à savoir une formation des enseignant.es à repérer et déconstruire les stéréotypes dans leurs pratiques pédagogique, une révision des programmes et manuels scolaires pour promouvoir des représentations non genrées. Il préconise aussi d’encourager la mixité dans les activités scolaires et extrascolaires, d’accompagner les choix d’orientation avec des actions de sensibilisation ciblées dès le collège, de développer une culture de l’égalité dans tous les établissements scolaires, dès la maternelle.
« L’école ne peut être neutre. Elle doit être active dans la promotion de l’égalité entre les filles et les garçons », insistent les autrices du rapport, Marine de Montaignac et Cécile Jolly.
Un environnement numérique qui amplifie les stéréotypes
Le rapport alerte sur le rôle central des réseaux sociaux dans la construction des stéréotypes. Les chiffres de l’enquête sur les stéréotypes de genre confirment une reproduction précoce des rôles sexués. Selon le rapport, le numérique agit comme un amplificateur massif des stéréotypes, via des algorithmes et contenus orientés. « Les réseaux sociaux agissent comme une arme de construction massive des stéréotypes de genre, en les relayant et les amplifiant, dès le plus jeune âge. Le nouveau combat, sans doute le plus difficile, portera sur le monde numérique » alerte le rapport, appelant à une régulation européenne renforcée.
Construire l’égalité dès l’enfance : un enjeu collectif
Si l’école est en première ligne, le rapport souligne que tous les lieux de socialisation (famille, médias, monde du travail, plateformes numériques) doivent être mobilisés pour faire reculer les stéréotypes. « Sans une politique cohérente de lutte contre les stéréotypes, les inégalités entre les sexes continueront de se nourrir dès l’enfance », conclut France Stratégie. L’application des programmes EVARS dans l’ensemble des écoles publiques comme privées sur tout le territoire, de moyens et de temps dans la formation continue comme initiale semble essentielle.
Djéhanne Gani
