« Nous refusons qu’une logique strictement comptable compromette la qualité de l’enseignement, l’inclusion scolaire et la vitalité du village », clament ensemble les personnels, familles et élus mobilisés. Devant la mairie du village, familles, enseignants et élus de Montgeroult et Courcelles-sur-Viosne (95) se sont rassemblés pour dire non à la suppression annoncée d’une classe dans leur école vendredi 6 juin. Une mesure que beaucoup jugent incompréhensible et lourde de conséquences pour l’avenir des enfants… et du village.
Une fermeture pour… deux élèves en moins ?
L’école de Montgeroult-Courcelles, nichée au cœur du parc naturel régional du Vexin, scolarise plus de cinquante enfants issus des deux villages. L’inspection académique envisage pourtant de supprimer une classe à la rentrée 2025, au motif d’une baisse très légère des effectifs – deux élèves en moins par rapport à l’année précédente. Audrey Saliou est une mère très mobilisée, elle est très inquiète sur l’avenir de l’école et les conditions d’apprentissage des enfants à la rentrée. Cette fermeture entraînerait une nouvelle organisation pédagogique intenable : deux classes à 4 niveaux chacune. La première accueillerait 24 enfants de la Petite Section au CP, la seconde 29 à 30 élèves du CE1 au CM2.
« L’Éducation nationale envisage de fermer une classe sur notre école de village qui ne compterait alors plus que deux classes pour 54 élèves », témoigne Cendryne Mouche, enseignante, « cette situation n’est pas viable. Comment finir l’enseignement de la lecture aux CE1 avec 30 élèves de plusieurs niveaux ? Et comment circuler dans une classe aussi remplie, avec les adultes, les AESH, et les élèves à besoins particuliers ? »
Une école inclusive mise en difficulté
L’école compte actuellement 13 % d’élèves à besoins particuliers, dont trois sont en situation de handicap reconnu, accompagnés d’AESH à temps partiel, et quatre autres suivis par le RASED. Cette diversité demande un accompagnement individualisé, aujourd’hui rendu possible par des effectifs équilibrés. « Je suis très inquiète pour la rentrée prochaine », confie Aude Krawiec, une enseignante de maternelle. « On parle souvent de bienveillance… mais comment faire preuve de bienveillance avec 30 élèves à gérer, dont certains en grande difficulté ? » Autre inquiétude : la direction d’école serait confiée à l’un des deux enseignants restants, en plus de sa classe à quatre niveaux, alourdissant une charge déjà écrasante.
Le dernier service public du village
Dans ces communes rurales dépourvues de commerces et de services publics, l’école représente bien plus qu’un lieu d’enseignement : c’est un point d’ancrage, un lien social, un repère.
« L’école est le seul service public qui est aussi le lieu où se créent les liens sociaux », rappelle Cendryne Mouche.
La suppression d’une classe pourrait à terme menacer l’attractivité du village. Une famille a déjà retiré son enfant, et plusieurs autres envisagent de le faire si la situation se confirme.
Une communauté unie et déterminée
Face à cette menace, la mobilisation s’organise. Le 27 mai, une réunion publique a rassemblé parents, enseignants, élus de Montgeroult et Courcelles, ainsi que le maire de Courcelles, pour faire le point et coordonner une riposte collective. Des banderoles ont fleuri sur les axes stratégiques du territoire, dont l’A15. Une pétition en ligne a déjà recueilli plus de 600 signatures. Un stand d’information a été installé à la brocante du 8 juin pour continuer à sensibiliser les habitants.
« L’école, c’est la réussite pour tous. Supprimer une classe, c’est mettre en danger cette réussite et le bien-être des élèves, qui nous tiennent à cœur », insiste Cendryne Mouche, « j’ose espérer que l’Éducation nationale sache qu’un effectif raisonnable permet une pédagogie active, où les élèves peuvent manipuler, interagir, s’exprimer… et bien apprendre. »
L’inspection académique doit rendre sa décision le 17 juin. D’ici là, les habitants de Montgeroult et Courcelles poursuivent leur mobilisation.
Les parents d’élèves lancent un appel : élus, citoyens, enseignants, défenseurs du service public : « Cette fermeture ne serait pas une simple décision administrative », pour eux, « ce serait un pas de plus vers l’abandon des campagnes. »
Djéhanne Gani
