L’Expresso du 3 janvier 2023
- Le fait du jour -
Avec François Jarraud depuis 2001, avec Lilia Ben Hamouda aujourd’hui, le « Café pédagogique » a été et continuera à être un média essentiel pour tous les acteurs de l’éducation. En ce début de janvier 2023, François Jarraud, qui anime l’équipe du « Café Pédagogique » depuis 2001, passe la main pour profiter d’un droit bien mérité à la…
« Les constats sont durs… Ils conduisent à la défiance générale ». Six mois après son arrivée rue de Grenelle, Pap Ndiaye signe une tribune très critique sur l’action de JM Blanquer. Et il met en avant ses projets. Problème : peut-on dresser un bilan très négatif de l’action de son prédécesseur et « en même temps » prolonger…
- Le système -
Le 11 septembre dernier, Eric Zemmour a lancé le collectif « Protégeons nos enfants » en dénonçant ce qu’il a appelé « le grand endoctrinement » qui serait selon lui la cause principale du « grand remplacement ». « En attendant que nous soyons au pouvoir, je vais vous dire quoi faire immédiatement, avec vos moyens, dès aujourd’hui et sans attendre…
- Les disciplines -
Quelle place réserver à l’enseignement des sciences du vivant ? Quelle méthode pour rédiger les programmes scolaires ? Marc-André Selosse, professeur au Muséum national d’Histoire naturelle et aux Universités de Gdansk (Pologne) et Kunming (Chine), évoque « un impératif moral absolu » pour mieux former la nouvelle génération aux SVT. Horaires, formation des enseignants, interdisciplinarité…
- L'élève -
- Le système -
La création du concours interne exceptionnel à destination des contractuels et contractuelles promis par le ministre Pap Ndiaye est annoncée dans le Journal Officiel du 28 décembre. Les candidats devront être titulaires d’un diplôme niveau 5, soit un bac+2. Pour rappel, les prétendants aux concours de recrutement de professeur du premier et du second degré…
Le 14 décembre dernier, le Tribunal administratif de Paris statuait sur le recours d’un AESH qui attaquait le rectorat de Paris pour non-versement de l’indemnité d’éducation prioritaire. « Les juges du tribunal ont considéré que l’exclusion des AESH du versement de l’indemnité REP et REP+ constituait une rupture d’égalité » selon SUD éducation Paris. « Le recteur de…
L’eurodéputé et conseiller régional de Normandie Nicolas Bay du parti Reconquête conteste le contenu d’un cours d’histoire géographie sur les migrations dispensé au collège du Neubourg dans l’Eure qu’il qualifie « d’endoctrinement ». Une situation dénoncée par le SNES-FSU. « Le professeur a immédiatement demandé la protection du rectorat et une réaction ferme à l’égard de l’élu et…
- La classe -
Lors du prochain séminaire de l’axe politiques éducatives du LIEPP, « L’accès aux ressources numériques pendant la fermeture des établissements scolaires : quels effets sur les apprentissages des élèves ? » Clémence Lobut présentera les résultats d’une recherche qui « analyse les conditions d’apprentissage et leur variation en fonction de la disponibilité d’équipements numériques mobiles pour les élèves, avant ou…
- Les disciplines -
Connaissez-vous les possibles du site Sentinel Hub ? « Ce site met à disposition les données d’imagerie satellitaire issues des constellations Européennes appartenant au programme Copernicus. Parmi les outils proposés au grand public, l’application EO-Browser permet de visualiser facilement les images satellites, puis de les analyser », invite le site pédagogique de l’académie de Nice. Tutoriels, vidéos et activité possible…
L’association des professeurs de SVT met en ligne 2 conférences sur les 11 qui ont eu lieu lors des journées nationales à Paris en novembre dernier. Il s’agit de celle sur l’ARN messager, vaccins et thérapeutiques « situation actuelle, opportunités et défis » conduite par Chantal Pichon, professeure à l’université d’Orléans. La scientifique présente les principales étapes qui ont…
L'édito
Amélie, merci !
Alors que les enseignants entament un mouvement social de longue durée, il faut rendre sa part de mérite à Amélie Oudéa-Castéra. Pour avoir incarné aussi visiblement les non-dits du projet éducatif d’Emmanuel Macron, elle mérite un remerciement. Et elle nous donne l’occasion de revenir sur ce projet et ce combat. Depuis 2017, Emmanuel Macron a fait de l’éducation « le combat de notre siècle ». Et, depuis 2017, les enseignants bloquent le projet. Un long septennat de luttes qui nécessite maintenant une réponse de la société.
