« Cinq ans pour passer un concours et se préparer à cette profession nous semblent une nécessité. Par contre, ce qui reste à améliorer, c’est de donner aux jeunes l’envie de l’exercer » écrit Maxime Travert, professeur des universités à l’Inspé (Institut National Supérieur du Professorat et de l’Éducation) d’Aix-Marseille. Dans cette tribune, il dénonce la réduction du temps de formation et de préparation au concours.
Une des ambitions de nos universités est de permettre à chacun, quelles que soient ses origines et grâce à une formation inscrite dans la durée, de franchir les différents paliers de sélection qui balisent le parcours qui le mène vers l’avenir professionnel qu’il envisage.
Pour devenir enseignant, il faut franchir l’étape du concours. Le décret n° 2025-352 du 17 avril 2025 modifiant les conditions de recrutement et de formation des corps enseignants situe les épreuves des concours en fin de licence (3 ans de formation) alors qu’aujourd’hui, elles se déroulent en fin de master (5 ans de formation). Dans la plupart des cas, le temps de préparation aux épreuves occupera une partie des 3 derniers semestres de la licence, alors qu’aujourd’hui s’ajoutent à ce temps de formation les 4 semestres des deux années de master. En fait, on passe concrètement de 7 à 3 semestres de formation.
Cette réduction du temps de préparation au Certificat d’Aptitude au Professorat de l’Enseignement du premier ou du second degré, pose le problème de la réussite de tous, quelles que soient ses origines sociales et culturelles, aux concours de recrutement.
En effet, les épreuves sélectives des concours nécessitent la maitrise d’un ensemble de compétences, écrites et orales, qui, si elles sont familières pour certains, sont souvent plus éloignées pour d’autres et plus particulièrement pour ceux qui sont issus des milieux les moins favorisés. Le temps pour combler ces inégalités est une nécessité. Nous l’observons tous les jours dans l’exercice de notre métier.
Dans le cadre de cette réforme, une solution est de spécialiser des licences vers les métiers de l’enseignement dès l’entrée à l’université. Mais, hormis ceux pour qui celui-ci est une vocation précoce, les premières années de formation ne doivent-elles pas être consacrées à la découverte des possibles orientations envisageables avant de choisir celle qui peut donner sens et consistance à un avenir professionnel ? Une autre est de baisser le niveau d’exigences du concours. Mais peut-on réellement envisager que les épreuves proposées ne s’associent pas à des objectifs ambitieux ?
Si ce métier est choisi par certains étudiants, c’est parce qu’il est considéré comme source d’épanouissement. Il est, disent les politiques, attractif. Il est, disent les futurs enseignants, passionnant. Cette perspective prend parfois du temps et en nécessite également pour permettre à tous, quelle que soit sa position sociale, de pouvoir la réaliser.
Cinq ans pour passer un concours et se préparer à cette profession nous semblent une nécessité. Par contre, ce qui reste à améliorer, c’est de donner aux jeunes l’envie de l’exercer. La première des motivations est celle qui consiste à offrir à chacun le destin qu’il envisage et non celui qui lui est imposé.
La mixité sociale est régulièrement présentée comme un moyen de promouvoir l’égalité et la justice sociale auprès des élèves. Comment envisager qu’elle ne soit pas servie par une diversité des profils d’enseignants ? Ceux qui la font vivre !
Maxime Travert