L’Ecole et Ibiza
A quoi pense Emmanuel Macron ? D’année en année, son choix semble moins sur. Jean-Michel Blanquer avait su déguiser la politique éducative d’Emmanuel Macron sous le masque de la République et de la science. En 2018-2019, au moment de la loi Blanquer, sous la poussée des enseignants, son siège vacillait. Mais, avec l’aide de la droite sénatoriale, il avait réussi à se maintenir en usant de son image de défenseur de l’Ecole. Il fallut Ibiza pour qu’il tombe. Le ministre faisait passer ses vacances avant son travail, la jet-set avant la République.
Avec Amélie Oudéa-Castéra, Ibiza est arrivé dès le premier jour. Mieux que ses prédécesseurs elle affichait sans vergogne ses choix de caste et revendiquait ses privilèges. De déclaration maladroite en formule malheureuse, la ministre a fini par incarner la grande bourgeoisie séparatiste, plutôt VIIème que 6ème. Ce choix, malheureux pour E. Macron, met en évidence les décisions anti sociales de la politique éducative d’E. Macron.
Une seule politique depuis 2017, celle de Macron
Car, depuis 2017, c’est bien la même politique éducative qui essaie de s’installer. On peut même remonter à 2016, où le futur ministre d’Emmanuel Macron, membre de l’Institut Montaigne, la définit. Dans « L’école de demain« , JM Blanquer en fixe les bases. C’est l’autonomie d’établissements scolaires mis en concurrence, dirigés par des chefs managers. C’est la fin du collège unique remplacé par des établissements à autonomie pédagogique. C’est l’éducation réduite aux fondamentaux dans le premier degré et pliant sous leur poids dans le second. Ce sont des enseignants dont les pratiques pédagogiques sont dictées et dont le mérite est estimé annuellement grâce aux évaluations nationales. Cette privatisation de la gestion de l’éducation nationale est proclamée par les gouvernements d’E. Macron. En février 2018, E Philippe promeut l’individualisation des salaires et la libération des managers dans toute la fonction publique. Quelques mois plus tard, E. Macron fait de la transformation de l’Ecole « le combat de notre siècle ». En aout 2022, il revient sur les fondamentaux de 2016 : autonomie des établissements, contractualisation générale des établissements et des enseignants. Cela nous donne le Pacte, le CNR.
Les enseignants sont seuls à faire reculer Macron
Si E. Macron se répète depuis 2018, si ses gouvernements fixent le même cap depuis 2017, c’est que la politique éducative du président peine à s’installer. Certes la loi de transformation de la fonction publique est passée. La loi Blanquer aussi. Le Pacte est mis en place. Mais la grande libéralisation de l’Ecole promise depuis 2016 n’a toujours pas eu lieu.
Les enseignants ont fait reculer Blanquer et sa loi en 2019. Il a fallu la désorganisation issue du confinement pour que la loi Rilhac passe. La transformation radicale du lycée professionnel a été freinée par des années d’opposition réussie des enseignants des L.P. Ils ne s’en rendent pas forcément compte. Mais les macronistes le savent. Les enseignants ont réussi, et eux seuls, à bloquer Jupiter.
Au point de bascule
Aujourd’hui, alors qu’Amélie Oudéa-Castéra entame sa mission ministérielle, les syndicats enseignants sont presque unanimes à écrire que « nous sommes à un point de bascule pour l’Ecole publique« . Sud, Unsa, Fsu, Sgen Cfdt et Cgt appellent ensemble à « une réponse forte qui passe par une action dans la durée« . Ils rejettent la politique présidentielle, jugée « passéiste et conservatrice« . Ils dénoncent « une école du tri social » marquée par la disparition du collège unique et l’affectation des jeunes élèves à des filières séparées. Ce tri social est particulièrement visible au collège et au lycée professionnel.
Particularité française
Alors que, chez nos voisins, la révolution libérale de l’Education a pu se mettre en place, la France résiste. C’est grâce aux enseignants. Mais leur action est possible par l’écho qu’elle rencontre dans la société. Dans un numéro de la Revue de Sèvres consacré à la privatisation de l’Ecole, Xavier Pons relevait cette spécificité française. » Les Français sont pour le libre choix de l’Ecole… Mais une fois mis devant le choix ils se posent des questions », écrivait-il. Parce que la privatisation menace les communs, encourage la fragmentation de la société, colporte des valeurs qui s’opposent aux valeurs collectives. A ce titre, le « nouveau pacte » et la transformation du collège sont une « révolution culturelle » dans la mesure où il attaque les bases de l’école publique.
Puisque nous atteignons le point de bascule, les Français peuvent encore s’opposer à ce projet et défendre leur école. Les enseignants ont besoin d’eux.
François Jarraud